Cléo, Melvil et moi ★★★☆

La cinquantaine bien entamée, Arnaud Viard a passé le confinement à Paris, avec Cléo et Melvil, ses deux enfants. Il partage leur garde avec leur mère (Romane Bohringer) dont il est depuis peu séparé. Dans le sixième arrondissement désert, il rencontre Marianne, une séduisante pharmacienne.

J’ai eu le coup de foudre pour ce film minuscule, que ne diffuse qu’une poignée de salles presqu’exclusivement parisiennes et dont les lecteurs de cette critique me feront le reproche, après l’avoir lue, de ne pas pouvoir le voir près de chez eux.
J’avais déjà adoré son premier film, Clara et moi, son deuxième, ironiquement intitulé Arnaud fait son deuxième film, et son troisième, adapté d’un recueil de nouvelles d’Anna Gavalda, Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part. Cet unanimisme est incontestablement le signe de ma subjectivité pour un réalisateur dont la vie ressemble à la mienne (provincial, issu de la classe moyenne, monté à Paris) et dont la sensibilité me touche.

En soixante-treize minutes à peine, Cléo Melvil et moi entrelace trois histoires. La première est une chronique heureuse du confinement. Cet événement que nous avons tous vécu et que nous n’oublierons jamais, peut-être l’événement collectif le plus traumatisant qu’il sera donné de vivre à notre génération, trop jeune pour avoir traversé la Seconde guerre mondiale et l’Occupation, risque fort d’inspirer le cinéma pendant des années. Je m’étonne d’ailleurs qu’à ce jour, aussi peu de films s’en soient nourris. Arnaud Viard en offre une vision paradoxalement apaisée, dépourvue de l’angoisse ou de l’impuissance qui lui sont souvent attachées. Il peint en noir et blanc un Paris désert et silencieux où le confinement offre à un vieux père l’occasion inespérée de passer du temps avec ses jeunes enfants. Les jeux qu’il partage avec ces deux petits monstres débordant d’énergie et sourds à toute discipline, les repas, les couchers – qui, à mes yeux de père mal aimant, auraient constitué la pire des épreuves – sont décrits avec beaucoup de tendresse et d’amour.

Le deuxième fil narratif est un retour en voix off sur l’enfance d’Arnaud, dans les 70ies, entre Lyon et Dijon. Il y évoque la figure surplombante de son père, un chirurgien passionné de football avec lequel on comprend qu’Arnaud a vécu une relation mêlant l’admiration et l’hostilité. Le père et son fils partageaient une passion commune pour le football et ont vibré ensemble devant l’incroyable remontada des Verts de Saint-Etienne devant le Dynamo de Kiev en 1976. La séquence video m’a mis les larmes aux yeux et m’a rappelé un autre souvenir inoubliable que je partage avec tous les enfants de ma génération : la demie-finale perdue face à l’Allemagne à Séville en juillet 1982.

Enfin, Cléo, Melvil et moi raconte une histoire d’amour : celle qui s’ébauche entre Arnaud Viard et Marianne Denicourt, qu’on avait découverte au cinéma au tournant des 90ies, notamment devant la caméra d’Arnaud Desplechin avec qui elle avait entretenu une liaison orageuse et qui, à cinquante ans passés, n’a rien perdu de son charme lumineux.

La bande-annonce

Un commentaire sur “Cléo, Melvil et moi ★★★☆

  1. Le film ne dit pas si cette troisième histoire, l’idylle avec la pharmacienne, est aussi autobiographique que les deux autres…

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