L’Illusion verte ★☆☆☆

Le « bio » fait désormais partie de notre vie. Même s’il coûte plus cher, nous en consommons de plus en plus. Pourquoi ? par altruisme ou par égoïsme ? pour  protéger la planète ou pour se protéger soi-même contre les pesticides et les conservateurs ?
Mais que savons-nous du « bio » que nous consommons ? Le documentaire de Werner Boote nous en révèle la face cachée. Les grandes entreprises qui vendent bio ou qui se donnent les atours d’une compagnie « eco-friendly » sont, dit-il, moins motivés par le souci de l’écologie que par celui de leurs parts de marchés. Cette stratégie a un nom : le « greenwashing ».

Le réalisateur autrichien tourne son troisième documentaire. Les deux premiers étaient respectivement consacrés au plastique (Plastic Planet, 2008) et à la surpopulation (Population Boom, 2014). C’est en réalisant le premier qu’il a fait la connaissance de Kathrin Hartmann, une environnementaliste allemande. L’Illusion verte (en allemand : « le mensonge vert ») suit leur tour du monde du greenwashing. Le duo se répartit les rôles. Lui joue au Candide qui croit dans les produits bio et les étiquettes vertes, elle se pose en scientifique désabusée qui démasque les hypocrisies et rétablit les vérités cachées : en Indonésie où l’huile de palme soi-disant bio est produite en incendiant massivement la forêt tropicale, sur les bords du golfe du Mexique où le naufrage de la plateforme Deepwater n’en finit pas de causer des dégâts environnementaux, au Brésil où les peuples premiers sont spoliés de leur terre…

Comme on le constate à l’énumération des différents chapitres de ce long voyage, le duo perd parfois de vue son sujet.
Il aurait mieux fait de s’y tenir. Il aurait été intéressant de documenter sérieusement la question des labels écologiques. Sont-ils des arguments publicitaires utilisés par des entreprises en quête de profit ou des indicateurs fiables permettant aux consommateurs d’opérer des choix responsables ? La réponse des deux enquêteurs est sans ambiguïté. Elle ne laisse d’ailleurs guère la parole aux tenants de la thèse opposée.

Quand bien même les labels écologiques sanctionneraient des produits authentiquement durables, L’Illusion verte a un argument massue pour les discréditer : ce n’est pas aux consommateurs, par leurs choix d’achat, d’encourager des pratiques écologiques, mais aux pouvoirs publics, par la réglementation, d’interdire la mise sur le marché de biens de consommation produits selon des procédures qui ne respectent pas l’environnement.

L’idée n’est pas inepte. Mais, son énoncé ne suffit pas à meubler quatre vingt dix-sept minutes.

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Kabullywood ★★☆☆

Shab, Mustafa, Sikandar et Qais sont des jeunes Afghans de la classe supérieure. Bourgeois bohèmes, la vingtaine, passionnés d’art et de culture, ils n’ont guère connu que la guerre dans leur pays. Lorsque le Génération Café, le seul bar de la capitale à offrir une programmation culturelle, est détruit par un attentat terroriste, les quatre jeunes gens se mobilisent. Ils vont retaper une ancienne salle de cinéma et la rouvrir au public.

Kabullywood est un drôle d’objet filmique, un mélange de documentaire et de fiction. Documentaire, Kabullywood l’est assurément, qui montre l’Afghanistan comme on ne le filme guère, loin de l’imagerie caricaturale taliban/burqa/pavot à laquelle il est réduit. On y voit une métropole comme le Tiers monde en compte tant, laide et polluée dont le seul trait distinctif est la majestueuse chaîne de montagnes enneigées qui ceint le bassin dans lequel elle est lotie. Documentaire également, Kabullywood raconte les efforts désespérés que quelques individus déploient pour y faire (re)vivre une expression artistique. On pense à Salim Shaheen, le réalisateur le plus connu et le plus prolifique d’Afghanistan, auquel Sonia Kronlund a consacré un documentaire sorti en 2017 Nothingwood.

Mais Kabullywood est aussi une œuvre de fiction pas toujours adroite. Tourné à la va-vite avec des acteurs amateurs, Kabullywood a parfois la naïveté d’une télénovela brésilienne : ainsi des scènes où le père de Sikandar roule des yeux scandalisés à la découverte des frasques de son fils ou celles où le frère de Shab jure de défendre la réputation de sa sœur. Le scénario n’arrange rien dont les rebondissements pas toujours crédibles (une course poursuite en voiture à Kaboul) n’apportent rien au film.

On en vient à regretter que Kabullywood ne se soit pas borné à ce qu’il aurait pu être : un reportage sur l’impossible réouverture d’un cinéma.

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Euforia ★☆☆☆

Matteo (Riccardo Scamarcio) et Ettore (Valerio Mastandrea) sont frères. Mais tout les oppose. Matteo vit à Rome dans un luxueux penthouse. Il travaille dans le monde de l’art. Homosexuel assumé, gros consommateur de cocaïne, il brûle la vie par les deux bouts. Marié, père de famille, Ettore vit encore en province non loin de sa mère et exerce la profession d’instituteur.
Matteo, qui y a des connections, a obtenu un rendez vous à l’hôpital pour son frère et reçoit avant lui les résultats des analyses qui lui ont été prescrites. Il apprend que Ettore est atteint d’un cancer incurable.

En 2002, Son frère, un film bouleversant de Patrice Chéreau racontait la lente agonie de Thomas (Bruno Todeschini), un homosexuel, confié aux soins de son frère Luc interprété par Éric Caravaca. Euforia reproduit la même trame.

L’homosexualité et sa difficulté à l’accepter n’est plus comme chez Chéreau le sujet principal du film. Dans le film de Valeria Golino, les deux frères sont séparés par une succession de choix opposés : lieu de résidence, profession, engagement sentimental. Tandis que l’un mène une vie de pop star, l’autre a une vie ordinaire. La maladie s’abat sur le second.

Le problème d’Euforia est de nous raconter une histoire cousue de fil blanc. Dès le départ, on sait que le mal dont est affligé Ettore est incurable et que l’histoire du film sera celle de son inexorable agonie. Dès le début du film, on se doute que, malgré leurs évidentes différences, l’épreuve rapprochera les deux frères car les liens du sang sont plus forts que tout.

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Le Chant du loup ★★★☆

Chanteraide (François Civil) est analyste en guerre accoustique. À bord d’un sous-marin, sans hublot ni caméra, il est « oreille d’or » chargé d’identifier par les seuls bruits qu’elles émettent les menaces et les cibles.
Au large de la Syrie, dans une mission à haut risque de récupération de nageurs de combats, Chanteraide, embarqué à bord du Titane, un sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) commet une erreur de classification qui manque bien tuer l’ensemble de l’équipage sauvé par la bravoure de son commandant (Reda Kateb).
Rappelé à Brest, Chanteraide réussit non sans mal à identifier la trace accoustique qui l’avait égaré.
Mais la situation géopolitique se tend. La Russie se fait de plus en plus menaçante. Agissant sur ordre de l’Elysée, l’amiral commandant la force océanique stratégique (Mathieu Kassovitz) ordonne l’appareillage de L’Effroyable, un des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engin.

Quasiment aucun film de sous marin n’a été tourné en France. Si la référence absolue est allemande (Das Boot, 1983), le genre est presqu’exclusivement hollywoodien : À la poursuite d’Octobre rougeUSS AlabamaK-19 : le piège des profondeurs (signé par Kathryn Bigelow avant qu’elle reçoive une pluie d’Oscars pour Démineurs et Zero Dark Thirty) ou le plus récent Kursk.

Non sans panache, le nouveau venu Antonin Baudry – qui tira de son passage au cabinet de Dominique de Villepin le desopilant Quai d’Orsay – relève le défi grâce à la confiance de Jérôme Seydoux. Il a le culot de confier le premier rôle à un quasi inconnu (François Civil remarqué dans le très oubliable Burn out) et de l’entourer d’une palette de stars : Omar Sy, Reda Kateb (dont la présence aux commandes d’un SNLE et d’un SNA démontrent au passage que la Marine nationale n’est pas raciste) et Mathieu Kassovitz (qui semble tout droit sorti d’un épisode du Bureau des Légendes).

Le Chant du loup – qui tire son titre du bruit émis par le sonar ennemi – est tout entier tendu vers l’action. Il comporte ni plus ni moins deux scènes entre lesquelles s’intercalent une escale à terre et une inutile histoire d’amour entre Chanteraide et une jolie libraire.

Le scénario a son lot de rebondissements peu crédibles. Sa clé se dévoile au milieu du film en deux phrases. Mais ces défauts n’entament pas le plaisir que l’on prend à cette plongée immersive dans l’atmosphère confinée de ces deux sous-marins. Les hommes – car le scénario n’a pas intégré la récente féminisation des equipages des SNLE – y vivent dans une exiguïté qui encourage la camaraderie mais y respectent une stricte hiérarchie. Ils mettent en œuvre des procédures éprouvées. Pré-apocalyptique et hyper-réaliste à la fois, Le Chant du loup est un pari réussi.

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Black Snake, la légende du serpent noir ★☆☆☆

Clotaire Sangala (Thomas Ngijol) est né en Afrique dans des circonstances nimbées de mystère. Après avoir grandi en France, il revient dans son pays natal et y retrouve un grand-père chinois expert en arts martiaux.
Le pays est sous la coupe du dictateur Ezéchias (Michel Gohou) qui a le soutien de l’ancien colonisateur français représenté par l’immonde Thouvenel (Edouard Baer). Seule une journaliste, Françoise Langlos (Karole Rocher), a le courage de se révolter contre les coupeurs de routes qui sèment la terreur.
Après qu’un serpent jaune l’a piqué et lui a donné des super-pouvoirs, Clotaire alias Black Snake va devenir malgré lui le héros de la lutte contre l’oppression.

Thomas Ngijol est de retour. Huit ans après Case Départ, quatre ans après Le Crocodile du Botswanga, le voici une nouvelle fois au sommet de l’affiche sans Fabrice Eboué à ses côtés. L’a remplacé Karole Rocher, compagne de Thomas Ngijol à la ville, qui co-signe la réalisation et a co-écrit le scénario.

L’humour plein d’auto-dérision du comédien passé par le Jamel Comedy Club et le Grand Journal de Canal fait souvent mouche. La première moitié du film est hilarante durant laquelle le personnage qu’il campe, lâche et mythomane, se découvre des super pouvoirs. Mais bientôt la comédie tourne en rond. Les trop rares apparitions de Edouard Baer en barbouze raciste ne réussissent pas à réveiller l’attention. Et Karole Rocher a dix ans de trop pour le rôle de jeune et jolie journaliste qu’elle est censée incarner.

Si Case départ et Le Crocodile du Botswanga, le premier sur l’esclavagisme aux Antilles, le second sur le néo-colonialisme en Afrique, étaient à la fois drôles et profonds, Black Snake n’est ni l’un ni l’autre.

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« Peu m’importe si l’Histoire nous considère comme des barbares » ★★☆☆

Mariani Marin (Iacob Ioana) est metteur en scène de théâtre. Elle travaille à la reconstitution du massacre des Juifs commis en 1941 à Odessa par les troupes roumaines pro-fascistes du général Antonescu.
Ses journées sont bien chargées. Elle doit se documenter sur les événements qu’elle entend relater. Elle doit gérer une vie personnelle compliquée, avec un homme marié dont elle craint d’attendre un enfant. Elle doit recruter des figurants, choisir leur costumes, leur faire répéter des combats soigneusement chronométrés. Elle doit surtout convaincre Movila, un fonctionnaire municipal qui craint que le public n’apprécie pas qu’on exhume les pages sombres du passé national.
Vient le jour du spectacle…

Peu m’importe… est un film difficile. Son titre interminable, son affiche minimaliste, sa durée hors norme annoncent la couleur : on n’est pas là pour s’amuser. Il évoque une page sombre et méconnue de l’histoire européenne : ces quelques années où la Roumanie, vaincue par Hitler, s’allie avec l’Allemagne nazie sous l’autorité du maréchal Ion Antonescu, un « Pétain roumain » et se rend coupable durant l’opération Barbarossa, sur le front de l’Est, de crimes de guerres et de génocide comme à Odessa en octobre 1941.

Radu Jude aurait pu choisir la voie du documentaire pour raconter cette histoire. Il choisit un procédé autrement plus malin. Il imagine un double autobiographique, une jeune metteur en scène de théâtre, qui reconstituerait les faits dans la Roumanie contemporaine. Il fait ainsi d’une pierre deux coups : dévoiler un pan honteux de l’histoire roumaine et dénoncer le nationalisme de ses contemporains.

Car, comme on pouvait le craindre, la reconstitution théâtrale ne se passe pas comme prévue. Nationaliste et anticommuniste, le public applaudit à tout rompre les troupes fascistes d’Antonescu et applaudit à leurs assauts victorieux contre les lignes bolcheviques. Viscéralement antisémite, il ne moufte pas aux exactions commises par les Juifs. Pire : il ceinture un Juif échappé et le renvoie à la mort.

On l’aura compris : la charge est lourde. Et c’est miracle que le film ne soit pas censuré en Roumanie voire qu’il ait été retenu pour représenter le pays aux Oscars du meilleur film en langue étrangère.

Voulant tout à la fois exhumer les pages sombres de l’histoire de son pays et dénoncer le négationnisme qui le ronge, Radu Jude filme à la truelle. Il n’hésite pas à asséner des dialogues assommants où l’héroïne s’épuise à combattre ses contradicteurs, les figurants qui paradent en uniforme nazi, les politiciens qui dénigrent son projet. Sans doute l’énergie qu’il déploie est-il à la mesure des mensonges qu’il veut dénoncer. Mais, aussi salvatrice soit-elle, la charge est rude. Après deux heures, on en sort hébété.

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Deux fils ★☆☆☆

Joseph (Benoît Poelvoorde) a deux fils. Joachim (Vincent Lacoste) peine d’autant à achever ses études de psychiatrie qu’il sort d’une difficile rupture amoureuse. Ivan (Mathieu Capella), de dix ans son cadet, est en pleine crise d’adolescence. Joseph ne va guère mieux. La mort de son frère aîné l’a traumatisé. Il a décidé d’abandonner son métier et de se consacrer à la littérature.

Deux fils aurait pu s’appeler Deux frères ; mais le titre avait déjà été utilisé par Jean-Jacques Annaud en 2004. Il aurait pu aussi s’appeler Un père et ses deux fils. Le film en effet n’oppose pas deux frères l’un à l’autre. Il raconte un trio déséquilibré mais aimant.

Un trio résumé lumineusement par l’affiche reconnaissable entre mille de Floc’h, l’illustrateur qui, depuis plus de quarante ans, signe les affiches de Diane Kurys, de Alain Resnais et même de Woody Allen. Woody Allen, justement, aurait inspiré à Félix Moati son premier film, qui raconte sur un mode tragi-comique les crises existentielles de trois hommes à trois âges de leur vie.

Qui est le plus puéril des trois ? Sans doute, le père de famille, Joseph, qui, renonçant à ses responsabilités familiales et malgré son manque évident de talent, s’est mis en tête d’écrire. La séquence où il lit quelques pages de son premier roman, en séance publique, dans une librairie, devant ses proches effarés, est particulièrement drôle.

Le père, paradoxalement, devient le fils de ses fils. L’aîné Joachim se cherche. Il trouve Esther (Anaïs Demoustier), qui enseigne le latin à son frère, aussi insouciante qu’il est névrosé, aussi libérée qu’il est refoulé. La scène qui les réunit dans une piscine est d’une rare poésie. Le cadet Ivan est le plus drôle. Le collégien n’a qu’une obsession : séduire Mélissa, la plus jolie fille de sa classe. Quand il ne fugue pas, il trouve un refuge chez la psychologue scolaire (India Hair).

Deux fils n’est pas sans qualités. La direction d’acteurs est excellente. Les plans tournés de nuit autour de la porte Saint-Martin créent une vraie atmosphère soulignée par la musique jazzy. Mais Deux fils a un défaut rédhibitoire : sa flagrante absence d’originalité qui, dans une programmation surabondante, dissuadera son public potentiel d’aller le voir et réduira ceux qui l’auront vu à l’oublier illico.

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The Raft ★★☆☆

En 1973, l’anthropologue mexicain Santiago Genovés décide de réaliser une ambitieuse expérimentation. Pour étudier les mécanismes de la violence, la façon dont elle naît au sein d’un groupe, se contient ou dégénère, il place six femmes et cinq hommes à bord d’un radeau au milieu de l’Atlantique entre les Canaries et le Yucatán. Pour attiser les tensions, il les choisit de pays, de conditions et de religions différentes, apparie des blondes appétissantes et un prêtre angolais.
Quarante trois ans après les faits, le réalisateur suédois réunit les survivants, les interrogent sur cette expérience hors du commun et entremêlent ces interviews d’images d’archives.

The Raft lève le voile sur une expérience aujourd’hui oubliée dont on se demande – même si The Loft et Koh Lanta sont passés par là – si elle aurait reçu aujourd’hui les autorisations pour être menée à bien. Imaginez : onze personnes sans expérience de la navigation placés sur une boîte de conserve, sans moteur ni navire suiveur, dans le seul but de les regarder s’étriper.

Mais rien ne se passe comme prévu. Au lieu de se sauter à la gorge, les membres de l’expédition sympathisent et se soutiennent. Comment d’ailleurs aurait-il pu en être autrement ? Comment imaginer que onze jeunes gens en pleine santé, ayant fait acte de candidature, connaissant par avance la durée et la condition de leur isolement, puissent reproduire le comportement par exemple de passagers kidnappés dans un détournement d’avions ou de prisonniers torturés dans une prison insalubre, sans doute moins capables de résilience ?

La seule violence qui s’exprimera à bord de l’Acali sera celle de Santiago Genovés lui-même, embarqué avec ses cobayes, qui essaie par tous les moyens, même les plus retors, de les monter les uns contre les autres, afin que « quelque chose se passe » durant cette croisière trop tranquille. Il n’y parviendra pas. Pire : après avoir destitué la capitaine suédoise, il réussira simplement à se mettre le reste de l’équipage à dos et sera contraint à l’isolement.

La seule chose que l’expérience démontre est le poids, presque caricatural, des origines nationales. Chacun des passagers de l’Acali se comporte ainsi qu’on l’imagine de la part des ressortissants des pays dont ils sont originaires. La Suédoise a la rigueur toute scandinave de ceux qui ne rigolent pas avec les règlements. L’Afro-américaine se braque contre toute forme de discrimination. Le Japonais, timide et médiocrement anglophone, trouve que toutes les femmes ont de gros seins. Quant aux deux Françaises, elles sont les plus jolies filles du bateau !

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Le Silence des autres ★★★☆

En 1977, deux ans après la mort du Caudillo, la jeune démocratie espagnole vote une loi d’amnistie générale qui exonère de leurs responsabilités les auteurs de crimes commis sous le franquisme. Entre l’oubli et la justice, l’Espagne post-franquiste choisit l’oubli. Entre la repentance et la réconciliation, elle préfère la réconciliation.
Mais la mémoire a la vie dure. En 2010 plusieurs victimes du franquisme et leurs ayants-droits décident de se regrouper Maria Martin a vu disparaître en 1936 sa mère, froidement exécutée durant la Guerre civile, et se bat pour retrouver ses restes. José Maria Galante est un étudiant torturé sous le franquisme dans les geôles de la DGS qui vit aujourd’hui à une encablure de son tortionnaire, lequel n’a jamais été poursuivi. Cécilia est une fille mère dont l’enfant lui a été volé à la maternité pour être confié à une famille respectable tandis qu’on lui prétendait qu’il était décédé.
Faute de pouvoir saisir la justice espagnole, ces victimes décident de se porter partie civile en Argentine au nom de la loi de justice universelle. Un juge d’instruction est désigné. Le Silence des autres raconte son enquête.

Récemment distingué par le Goya du meilleur documentaire, Le Silence des autres est une œuvre aussi déchirante qu’intelligente. Elle lève le voile sur les crimes du franquisme et sur le combat courageux d’une poignée de victimes qui entendent les dénoncer.
Non sans manichéisme, il nous présente le « pacte d’oubli » scellé en 1977 comme une décisions haïssable. C’est oublier le dilemme qui se pose aux sociétés post-totalitaires qui tentent, au lendemain d’une page traumatisante de leur histoire, de restaurer le vivre-ensemble. Instruire de longs procès qui risquent de rouvrir des plaies qu’on veut cicatriser ? ou aller de l’avant en tournant le dos au passé ? C’est aussi oublier les termes dans lesquels se pose la fin d’une dictature : sans la promesse d’une amnistie, les autorités ne seront guère incitées à quitter le pouvoir.

Mais, comme le montre l’Histoire, sous toutes les latitudes, quelles que soient les circonstances, plus ou moins pacifiques, dans lesquelles s’est opérée la transition, le désir de justice finit tôt ou tard par s’exprimer.
C’est ce qui se passe en Espagne, souvent présentée comme l’exemple d’une société réconciliée sur une amnésie.

Le Silence des autres est profondément émouvant qui suit des gens de peu, souvent au crépuscule de leur vie, hantés par un « passé qui ne passe pas ». La plus touchante est peut-être Asunción, une octogénaire fluette mais toujours élégante, qu’on découvre à l’aéroport de Madrid, au moment d’embarquer pour l’Argentine où elle ira témoigner, un peu dépassée par l’intérêt médiatique que son action suscite. Les plus traumatisantes sont ces mères qui combattent pour retrouver leurs bébés disparus – pendant et même après la dictature franquiste – dont on regrette qu’on n’en sache pas plus sur le succès ou l’insuccès de leur combat.

Le Silence des autres est aussi profondément instructif sur les stratégies juridiques déployées au service de ce « travail de mémoire ». L’une est l’abrogation de la loi d’amnistie de 1977, hélas bloquée par les forces conservatrices espagnoles – le parti populaire de Aznar et de Rajoy n’a pas le beau rôle. L’autre est le détour par un pays ayant adopté une loi de compétence universelle permettant de poursuivre, en tous temps et en tous lieux, les auteurs de crimes imprescriptibles. On imagine aisément les difficultés diplomatiques que soulève la mise en œuvre de cette compétence universelle. On se souvient de l’imbroglio juridico-diplomatique causé par l’arrestation d’Augusto Pinochet en 1998 au Royaume-Uni. On connaît les difficultés soulevées par la mise en œuvre de la loi belge de 1993 qui, si elle a permis la mise en cause de Sharon, de Bush senior et de Cheney, fut promptement abrogée. On constate, à suivre les efforts inlassables de la juge argentine et des victimes espagnoles, que les voies de la justice sont laborieuses et que les accusés vieillissants, tel Pinochet au Chili, mourront avant d’être jugés.

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Alita: Battle Angel ★☆☆☆

Dans un vingt-sixième siècle  post-apocalyptique, l’humanité se divise en deux zones aux frontières infranchissables. À quelques milliers de mètres au-dessus de la terre, Zalem, cité inaccessible, est dit-on peuplée d’humains vivant dans un luxe inouï. En dessous d’elle, Iron City est une décharge, construite autour des rebuts déversés par Zalem, qui rassemble la lie de l’humanité, des cyborgs, des assassins et des chasseurs de prime.
Alita (Rosa Salazar) est un droïde reconfiguré par le docteur Ido (Christophe Waltz), un génie en cybernétique, qui lui a donné l’apparence de sa défunte fille. Le physique fluet de la jeune femme ne doit pas faire illusion : Alita est un droïde de dernière génération, doté de l’instinct d’une guerrière. Les maîtres d’Iron City, Chiren (Jennifer Connelly) et Vector (Mahershala Ali), veulent s’en emparer.

Longtemps, les superhéros ont été exclusivement masculins : Superman, Batman, Harry Potter… Et progressivement, les filles ont occupé le haut de l’affiche : Katnis Everdeen, l’héroïne des Hunger Games, Wonderwoman, Tris, l’héroïne de Divergente… La brindille Alita s’inscrit dans cette généalogie, héroïne avec qui les jeunes adolescentes mal dans leur peau du monde entier pourront aisément s’identifier : « J’ai quinze ans, des yeux globuleux et une poitrine de planche à pain ; mais j’ai l’âme d’une guerrière »

James Cameron est de retour. Après Avatar, voici Alita (décidément il aime bien les a) adapté du célèbre manga Gumm de Yukito Kishiro. La recette est la même : de la science-fiction, des effets spéciaux et beaucoup de dollars. Deux cents millions. Le PIB des Îles Marshall. S’il a délégué à Robert Rodriguez (Desperado, Une nuit en enfer, Spy Kids) la réalisation, la patte du maître canadien est bien visible.

Le public en aura pour son argent avec un délire d’effets visuels, qu’il s’agisse du corps bionique d’Alita, des vues de Iron City ou des cruelles parties de Motorball qui s’y jouent. Il ne sera guère surpris par un scénario qui louche du côté d’Elysium, de Rollerball et de Blade Runner. Alita voit, comme de bien entendu, s’affronter des gentils et des méchants et se termine par l’annonce d’un deuxième volet – à condition que les résultats au box-office du premier le permettent.

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