Mahin vit à Téhéran. Veuve depuis de longues années, séparée de ses enfants partis vivre à l’étranger, elle ne supporte plus la solitude de son grand appartement en rez-de-jardin. Un beau jour, elle fait la connaissance de Faramarz, un ancien militaire devenu chauffeur de taxi. Entre les deux septuagénaires esseulés, le courant passe immédiatement.
Quel beau film pour la Saint-Valentin ! Devant l’UGC Gobelins, deux files de spectateurs bien différentes étaient reconnaissables avant-hier. La première rassemblait des spectateurs de dix-huit à cinquante ans devant Bridget Jones 4. La seconde, presque aussi nombreuse, faisait plutôt recette dans le troisième âge pour une comédie romantique iranienne qui bénéficie depuis sa sortie le 5 février d’un bouche-à-oreille élogieux. Devinez dans laquelle j’ai pris place!
L’extraordinaire cinéma iranien nous fournit à un rythme régulier des films coup-de-poing qui dénoncent , avec une redoutable efficacité, la restriction des libertés et l’asservissement de la femme en Iran. Il suffit de citer pour 2024 : Les Graines du figuier sauvage, que j’ai placé presque au sommet de mon Top 10 2024, Tatami, le diptyque de Mehran Tamadon Mon pire ennemi/Là où Dieu n’est pas, ou encore Chroniques de Téhéran. Mon gâteau préféré s’inscrit dans un registre inhabituel, plus doux : la comédie romantique.
Il n’en a pas moins valu à ces deux co-réalisateurs le même sort : la suppression de leurs passeports et l’assignation à domicile. Car Maryam Moghaddam et Behtash Sanaeeha, qui avaient signé Le Pardon en 2021, y montrent ce que le régime des mollahs interdit de montrer : une femme en cheveux, qui boit du vin, qui danse et qui prend la défense des filles harcelées par la police des mœurs pour une mèche qui dépasse du tchador ou un chemisier trop moulant.
Mon gâteau préféré part d’une situation qui ne m’a semblé guère crédible. Je n’ai pas cru dans la rencontre de Mahin et de Faramarz qui se sont croisés au restaurant pour retraités où déjeune parfois Mahin pour rompre sa solitude. Si j’étais un septuagénaire iranien, chauffeur de taxi (ce que je ne suis pas !), je n’aurais pas suivi chez elle cette retraitée trop fardée et trop aguicheuse. Si l’on accepte cette prémisse, que penser de la suite du film ?
Je lui trouve deux défauts successifs dont la présentation m’entraîne à évoquer les développements du scénario. Les lecteurs allergiques au divulgâchage s’arrêteront ici.
On voit d’abord les deux tourtereaux roucouler. Le tableau est délicieux mais il est terriblement statique. Leur coup de foudre est trop immédiat pour être crédible, trop parfait pour ne pas condamner le scénario à la panne sèche. Que pourrait-il se passer maintenant que nos deux héros filent le parfait amour ?
C’est alors qu’intervient un coup de théâtre. Il évite au scénario la panne sèche qui le menaçait. Point positif. Mais il a le défaut d’entraîner le film dans une direction, macabre, qui n’était pas la sienne, qui rompt avec le registre qu’il avait choisi jusqu’alors, au risque d’en brouiller le message.