Nora vit dans le canton d’Appenzell, dans la Suisse rurale. Sa vie n’est pas malheureuse, entre un mari qu’elle aime, deux garçons qu’elle bichonne et un beau-père qu’elle supporte tant bien que mal. L’approche d’une votation sur le droit de vote des femmes lui fera progressivement prendre conscience de l’ordre patriarcal auquel elle est soumise.
Les Suissesses ont obtenu le droit de vote en… 1971 seulement. Le sujet méritait un film, double seventies des Suffragettes qui traitait, avec Carey Mullingan, Helena Bonham Carter et Meryl Streep de la douloureuse reconnaissance du droit de vote des femmes au Royaume-Uni soixante ans plus tôt.
Sans doute Les Conquérantes n’est-il pas dépourvu de manichéisme ni de bons sentiments. Tous les personnages sont caricaturaux, depuis l’héroïne Nora qui troque sa jupe sage et couvrante pour des jeans en pattes d’eph, ses sœurs en féminisme qui découvrent avec une joie honteuse les secrets de leur anatomie, les hommes qui l’entourent qui constituent une palette représentative des réactions que suscite son activisme révolutionnaire.
Sans doute aussi le scénario est-il largement prévisible qui raconte une histoire dont l’issue nous est par avance connue (le Oui l’emportera par 65.7 % des votants – exclusivement masculins – le 7 février 1971). Évolution prévisible de Nora qui ne pousse pas l’esprit de rébellion jusqu’à la rupture. Évolution prévisible des secondes rôles : la belle-sœur qui souffre en silence des violences de son mari, la vielle féministe qui rejoue en 1971 la votation perdue de 1959, la belle Italienne qui incarne à elle seule la condition doublement minoritaire d’immigrée et de femme, etc.
Mais ne boudons pas notre plaisir. Et quand bien même trois étoiles sont bien payées pour ce film qui n’est pas de la trempe de ceux auxquels je les ai décernés récemment, accordons-les lui bien volontiers pour le plaisir qu’on a pris à sa vision.