Pour Sama ★★☆☆

Waad est une jeune étudiante à l’université d’Alep quand éclate le printemps arabe en Syrie. Avec son téléphone portable, elle filme les étudiants en grève qui réclament le départ de Bachar el-Assad. La répression s’abat sur eux. Waad continue à filmer. Elle rencontre, s’éprend et finalement épouse Hamza, un jeune docteur qui décide de créer un hôpital où les insurgés seront soignés.
En 2016, au milieu des bombes, le couple a un enfant prénommée Sama.

L’an passé, un premier documentaire filmé dans les rangs mêmes de l’Armée syrienne libre (ASL) avait documenté le siège d’Alep. Still recording m’avait laissé au bord du chemin. J’en avais salué le refus du sensationnalisme et critiqué le manque d’intérêt.

Pour Sama en est presque le double inversé. Il a exactement le même sujet que Still recording et nous montre quasiment les mêmes images : des populations sous les bombes, des immeubles en ruines, des cadavres couverts de sang et de poussière….

Le documentaire prend la forme, ô combien galvaudée, mais tellement émouvante, d’une lettre d’une mère à sa fille. Pour l’auteure, il s’agit tout autant de filmer son couple que la guerre.

Le procédé pourrait sembler bien racoleur. Mais force est de reconnaître que Waad et Hamza forment un couple hors du commun. Belle comme le jour, Waad est une pasionaria toute entière dévouée à son mari qu’elle adule, à sa fille qu’elle adore et à la cause de la révolution. Le visage encore poupin qu’un poil follet parvient à peine à vieillir, Hamza dirige sans élever la voix le seul des neuf hôpitaux d’Alep-est que les bombes russes n’ont pas réussi à détruire. À chaque bombardement, les mêmes scènes terribles se reproduisent que filme sans ciller Waad : les blessés affluent dans un chaos indescriptible, certains n’en réchappent pas, leurs cadavres s’accumulent dans la chambre mortuaire dans une odeur qu’on imagine pestilentielle.

Une scène restera gravée dans les esprits : celle de ce bébé accouché sans vie par césarienne d’une parturiente tombée à neuf mois de grossesse sous les bombes. Les médecins tentent de le réanimer. Dans un film hollywoodien, on sait par avance, compte tenu de ce qui précède du scénario et du moment de la scène, si elle se terminera par la résurrection joyeuse de l’enfant ou au contraire par son décès déchirant. Ici, on ne sait rien avant de l’avoir vue ; car Alep est devenu le lieu de la mort banale et des petits miracles.

La bande-annonce

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