La Sociologue et l’Ourson ★★★☆

Parmi la multitude de documentaires qui arrivent sur les écrans, souvent avec des diffusions confidentielles et une durée d’exposition hélas trop limitée eu égard à leur grande qualité, La Sociologue et l’Ourson se distingue pour trois raisons.

La première est le thème traité. Le mariage homosexuel ou « le mariage pour tous » ou, pour reprendre les termes juridiques exacts, la loi du 17 mai 2013 « ouvrant le mariage aux couples de personnes du même sexe ». Nous avons tous notre opinion sur le sujet. Nous en avons tous débattu, en famille ou entre amis, lors de discussions qui furent parfois houleuses mais toujours passionnées. Nous avons tous suivi le débat parlementaire et sociétal en 2012-2013 et gardons en mémoire, pour le meilleur ou pour le pire, les prises de parole de Christiane Taubira et de Frigide Barjot.

La deuxième est la façon de le traiter. Sur un sujet aussi sérieux, on imagine volontiers quelle purge aurait pu nous être administrée. Un docu façon LCP avec des interviews sentencieuses, « face caméra », des pontes du sujet : hommes/femmes politiques, psychanalystes, sociologues… Rien de tel dans ce documentaire familial : Mathias Théry interviewe sa mère. Irène Théry est une sociologue célèbre pour ses travaux sur la famille et la filiation. Filmée par son fils, c’est une femme adorable qui évoque avec clarté les enjeux du débat et les illustre avec sa propre histoire familiale :  son arrière-grand-mère fille-mère, sa grand-mère bâtarde et pressée de se marier, son propre mariage célébré en catimini pour ne pas prêter le flanc aux moqueries de ses amis soixante-huitards…

La troisième, et non la moindre, est le dispositif mis en place. A côté de quelques vidéos en prise réelle, Étienne Chaillou et Mathias Théry ont choisi de bricoler des petits décors en carton, façon Michel Gondry ou Nick Park (Wallace & Gromit), et d’y représenter les différents protagonistes par des figurines. C’est ainsi que Irène Théry devient une charmante oursonne… et Frigide Barjot une éléphante trop maquillée.

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Sky ★☆☆☆

Romy visite l’Ouest américain avec son mari. Mais, loin des clichés touristiques, ce voyage est celui de la dernière chance pour ce couple miné par la stérilité. Une nuit, Richard, ivre, tente de violer sa femme ; Romy résiste, le frappe violemment et le laisse pour mort. Le film semble lancé dans une direction, celle de la cavale, avant de bifurquer vers une autre, celle de la renaissance. Ou pour le dire autrement : on passe de Thelma et Louise à Bagdad Café.

Diane Kruger incarne Romy (allusion à Romy Schneider ?). Elle était l’héroïne des deux précédents films de Fabienne Berthaud. Mais ces trois films, qui n’ont pas grand-chose en commun sinon leur réalisatrice et leur interprète principale, ne forment pas une trilogie.

« Sky » est un road-movie américain à la française. Guillaume Nicloux en a réalisé un l’an passé dans la même région des États-Unis avec Isabelle Huppert et Gérard Depardieu.

On peine à comprendre et à partager les motivations de l’héroïne. Romy décide de quitter Richard, de rester aux États-Unis, d’y refaire sa vie. On se doute que sa quête sera parsemée de belles  rencontres. Et on n’est pas déçu : une showgirl à Las Vegas, des Indiens, un Américain ténébreux. Romy est en mal de maternité. On imagine comment le film se finira. Là encore, on n’est pas déçu. Ou bien si, on l’est un peu.

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High-Rise ☆☆☆☆

En 1975, J.G. Ballard a écrit High-Rise, vite devenu un classique de science-fiction. Quarante ans plus tard, celui-ci est enfin porté à l’écran. Une immense tour d’habitation est un condensé d’humanité : les plus pauvres s’entassent dans les premiers étages, les classes moyennes dans les étages intermédiaires et les plus riches dans les penthouses des derniers étages. Mais les règles qui régissent son organisation cèdent à l’anarchie.

High-Rise vaut surtout par le parti pris de son directeur artistique qui a choisi, pour les costumes et les décors, de conserver l’esthétique des seventies. Mais, passé les vingt premières minutes, l’histoire prend un tour si extravagant, si incohérent qu’on en décroche sans espoir de retour. Le film devient un grand n’importe quoi (scènes d’orgie,  de meurtre) que les spectateurs qui n’ont pas déserté la salle regardent mi-amusés mi-navrés.

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Truth : le Prix de la Vérité ★★★☆

En 2004, CBS News révèle que George W. Bush a réussi à éviter d’être enrôlé au Vietnam. Mais l’authenticité des documents à l’origine de ces révélations est bientôt mise en doute obligeant le présentateur vedette Dan Rather (Robert Redford) et sa productrice Mary Mapes (Cate Blanchett) à mettre fin à leurs carrières.

Deux mois après Spotlight, Truth, adapté de l’autobiographie de Mary Mapes, est un film tout aussi réussi sur le journalisme.

Spotlight racontait l’enquête menée par les reporters du Boston Globe pour dénoncer le silence coupable de la hiérarchie catholique qui avait couvert les actes pédophiles commis par des prêtres. Sujet manichéen – mais excellemment traité.

Le sujet de Truth est autant sinon plus intéressant. Car Truth ne dresse pas le panégyrique d’une journaliste courageuse dont les révélations auraient été discréditées par la censure d’État. Truth, plus subtilement, explore les failles d’une investigation journalistique : l’équipe de Mary Mapes, pressée par les délais de bouclage, ne s’était pas entourée de toutes les assurances lui permettant de garantir l’authenticité des documents en sa possession.

Du coup c’est paradoxalement l’histoire d’une enquête qui tourne mal, d’un tuyau percé, qui est à la base d’un film à la gloire du journalisme. C’est pour avoir fait leur travail à 99 %, pour ne pas avoir satisfait les critères ô combien exigeants d’un métier qui ne laisse rien au hasard, que Mary Mapes sera licenciée et Dan Rather poussé à la retraite. Le destin des vaincus n’est pas moins édifiant que celui des vainqueurs.

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A Bigger Splash ★☆☆☆

Rock star aphone, Marianne (Tilda Swinton) se repose avec son jeune amant Paul (Matthias Schoenaerts) sur une île italienne. Leur retraite idyllique est troublée par l’arrivée intempestive de l’ex-amant de Marianne, Harry (Ralph Fiennes), et de sa fille Penelope (Dakota Johnson). Autour de la piscine, Harry tente de reconquérir Marianne tandis que Penelope trouble Paul.

Pourquoi diable être allé tourner un remake de La Piscine de Jacques Deray ? En 1969, Romy Schneider n’a jamais été plus sexy ni Alain Delon plus beau. Et vice versa. Ils formaient un couple mythique. Indépassable. Alors pourquoi diable ?

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