À la fin du XVIIème siècle, Osan, l’épouse délaissée d’un grand commerçant de Kyoto, demande à Mohei, le contremaître de son mari, un prêt pour venir en aide à son frère, un joueur invétéré. Mohei, qui est en secret amoureux d’elle, subtilise le sceau de son patron pour voler cet argent. Mais il est découvert et arrêté. Osan subit bientôt le même sort.
Les deux complices s’enfuient, se déclarent leur amour mais sont finalement rattrapés. Ils seront crucifiés.
Lorsque Mizoguchi tourne Les Amants crucifiés en 1954, il lui reste deux ans à vivre. Il n’a jamais été aussi prolifique ni aussi talentueux. L’année précédente, Les Contes de la nuit vague après la pluie, Lion d’argent à Venise, l’a fait connaître en Europe et avec lui le cinéma japonais d’après-guerre jusque là enfermé dans un ghetto exotique. La même année il sort L’Intendant Sansho et Une femme dont on parle.
Comme La Vie d’Oharu femme galante ou L’Intendant Sansho, Les Amants crucifiés a pour cadre le Japon féodal. Il s’agit pour Mizoguchi moins de faire oeuvre d’historien que de chercher dans le passé les traces de rapports de classes toujours présents dans le Japon contemporain. Trois pouvoirs dominent la société des Amants crucifiés : celui du créancier (l’argent), celui du fonctionnaire (l’État) et celui du mari (le patriarcat). Contre ces trois pouvoirs, les deux amants se rebellent. Mais ils n’ont rien pour eux sinon leur amour fou. Et leur fin sera fatale.