Lumière ! L’Aventure commence ★☆☆☆

Les frères Lumière, on le sait, ont inventé le cinéma. Entre 1895 et 1905, ils ont tourné mille quatre cent vingt-deux films de cinquante secondes chacun. Thierry Frémaux, le directeur de l’Institut Lumière de Lyon, en a choisi cent-huit qu’il présente en onze chapitres et commente un après l’autre.

Écrire une critique mitigée de ce documentaire, c’est à la fois remettre en cause le génie des inventeurs du cinéma et s’attaquer à l’un de leurs avocats les plus respectés.

Le génie des premiers n’est guère contestable. A partir de rien, ils ont inventé un art. On aurait aimé connaître comment ils en ont fait une industrie ; mais tel n’est pas l’objet de ce documentaire qui s’attache uniquement à leur démarche artistique. À regarder les films des frères Lumière, on a l’impression qu’ils ont inventé tous les genres : le documentaire (« L’Arrivée du train en gare de La Ciotat »), la comédie (« L’Arroseur arrosé » initialement intitulé « Le Jardinier et le petit espiègle ») et même l’autobiographie (« Le Repas de bébé »). Tout en restant enfermé dans un format ultra court, le cinéma des frères Lumière s’enrichit très vite d’une grammaire : le travelling, le gros plan, la profondeur de champ que permet la diagonale (dans « L’Arrivée du train… » ou « Bataille de boules de neige »).

C’est peut-être l’académisme plat avec lequel Thierry Frémaux présente leurs œuvres qui suscite quelques réserves. Bertrand Tavernier s’est tout récemment livré au même exercice avec plus de succès. Thierry Frémaux se laisse emprisonner dans une exercice qui devient vite répétitif : nous montrer, l’un après l’autre, cent-huit courts métrages. Sans dout organise-t-il sa présentation autour d’une dizaine de thèmes, insistant par exemples sur les témoignages que les frères Lumières nous livrent de la France et du monde de la toute fin du dix-neuvième siècle. Mais cette structuration n’épargne pas au documentaire un rythme qui devient vite lassant.

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Les Confessions ☆☆☆☆

Les ministres de l’Économie du G8 se réunissent en Allemagne pour y adopter un plan secret. Trois personnalités extérieures ont été également conviées : une auteure à succès, un une rock star… et un prêtre.

« Les Confessions » est un film cosmopolite qui, par le fait même de son sujet, réunit un casting hétéroclite d’acteurs de toutes les origines qui singent les traits de caractère censés être associés à leur pays : quelques Italiens (Tonio Servillio dans le rôle d’un prêtre bien bavard pour être tenu par le voeu de silence, Pierfrancesco Favino dans celui du ministre italien de l’Économie ), quelques Français (Daniel Auteuil dans le rôle du directeur du FMI, Stéphane Freiss dans celui du ministre français), quelques Allemands (Moritz Bleibtreu dans le rôle du chef de la sécurité, Richard Sammel dans celui du ministre allemand), une Canadienne (Marie-Josée Croze trop émotive pour interpréter une ministre crédible)…

Le ton pourrait être burlesque comme la comédie italienne et le cinéma de Roberto Andò nous y ont habitués. Le réalisateur avait signé début 2014 « Viva la Libertà », une comédie racontant le remplacement d’un homme politique, frappé de burn out, par son frère jumeau.

Il ne l’est pas. « Les Confessions » est une tragédie qui pèse des tonnes. Un film policier qui n’en est pas un. Car il y a bien un mort et une énigme. Mais Roberto Andò s’en désintéresse bien vite.

Son seul souci est de dénoncer l’égoïsme et la duplicité des puissants qui, coupés du reste du monde, prennent des décisions sans légitimité démocratique. Il oublie en chemin l’histoire qu’il raconte, laissant les questions que pose l’intrigue sans réponse.

Pour le dire brutalement : je n’y ai pas compris grand-chose…. mais ne suis pas certain qu’il y avait grand-chose à comprendre.

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Compte tes blessures ★★☆☆

Vincent, 24 ans, a perdu sa mère. La cohabitation avec Hervé, son père, cloîtré dans le chagrin, n’est pas facile. Vincent exprime sa rage en chantant dans un groupe de post-hardcore et en se tatouant. Jusqu’à l’arrivée de Julia dans la vie de son père.

Jeune diplômé de la FEMIS, Morgan Simon veut traiter beaucoup de sujets dans son premier film : le deuil d’une mère, les familles monoparentales, l’incommunicabilité père-fils, la révolte par les mots (le post-hardcore) et par les gestes (les tatouages)… C’est beaucoup. Et c’est parfois trop.

Mais Morgan Simon a la bonne idée d’élargir le face-à-face à une tierce personne : c’est l’arrivée de Julia qui cristallise la relation père-fils, la fait évoluer, la fait finalement éclater. La présence de Julia électrise l’ambiance. Elle redonne vie à Hervé qui sourit pour la première fois. Elle trouble Vincent dont l’attirance pour elle se nourrit d’un complexe d’Œdipe mal résolu. Les scènes entre Vincent et Julia, lourdes d’un érotisme coupable, sont les plus réussies du film.

La réussite de « Compte tes blessures » tient beaucoup au choix des acteurs. César du meilleur espoir 2015 pour son rôle au côté d’Adèle Haenel dans « Les combattants », Kevin Azaïs occupe seul desormais le premier rang. Autant je l’avais trouvé mal employé dans « Souvenir » aux côtés de Isabelle Huppert, autant il est convaincant ici. Monia Chokri jouait à la perfection un petit rôle de « Réparer les vivants » (un de mes films préférés en 2016) ; elle incarne ici Julia, attendri par le charme bourru de Hervé mais attiré par la grâce rebelle de Vincent.

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The Birth of a Nation ★★☆☆

Esclave lettré, prédicateur à ses heures, Nat Turner se rebelle contre ses maîtres et prend la tête de la première révolte d’esclaves en Virginie en 1831.

Le slavery movie est devenu un genre à part entière aux Etats-Unis. Les plus grands réalisateurs s’y sont essayés : Spielberg (« La Couleur pourpre », « Amistad »), Demme (« Beloved »), Tarantino (« Django Unchained »). Un genre immensément populaire aux Etats-Unis où chacun de ces films ont constitué des succès de box-office mais qui rencontre peu d’écho de ce côté-ci de l’Atlantique : « The Birth of A Nation » a quasiment disparu des écrans en trois semaines d’exploitation.

L’histoire vraie de Nat Turner avait déjà inspiré un roman à William Styron qui lui valut le prix Pulitzer en 1968. Le livre avait suscité la critique de la communauté noire, du fait notamment de l’image complaisante qu’il donnait des esclavagistes blancs et de celle plus ambiguë de Nat Turner et de ses camarades.

Pareille critique ne saurait être adressée au film de Nate Parker – qui a écrit le scénario et tient le rôle principal. Au contraire, il frise le manichéisme, décrivant des Noirs endurant stoïquement le joug barbare que font peser sur eux des Blancs libidineux, confits en religion et abrutis d’alcool.

« The Birth of a Nation » ne quitte pas son acteur principal. Enfant précoce, il apprend à lire avec la mère de son maître. Ses dons oratoires le destinent à la prédication – il était néanmoins hors de question à l’époque qu’un noir accède à la prêtrise. Mais sa rage grandit face aux violences exercées sur ses frères de couleur et dont il est le témoin. le procédé est efficace : le spectateur lui aussi sent son indignation croire devant l’accumulation des tortures complaisamment filmées. Aussi la rébellion, quand elle éclate, inspire-t-elle une joie libératrice, malgré ses excès sanguinaires et en dépit de son échec inéluctable.

« The Birth of a Nation » est un titre subtilement choisi – que les producteurs français ont eu l’intelligence de ne pas traduire – qui fait référence au célèbre film de D.W. Griffith dont il renverse la perspective (Griffith évoquait les conséquences de la Guerre de sécession du point de vue sudiste et faisait l’apologie du Ku Klux Klan). De quelle nation marque-t-il la naissance ? D’une nation où les Noirs se débarrasseront de leurs chaînes ? Ou au contraire d’une nation où des Blancs racistes exercent encore sur des Noirs opprimés une domination intolérable ?

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Fleur de tonnerre ★☆☆☆

Au début du XIXème siècle, en Bretagne, Hélène Jégado a empoisonné à l’arsenic pendant des années des dizaines de personnes dans les maisons où elle cuisinait. Arrêtée, jugée, elle est guillotinée en décembre 1851 à Rennes. Mais l’affaire ne frappe guère l’opinion publique toute entière focalisée sur le coup d’État de Napoléon III, comme l’avait frappée deux cent ans plus tôt les crimes de la Brinvilliers et cent ans plus tard ceux de Marie Besnard, l’empoisonneuse de Loudun.
Elle a inspiré à Jean Teulé en 2013 un livre que Stéphanie Pillonca porte aujourd’hui à l’écran.

Le parcours de « l’empoisonneuse bretonne » présentait tous les ingrédients d’un biopic réussi. Il offre à Déborah François, découverte par les frères Dardenne en 2004, César du meilleur espoir féminin en 2008, un grand premier rôle. L’actrice belge y incarne à la perfection la folie et la détresse de son personnage, intoxiquée par l’absence d’amour de ses parents et par les légendes bretonnes fantastiques.

C’est le scénario, trop lisse, trop appliqué, qui pêche. Il égrène paresseusement les crimes de la cuisinière. Depuis le premier qu’elle commet par inadvertance sur sa marraine. Jusqu’au dernier qu’elle tente de perpétrer sur un professeur de droit pénal plus retors qu’elle. Cette succession devient vite monotone. Et la construction en flash back ne donne pas au récit le rythme qui lui fait cruellement défaut.

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Belle dormant ★★☆☆

Il était une fois … une belle princesse frappée par le sort d’une méchante sorcière que seul le baiser d’un beau prince pourrait réveiller d’un sommeil de cent années.

Ado Arietta marche sur les brisées de Cocteau et de Demy, sinon de Disney, en s’inspirant du conte de Perrault. Comme dans « Peau d’âne » – ou comme plus récemment Valérie Donzelli dans « Marguerite & Julien » – il le fait en introduisant malicieusement des éléments de modernité dans le conte intemporel.

La belle princesse (Tatian Verstraeten), que la vigilance de ses parents n’a pas su protéger, s’est endormie le jour de ses quinze ans, en 1900, dans un château proustien à souhait. En 2000, le jeune prince héritier du royaume voisin de Letonia (Niels Schneider) est bien décidé à tout faire pour la réveiller avec la complicité de son précepteur (Mathie Amalric) et d’une fée immortelle (Agathe Bonitzer).

Le film d’Ado Arietta est d’une poésie déconcertante. C’est une plaisanterie raffinée. Sa légèreté fait son charme mais le condamne dans le même temps à la frivolité. C’est un film délicieux car oubliable, oubliable car délicieux.

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L’Ascension ★★★☆

En 2008, Nadir Dendoune, un enfant du 9-3, a escaladé l’Everest sans aucune expérience de la haute montagne. Cette histoire vraie a inspiré un livre, joliment tiré « Un tocard sur le toit du monde », puis un film qui sort aujourd’hui dans les salles.

« L’Ascension » – un titre bien plus plat que celui du livre – prend deux libertés avec les faits réels dont il est inspiré. La première est d’inventer une histoire d’amour. C’est pour conquérir le cœur de Nadia que Samy se lance à la conquête du géant himalayen. L’alibi est charmant. Il l’est d’autant plus qu’il est joué avec grâce par Alice Belaïdi, une jeune actrice déjà entr’aperçue dans « La Taularde » et « Radiostars ».

La seconde différence est plus polémique. Le jeune alpiniste en herbe n’est pas interprété par un Franco-Algérien mais par Ahmed Sylla. Sans doute la jeune coqueluche de la stand up comedy fait-elle honnêtement le job. Mais pourquoi avoir confié le rôle à un Renoi et pas à un Beur ? N’y en a-t-il aucun qui en aurait été capable ?

Revenons au film et à ce qui en constitue le principal, sinon le seul, intérêt. La haute montagne. J’ai déjà dit ici mon goût pour les cimes enneigées. J’ai déjà évoqué prétentieusement mes ascensions du Kilimanjaro et du Mont Blanc. J’ai beaucoup aimé la description, plutôt réaliste, du périple de Samy : la longue marche d’approche, l’oxygène raréfié du camp de base, le martyre de la dernière ascension, la joie immense, comme on en connaît peu dans sa vie, de la victoire finale. Pour m’avoir fait (re)vivre ces émotions inoubliables, je fais preuve d’une indulgence coupable pour ce gentil divertissement du dimanche soir.

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La Communauté ★★★☆

Thomas Vinterberg a connu, alors qu’il n’avait pas trente ans, une célébrité aussi méritée qu’encombrante pour son premier film, « Festen ». On se souvient de ce huis clos étouffant, de ce règlement de comptes autour d’un dîner de famille. Depuis, le réalisateur danois a tourné une demie-douzaine de films qui souffrent de la comparaison avec ce chef d’œuvre de jeunesse.

Tel est le cas de son dernier film en date. On y retrouve, bien vieillis, quelques uns des protagonistes de « Festen ». Anna (Tryne Dyrholm) et Erik (Ulrich Thomsen) forment un couple cinquantenaire qui, héritier d’une immense demeure en plein centre de Copenhague, décide, pour partager les frais de fonctionnement de la maison et pour combattre l’ennui qui menace leur couple, d’y accueillir quelques colocataires. On est dans les années 70 ; mais la toile de fond historique importe peu et l’action aurait aussi bien pu se dérouler aujourd’hui.

« La Communauté » raconte comment se constitue une communauté, comment ses membres se choisissent, comment la vie entre eux s’organise. On aurait pu craindre une approche trop manichéenne : après l’euphorie des commencements, la douloureuse découverte des servitudes du quotidien. « La Communauté » n’est pas si simpliste et, sans rien nier des impasses dans lesquelles l’ultra-démocratie conduit, ne jette pas le bébé avec l’eau du bain.

Mais le film raconte surtout l’histoire d’un couple qui se dissout. Le héros, qui voit sa femme s’éloigner, tombe amoureux d’une jeune et jolie étudiante. Pour éviter de le perdre, sa femme accepte qu’il l’installe dans la communauté. Cette union à trois rencontre vite d’évidentes limites.

L’une des plus grandes réussites du film est le personnage de leur fille adolescente qui observe, sans mot dire, l’évolution de ses parents. Tandis qu’elle aussi connaît ses premières amours adolescentes, elle est tour à tour amusée par le joyeux désordre introduit par l’arrivée des colocataires, choquée par les infidélités de son père et effondrée par la réaction de sa mère.

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Live by Night ★☆☆☆

Fils d’un officier de police, Joe Coughlin revient traumatisé des champs de batailles de la Première guerre mondiale. Petit malfrat irlandais à Boston, il verse dans la grande criminalité par soif de vengeance, après la disparition de la femme qu’il aime.

Ben Affleck persiste et… ne signe pas. Après « Gone Baby Gone », « The Town » et « Argo » (Oscar inattendu du meilleur film 2013), il signe probablement son film le moins convainquant.

Pourtant l’affiche avait de quoi mettre l’eau à la bouche. Une adaptation de Dennis Lehane, le romancier peut-être le plus populaire à Hollywood (« Mystic River », « Gone Baby Gone », « Shutter Island »). Un film à costumes au temps glorieux de la Prohibition, sur les traces revendiquées de « Il était une fois en Amérique », Les Incorruptibles », « Boardwalk Empire ». Et une pléiade de jeunes stars prometteuses autour de Ben Affleck : Elle Fanning, Zoe Saldana, Siena Miller.

Difficile de reprocher grand chose à l’acteur-réalisateur qui fait honnêtement son travail. La reconstitution des années 20 est fastueuse. Le scénario est bien rythmé. Les acteurs sont impeccables. Mais malgré toutes ses qualités, « Live by Night » ne fonctionne pas. Il ne suscite aucune émotion, aucune empathie pour ses personnages, aucun intérêt pour ses situations.

La responsabilité en revient paradoxalement à la matière, trop riche, du roman de cinq cent pages de Dennis Lehane. Il aurait fallu une mini-série de plusieurs heures pour en tirer toute la substance. Ben Affleck – qui signe également le scénario – a voulu le faire tenir en deux heures et huit minutes. Pari impossible qui condamne « Live by night » à survoler trop rapidement quinze années de la vie d’un gangster irlandais, des faubourgs de Boston aux quais de Tampa, à traiter chaque épisode comme autant de vignettes (la poursuite en voitures, le trafic d’alcool, la rivalité entre gangs) et à négliger, faute de temps, des personnages secondaires riches de potentialités.

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La La Land ★★★★

Couronné de sept Golden Globes et bientôt probablement d’au moins autant d’Oscars, « La La Land » arrive mercredi sur nos écrans précédé d’une critique élogieuse. Première a annoncé la couleur : « Le meilleur film de l’année »  – ce qui le 20 janvier frise le canular … mais Première a raison et risque d’avoir raison jusqu’au 31 décembre, et le jury des Golden Globes aussi. « La La Land » est un chef d’œuvre.

Il est impossible de voir la bande-annonce de « La La Land » sans succomber immédiatement au charme de la musique, des costumes, d’Emma Stone et de Ryan Gosling et de courir acheter un ticket.

Je ne suis pas totalement objectif. J’adoooooore les comédies musicales et place au firmament de mes films préférés « Les Parapluies de Cherbourg » – que je revois chaque année avec un lot de Kleenex à portée de mains – classé ex aequo dans mon panthéon avec « West Side Story ».

« La La Land » est un film inoubliable. Un film qui fait rire (Ryan Gosling est hilarant dans deux scènes auto-parodiques) et pleurer. Un film qui nous transporte. Un film qui rend la vie plus belle. La démonstration en est faite, le temps d’un prologue aussi étonnant qu’enthousiasmant, filmé sur une bretelle d’autoroute embouteillée, le lieu a priori le moins poétique qui soit. Cette seule séquence suffit à donner un sourire, une énergie et un plaisir qui ne nous quitteront pas pendant deux bonnes heures qui passent comme un songe.

Alors qu’on croyait la comédie musicale définitivement passée de mode – comme les vieux films et le jazz – Damien Chazelle et ses producteurs ont eu le culot d’en réaliser une. Et avec quel brio ! La bande musicale, en tête des charts aux États-Unis, est déjà un classique. Le thème de Mia et Sebastian est d’un romantisme échevelé à faire pleurer un roc. « Another day of sun » donne la danse de Saint-Guy. Je vous défie de l’écouter sans avoir les pieds qui frétillent.

« La La Land » crée un univers, à la foi réaliste et onirique. Les costumes rétro-réalistes de Mary Zophres y sont pour beaucoup. Emma Stone porte au moins quarante robes – et presqu’autant de paires d’escarpins – toutes plus seyantes les unes que les autres. Quant à Ryan Gosling, j’essaie désespérément de jongler avec un chapeau – et de jouer au piano – comme lui.

Comme « Les Parapluies de Cherbourg » et comme « West Side Story », « La La Land » nous parle d’amour. Un coup de foudre entre Mia, l’actrice qui rêve de percer à Hollywood, et Sebastian, le pianiste qui rêve d’ouvrir sa boîte de jazz. Bien sûr, les esprits chagrins reprocheront au scénario son ingénuité, ses facilités. Mais c’est oublier qu’il peut se lire à plusieurs niveaux. « La La Land », ce n’est pas seulement une histoire d’amour. C’est aussi l’histoire de deux personnages à la poursuite de leurs rêves. C’est l’histoire des compromis inévitables ou haïssables qu’il faut accepter pour les réaliser.

Et les réserves qui pourraient émerger au fil du film seront inévitablement balayées par un final d’anthologie. Un final qui fait écho à « Midnight in Paris » et plus encore à « Un Américain à Paris ». Un final qui, sur le fond, est remarquable d’intelligence et de subtilité, évitant aussi bien les pièges du happy end mielleux que le pathos de la tragédie. Un final qui fait immédiatement de « La La Land » un film culte. Un film culte pour les fans de jazz, pour les amateurs de vieux films visionnés dans des salles à moitié vides, pour les amoureux de Emma Stone et de Ryan Gosling, pour les amoureux de Los Angeles et de Paris. Un film culte pour moi. Un film culte pour vous.

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