Italia, Le Feu, La Cendre ★☆☆☆

Plus de dix mille films muets furent tournés en Italie entre 1896 et 1930. Les négatifs, conservés à l’Institut cinématographique italien, furent emportés à Berlin en 1943 et détruits pendant la libération de l’Allemagne. C’est au prix d’un patient travail d’investigation, dans les cinémathèques du monde entier et dans les collections privées, que deux documentaristes français, Céline Gailleurd et Olivier Bohler – elle a consacré sa thèse aux survivances de la peinture du XIXe siècle dans le cinéma italien des années 1910 et vient de diriger en 2022 un ouvrage collectif sur le cinéma muet italien et il enseigne le cinéma à l’Université d’Aix-Marseille – ont rassemblé ce corpus unique.

On y voit des images qu’on n’avait jamais vues – car il faut ici confesser notre médiocre niveau de connaissance du cinéma muet italien. En particulier des scènes de Cabiria, le fantastique péplum de Giovanni Pastrone, sorti en 1914, inspiré de Salammbô – que j’aimerais tant avoir l’occasion de découvrir en salle avec, pourquoi pas, un orchestre. On y découvre des divas dont la célébrité à l’époque n’était pas moindre que celle de leurs lointaines héritières mais dont le nom a été oublié : Lyda Borelli (la légende raconte que le comte Cini qui l’épousa en 1918 racheta tous les négatifs de ses films et les jeta à la mer), Pina Menichelli, Francesca Bertini (la plus belle femme au monde disait-on – déjà – à l’époque)…

Un défaut du film est son manque de clarté et de pédagogie. C’est le comble pour deux réalisateurs qui enseignent l’un et l’autre le cinéma à l’Université. On y voit, dans l’ordre chronologique de leur sortie, des scènes de films qui ne sont pas titrés – le petit jeu étant, devant le générique de fin, d’essayer vainement de les identifier. On ne nous explique guère ce que l’on voit, qui en est le réalisateur, de quel moment du cinéma ces images sont emblématiques…. Peut-être les spécialistes – mais il n’y en a guère – se pâmeront-ils ; quant aux ignorants – et ils sont, comme moi, nombreux, je le crains – n’y comprendront pas grand-chose.

Mais il y a pire : la voix off de Fanny Ardant (c’est Isabella Rossellini qui joue dans la version italienne du documentaire). Outre que ses roucoulades aristocratiques m’ont toujours exaspéré – sentiment dont je reconnais volontiers la part de subjectivité – les textes qu’elle lit sont difficiles à identifier. On comprend, mais pas toujours, qu’il s’agit d’écrits critiques sur le cinéma – par exemple de Pirandello – ou de témoignages de contemporains – Pastrone racontant la réalisation de Cabiria ou Fellini découvrant, dans les bras de son père, à six ans, dans une salle de Rimini, Maciste.

La bande-annonce

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