Yves ★☆☆☆

Rappeur sans talent, Jerem (William Lebghil, héros de la série Soda et tête d’affiche de Première année) vivote dans le pavillon miteux que lui a légué sa défunte grand-mère. Son agent (Philippe Katerine, qui tenait le premier rôle du précédent film de Benoît Forgeard) le presse sans succès d’honorer ses contrats.
Une société de robotique le recrute pour tester un nouveau frigo intégré en échange de la livraison gratuite de ses courses. Le frigo se prénomme Yves et devient l’ami irremplaçable de Jerem.

Considérant mon état civil, Yves avait pour moi un attrait particulier. Pourquoi affubler un frigo de mon prénom ? Est-il ringard, ridicule, charmant, original ? Pourquoi ne pas avoir prénommé ce frigo Marcel, Gérard ou Michel ? Je pensais qu’on m’en ferait la remarque. Je n’y ai pas eu droit, soit que le film, sorti le 26 juin en pleine fête du cinéma, soit définitivement passé inaperçu, soit que j’ai passé l’âge de faire l’objet de ce genre de remarques.

La Quinzaine des réalisateurs de Cannes 2019 s’était ouvert avec Le Daim, où Quentin Dupieux mettait en scène un blouson qui parle. Il s’est achevé avec Yves, un frigo intelligent. C’est le signe que le cinéma français aime à flirter avec l’absurde.

Si Le Daim interrogeait la folie d’un homme, Yves traite d’un sujet moins tragique mais pas moins sérieux : l’emprise croissante des nouvelles technologies sur nos vies. Le sujet a un immense potentiel cinématographique : qu’on pense à 2001, Odyssée de l’espace (Yves fait un clin d’œil à Hal), à Her, ou à la série dystopique Black Mirror. L’intérêt de Yves est de révéler le potentiel comique évident d’un monde où des machines bienveillantes prendront progressivement le contrôle de nos vies.

Le problème de Yves est de ne pas choisir vraiment son parti. Il n’opte pas résolument pour l’absurde, trop raisonnable pour nous entraîner dans son délire, trop loufoque pour qu’on le prenne au sérieux. Il ne prend pas non plus à bras-le-corps la question qu’il entend traiter : Yves est trop superficiel pour traiter le sujet de l’A.I. qui aurait autorisé des développements autrement plus consistants – même si le procès autour du droit d’auteur d’une chanson composée par Jerem avec l’aide de son robot constitue une stimulante dystopie juridique..

Une fois son sujet posé, et malgré une interprétation qui ne démérite pas, Yves tourne en rond et verse dans la comédie sentimentale en imaginant une romance improbable entre Jerem et So (Dora Tillier, héroïne de Monsieur et madame Adelman), la commerciale chargée d’analyser le comportement de son frigo. C’est le signe de l’épuisement d’une veine qui aurait mieux été exploitée dans un court ou un moyen-métrage.

La bande-annonce

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