The Fits ★☆☆☆

Toni a onze ans. Elle boxe dans la salle de son frère entourée de garçons plus âgés qu’elle. Elle rejoint parallèlement les Lionnes, un groupe de filles qui pratiquent dans une salle adjacente le drill, une variante musclée du hip hop.

« The Fits » est un film déroutant. Un film sur la boxe sans combat. Un film sur la danse sans musique. Mais aussi un film sur l’enfance sans adultes. Et un film sur les Noirs sans aucun Blanc – si ce n’est la silhouette entr’aperçue d’une psychologue.

À voir la bande-annonce, on imaginait être sur un chemin tracé d’avance : le parcours initiatique d’une gamine sportive qui passe de la boxe au hip hop. Anna Rose Holmer nous surprend autant qu’elle trompe notre attente en introduisant un élément dramatique. Les jeunes danseuses manifestent, les unes après les autres, les mêmes symptômes inquiétants : des convulsions (en anglais « fits »). Quelle en est la cause ? Une maladie sexuellement transmissible ? Un empoisonnement de l’eau potable ? Du coup, l’enjeu du film se déplace. Il ne s’agit plus de savoir si Toni va réussir à intégrer les Lionnes mais de connaître les causes de ces convulsions.

Sans doute aurait-il été d’une banalité paresseuse de traiter, comme on l’a déjà trop fait, l’histoire d’une jeune sportive qui, à force de volonté et de sacrifice, devient championne dans sa discipline. On saura donc grâce à Anna Rose Holmer de nous avoir évité ce film-là. Faut-il pour autant la remercier pour ce film-ci ? Oui, à condition de comprendre ce qu’elle a voulu dire. Plongée immersive dans le corps d’une préadolescente ? Opacité du désir ? Métaphore de la puberté ? Les thèmes que charrient « The Fits » sont trop lourds, trop confus pour convaincre.

La bande-annonce

2 commentaires sur “The Fits ★☆☆☆

  1. Hello Yves. J’ai au contraire trouvé ce film convaincant. Je suis femme d’origine mixte d’ascendance africaine. Tout cet univers rétrécit où Toni évolue entre des personnes de sa communauté – ce microcosme voulue par la cinéaste – est aussi une réalité de la vie aux Etats-Unis. A cet âge on quitte rarement ses quartiers et le processus d’identité ado ce construit entre ces regards là. On ne sait rien de son école, tout se passe sur le temps de loisirs, les fins de journée, voir les week-ends. Le centre d’activités Lincoln et la piscine vide sont les lieux d’étonnantes réflexions. La caméra nous ramène au corps de très prêt, alors même qu’il est en pleine mutation et que le silence nous concentre sur le charnel. J’ai ressenti les odeurs de vestiaires, de sueur, des produits utilisés à la buanderie, vu les carnations changer sous l’effort, etc.
    J’ai aussi été très sportive et ballotée entre les deux univers masculins féminins. Pour moi c’est un film sur l’empowerment des jeunes femmes qui explorent d’autres voies tout en souhaitant être des femmes. Cette jeune fille est puissante, observatrice, sûre d’elle, disciplinée, responsable et consciente des enjeux sociaux. Elle est solidaire de son frère. Elle coupe le cordon en perçant ses oreilles. Elle décide de disposer de son corps contre l’avis familial. Devenir femme – acceptée par le groupe – a exigée qu’elle accepte aussi le lâcher prise, à savoir ici les convulsions, pour atteindre une autre dimension de sa féminité, et devant témoins. Elle va désormais pouvoir parler de son expérience avec les plus grandes. On y suggère le cap de la puberté, de la liberté sexuelle, des choix personnels, de la posture sociale.
    Le groupe des lionnes pratiquent une danse puissante, qui reprend des gestes de combat, des attitudes de défis et les aident dans la posture physique et le chant à développer une confiance en elles. Ce chant est un véritable programme. Le peu de dialogue valorise le langage non verbal et para verbal et les plus grandes sont très libres dans leur expression. Ce sont d’ailleurs des championnes dans leur discipline aussi. Les thématiques tissées au fil des rencontres sont aussi complexes que la vie découverte par des adolescents, et les choix qu’ils sont amenés à faire. C’est fort d’espoir pour des communautés d’ascendance africaine qui ont de décisifs défis à accomplir. Ce film m’a touchée et devrait aider bien des lycéennes à accepter leurs déchirements. Il y a de nombreuses interrogations et c’est cela la vie. Observer, accepter en se fixant sur le ici et maintenant. Just go for it

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