L’Atelier ★★★☆

Sous le soleil estival de La Ciotat, Olivia (Marina Foïs) anime un atelier d’écriture avec quelques jeunes de la ville. Ils entreprennent l’écriture d’un polar qui puise son inspiration dans son passé industriel. Parmi eux Antoine se singularise vite. Solitaire, mutique, il manifeste un tempérament violent qui inquiète Olivia autant qu’il la séduit.

Jetez un œil à la bande annonce de L’Atelier. Vous a-t-elle plu ? Alors allez voir le dernier film de Laurent Cantet qui lui est très fidèle. Vous a-t-elle déplu ? Alors n’insistez pas.

Une Palme d’Or peut tuer un réalisateur. Laurent Cantet l’a décrochée en 2008 avec Entre les murs. Je sais les débats que ce film a suscités. Je le considère néanmoins, sur la forme comme sur le fond, comme un chef d’œuvre. Changeant complètement de registre, le réalisateur est allé tourné quatre ans plus tard au Canada l’adaptation d’un roman de Joyce Carol Oates. Succès critique mais échec commercial. Après une escale à Cuba (Escale à Ithaque) en 2014, Cantet revient à des régions et des sujets plus familiers : comme François Bégaudeau dans Entre les murs, Marina Foïs – qu’on avait rarement vue aussi juste dans un rôle où on ne lui demande pas de faire rire – est en position de transmettre à des adolescents un savoir.

C’est d’ailleurs les scènes de groupe tournées avec ces sept jeunes qui constituent le point faible du film. Leur spontanéité est trop artificielle, leurs progrès trop rapides, leurs productions trop achevées, leurs caractères trop stéréotypés.

C’est quand le film se focalise sur le duo Olivia-Antoine qu’il est le plus convaincant. Antoine a la beauté du diable. C’est un adolescent sans histoire qui vit dans un appartement avec deux parents aimants et une petite sœur. Comme les ados de son âge, il a des amis et joue sur sa console vidéo. Mais Antoine a plus de profondeur qu’il n’en a l’air. Pour tromper son ennui, il nage dans les calanques, se muscle et regarde les appels au crime d’un nazillon provençal sur Internet. Au XIXème siècle, on aurait dit qu’il a le spleen ; au XXIème, on dira qu’il a la haine. Mais c’est peut-être plus un personnage du siècle dernier qu’Antoine évoque : Meursault qui tue gratuitement, sans motif, un Arabe anonyme sur la plage d’Alger parce que sa mère est morte l’avant-veille et qu’il a le soleil dans les yeux.

Laurent Cantet aurait pu forcer le trait et dévoiler, derrière l’apparente normalité de l’adolescent boudeur, un monstre de noirceur. Il ne tombe pas dans ce piège. J’en ai déjà trop dit sur un dénouement qui aurait gagné à être plus resserré – le film dure quinze minutes de trop – mais qui brille par sa subtilité.

La bande-annonce

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