Le Molière imaginaire ☆☆☆☆

17 février 1673, Molière, exsangue, remonte sur la scène du théâtre du Palais-Royal pour jouer le dernier acte son Malade imaginaire. Dans deux heures il sera mort.

Le film d’Olivier Py commence fort. Il nous promet de nous raconter quasiment en temps réel les derniers moments de Molière et peut-être de résumer toute une vie en l’espace d’une représentation. Il se lance à lui-même un autre défi : celui de rester enfermé entre les quatre murs du théâtre où se donne la pièce – un espace dont il ne s’échappera que pour un épilogue funèbre.

Pour filmer le théâtre, l’immense dramaturge qu’est Olivier Py utilise pour son premier long métrage de cinéma tous les artifices à sa disposition. Son film a l’apparence dun seul plan séquence – alors qu’il est en fait composé d’une trentaine de plans entre lesquels les coutures sont quasiment invisibles. Sacré gageure en terme de caméra, sans cesse en mouvement, de la scène à la salle en passant par les coulisses, en terme d’éclairage, le film ayant été entièrement tourné à la bougie – ce qui, nous a raconté le réalisateur pendant le débat qui a suivi le film, n’est pas si compliqué grâce à l’hypersensibilité des lentilles aujourd’hui – en terme de tension scénaristique aussi.

Le film repose enfin sur un troisième atout de taille : Laurent Lafitte qui, mieux que personne, incarne un mourant, brûlé par sa passion pour la scène, brisé par la désaffection du roi dans lequel il plaçait tous ses espoirs, refusant jusqu’à son dernier souffle de renier son art.

Mais, pour le reste, j’ai tout détesté de ce Molière crépusculaire voire obituaire. Olivier Py se prend les pieds dans la caméra et imagine que ses mouvements épileptiques suffiront à donner du rythme à son récit. On passe alternativement de la scène aux coulisses. Sur scène, Molière, de plus en plus malade, crache ses poumons en récitant son texte. Dans les coulisses, il croise ceux qui l’entouraient et, dans un songe, retrouve même ses chers disparus, son père, tapissier du Roy, sa défunte épouse, Madeleine Béjart….

Faisant fond sur la bisexualité de Jean-Baptiste Poquelin mentionnée par Grimarest dans sa Vie de monsieur de Molière, Olivier Py ne résiste pas au plaisir de filmer complaisamment ses ébats avec un bel Adonis, le jeune acteur Michel Baron, dans une salle d’eaux aux airs de bain turc dans une scène qu’on croirait tout droit sortie d’un porno de M6. Mais le comble est atteint dans de longs dialogues prétentieusement métaphysiques, dont j’aurais aimé pouvoir noter le texte lourdement sentencieux sur Dieu, la vie, la mort, etc. pour mieux les railler.

Cet étalage de pompe a l’élégance de ne durer qu’une heure trente. Il n’en est pas moins interminable. À aucun moment l’émotion ne jaillit, l’empathie ne naît. Beurk…

La bande-annonce

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