Mambar Pierrette ★☆☆☆

Mambar Pierrette élève seule ses deux garçons à Douala au Cameroun. Sa vieille mère malade lui est à charge. Elle exerce ses talents de couturière dans une petite échoppe où défilent ses clients. Mais le sort s’acharne sur elle.

Camerounaise bamiléké, installée depuis 2012 en Belgique, Rosine Mbakam a déjà plusieurs longs métrages à son actif, où elle a documenté la difficulté d’être immigrée et camerounaise en Europe : Les Deux Visages d’une femme bamiléké (2016), Chez Jolie Coiffure (2018), Les Prières de Delphine (2021). Pour filmer Mambar Pierrette, elle est retournée à Douala.

Mambar Pierrette se présente comme une oeuvre de fiction ; mais elle tire du côté du documentaire. Son héroïne est de tous les plans. Elle oppose son visage impassible aux coups du sort répétés qui s’abattent sur elle : sa vieille machine à coudre tombe en panne, des voyous la délestent de ses économies, des pluies diluviennes inondent sa maison et son atelier… Pour payer ses traites, elle n’a d’autre alternative que de solliciter la générosité de ses amis et de vider la tirelire de son cadet.

Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes l’an dernier, Mambar Pierrette est un film qui pâtit d’une mauvaise direction d’acteurs. Le jeu de son héroïne en particulier est dangereusement inexpressif. Son scénario repose sur l’alternance trop mécanique des visites des clientes qui rythment la vie de la couturière et des catastrophes qui s’abattent sur elle. Leur accumulation aurait pu, sans que l’histoire n’en soit modifiée, durer une demi-heure de plus ou de moins. Autre défaut : la frustration de ne rien voir de Douala ou du Cameroun, Rosine Mbakam préférant les scènes d’intérieur et les plans serrés.

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La Grâce ☆☆☆☆

Un homme taiseux et une jeune fille boudeuse sillonnent le Caucase russe à bord d’un vieux van rouge à bout de course. Lentement on comprend qu’ils sont père et fille et qu’ils s’arrêtent dans des villages reculés pour y projeter sur un écran blanc des films et y vendre sous le manteau des DVD interdits. Leur errance les mènera sur les bords de la mer de Barents.

Ilya Povolotsky est un jeune réalisateur russe exilé en France. Son premier film a été sélectionné à la Quinzaine des cinéastes à Cannes.
Cette entrée en matière pose question. Apprécierait-on différemment ce film si son réalisateur n’était pas réfugié politique ? Aurait-il été sélectionné à Cannes s’il avait été un thuriféraire de Vladimir Poutine ?

La Grâce est un film aride et exigeant. Son titre louche du côté de Bresson, de Tarkovsky, de Bergman ou de Bruno Dumont. Excusez du peu. De quoi parle-t-il ? D’une relation père-fille sans parole, de deuil, d’émancipation…

Je comprends qu’on puisse le tenir pour un chef d’oeuvre. Je comprends tout aussi bien qu’on puisse s’y ennuyer copieusement. C’est que La Grâce dure près de deux heures alors que son propos aurait pu, sans préjudice, tenir en moins d’une heure trente. Estimons nous heureux : il aurait pu durer trois heures !

Que s’y passe-t-il ? Quasiment rien. On y voit ce fameux minivan rouge sillonner la campagne.. Aux langues utilisées – le géorgien, le balkar, l’adyguéen – on comprend qu’on est au nord du Caucase. Quasiment aucun mot n’est échangé entre la fille et son père, qui entretient quelques liaisons avec des inconnues de passage au grand dam de sa fille, laquelle de son côté, se languit de connaître un premier amour émancipateur.

Sans transition – ou alors l’ai-je raté dans un moment d’assoupissement – on se retrouve dans une station météorologique désaffectée sur les bords d’un océan glacé. Il faut lire le dossier de presse pour apprendre qu’il s’agit de la mer de Barents, à quatre mille kilomètres au nord. C’est là que se déroule l’ultime scène finale, qu’on avait devinée par avance et qu’on attendait impatiemment depuis deux bonnes heures.

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Les Lueurs d’Aden ★☆☆☆

La vie n’est pas facile pour Isra’a et son mari Ahmed qui, faute de toucher le salaire que lui doit la télévision publique en est réduit à faire le taxi à Aden, dans le sud du Yemen. Les conséquences de la guerre civile se font encore sentir dans l’ancienne capitale, dévastée par les bombes : l’eau n’est pas rétablie, les coupures d’électricité sont fréquentes, des checkpoints se sont multipliés dans les rues. Le propriétaire de l’appartement que Isra’a et Ahmed occupent avec leurs trois enfants souhaite récupérer son bien et leur a donné leur préavis. Faute de service public de l’enseignement, le couple doit inscrire ses enfants dans une école privée sans en avoir les moyens. Cerise sur le gâteau : Isra’a est encore tombée enceinte.

Des films yéménites, on n’en voit pas souvent. Celui-ci est peut-être le premier jamais distribué en France [note pour moi : de quel pays du monde n’ai-je jamais vu de film ? le Suriname ? le Tadjikistan ? la Sierra Leone ?]. Son exotisme est puissant – dont les distributeurs français ont conscience qui ont très librement traduit Al Murhaqoon, « Les Accablés ». Grâce à lui, on découvre dans des plans larges quasi-documentaires, la mythique Aden, porte de l’Orient pendant la colonisation anglaise, repère de brigands au temps de Rimbaud. Le résultat est un peu décevant : c’est une ville arabe sans cachet défigurée par les combats qui y ont fait rage durant la guerre civile en 2014 dont les seuls atouts sont les fières montagnes qui la surplombent et la mer qui la baigne.

Les Lueurs d’Aden ne se borne pas à filmer une ville, aussi exotique soit-elle. Il campe des personnages et raconte une histoire : celle d’Isra’a et d’Ahmed, bien décidés à s’épargner un quatrième enfant. L’avortement étant illégal au Yemen, il leur faut corrompre un membre du corps médical. Commence pour eux une épuisante course d’obstacles pour rassembler les fonds et trouver les complicités nécessaires.

L’Evénement, adapté du roman autobiographique d’Annie Ernaux, racontait une histoire similaire, en France, au début des années 60. Plus près de nous dans le temps, plus loin de nous dans l’espace, l’héroïne de Levante, une jeune handballeuse brésilienne, cherchait elle aussi désespérément à avorter dans un pays qui ne le permet toujours pas. Les Lueurs d’Aden rappelle que ce droit, que la France s’apprête à inscrire dans sa constitution, n’est pas universel.

Un décor exotique, un sujet inspirant, une affiche sublime sont des atouts de poids. Mais ils ne sont pas suffisants. Les Lueurs d’Aden reste un film bien classique, à la direction d’acteurs trop lâche, au récit sans surprise et à la conclusion frustrante.

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Ma part de Gaulois ★☆☆☆

Mourad a douze ans à peine et, par la faute de ses mauvais résultats au collège, a été orienté vers un CAP mécanique à la fin de sa cinquième. Mais grâce aux stratagèmes de sa mère, qui espère pour lui un meilleur avenir, il réussit à revenir au collège. Il parviendra même à force de persévérance jusqu’au lycée et jusqu’au baccalauréat. Mais sa vraie passion est la musique.

Né en 1962 à Toulouse de parents d’origine algérienne, Magyd Cherfy, le fondateur du groupe Zebda, passé à la postérité avec son tube Tomber la chemise, a écrit en 2016 son autobiographie. Malik Chibane, un sexagénaire comme lui, qui a fait ses armes au cinéma et à la télévision, en signe l’adaptation.

Ma part de Gaulois raconte l’adolescence d’un fils d’immigré algérien dans une cité HLM d’une grande ville de province au tournant des années 80. Ce coming-of-age movie sans surprise se regarde sans déplaisir. Il nous donne honnêtement ce qu’il nous a promis. Ni plus ni moins. Le portrait tendre amer d’un adolescent qu’on voit grandir de la cinquième à la terminale, porté par l’amour indéfectible de ses parents. La difficile intégration d’un jeune beur à cheval entre deux pays, l’Algérie où il n’a jamais mis les pieds et dont il ne parle pas la langue et la France où il peine à se faire sa place. Et en arrière-plan la description d’une époque.

Ma part de Gaulois a toutefois une originalité qui le distingue du tout-venant. À rebours du parti pris naturaliste sur lequel reposent la plupart de ses homozygotes, ce film opte pour des décors volontairement artificiels. Cette théâtralité assumée détonne et étonne. Elle donne à Ma part de Gaulois un ton original, celui d’une pièce de théâtre – ce qu’il n’a jamais été – portée à l’écran.

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L’Etoile filante ★☆☆☆

Boris (Dominique Abel) est barman à L’Etoile filante. Il fuit depuis trente-cinq ans la police qui le poursuit pour son implication dans un attentat. Mais une victime le reconnaît et entend se rendre justice elle-même. Pour se protéger, Boris, aidé de Kayoko (Kaori Ito) sa compagne et de Tim, le portier de L’Etoile filante, kidnappe Dom, le sosie dépressif de Boris et lui fait endosser son rôle. Inquiète de sa brutale disparition, l’ex-femme de Dom, Fiona (Fiona Gordon), détective privée de son état, se lance à sa recherche.

Depuis près de vingt ans, Abel et Gordon forment un duo attachant. Héritiers revendiqués de Chaplin, de Keaton et de Kaurismäki, ils tournent des films burlesques et quasiment muets : L’Iceberg (2005), Rumba (2007), La Fée (2011), Paris pieds nus (2017)…

L’Etoile filante se prend les pieds dans une intrigue tarabiscotée, dénuée de crédibilité, dont on a tôt fait de se désintéresser et qui a en outre le défaut de durer vingt minutes de plus qu’il n’aurait été nécessaire. Reste le seul plaisir de retrouver le duo belgo-canadien, ses gags tristes, ses saynètes filmées comme des chorégraphies de danse contemporaine à la Pina Bausch.

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A Man ★★★☆

Rie (Sakura Andō, à l’affiche en ce moment de L’Innocence et de Godzilla Minus One) n’a pas de chance : après la mort de son premier enfant, celle de son père et son divorce, elle est réduite à élever seule son second fils Yūto avec sa mère et à tenir les rênes de la papeterie familiale à Miyazaki, une petite ville du sud du Japon. C’est là qu’elle rencontre un homme timide, passionné de dessin, qui gagne sa vie comme sylviculteur. Il se présente sous le nom de Daisuke Taniguchi.
Les années passent. Rie et Daisuke forment désormais un foyer harmonieux. Une petite fille leur est née. Mais Daisuke meurt accidentellement dans l’exercice de son métier. Un an après sa mort, Rie apprend du frère même de Daisuke Taniguchi que son mari avait usurpé cette identité. Deux questions se posent : qui était-il vraiment ? qu’est-il advenu du vrai Daisuke Taniguchi ? Un avocat de Yokohama, d’origine coréenne, va mener la double enquête pour le compte de Rie.

Nous vient du Japon le quatrième film de Kei Ishikawa, le premier à sortir en France. C’est l’adaptation d’un roman publié en 2018, non traduit en français, de Keiichiro Hirano, lauréat du prestigieux prix Yomiuri, le Goncourt japonais.

A Man – un titre ambivalent qui peut signifier à la fois « cet homme-là » et « n’importe quel homme » – est un thriller haletant. Un avocat persévérant, lui-même constamment renvoyé à ses origines, y mène une double enquête : sur le défunt mari de Rie et sur celui dont il a usurpé l’identité. L’histoire a son lot de rebondissements, pas toujours très crédibles, mais qui réussissent à tenir le spectateur en haleine. pendant plus de deux heures.

Mais A Man ne se réduit pas à un suspense policier. C’est une réflexion presque métaphysique sur l’identité : qui sommes-nous ? qui prétendons-nous être ? en quoi notre identité nous définit-elle ? peut-on en changer ? nos proches l’appréhendent-ils totalement ou certaines parts peuvent-elles leur rester inconnues ?
Ces questions peuvent sembler bien plombantes. La réponse qu’y donne A Man est si simple qu’elle en est décevante : personne ne se réduit à son état-civil. Mais, avant de parvenir à cette conclusion, A Man renvoie les deux héros mystérieux du film, le vrai et le faux Daisuke Tanaguchi, à une vertigineuse quête identitaire dans laquelle, comme dans le tableau surréaliste de Magritte, La Reproduction interdite – un homme de dos regardant un miroir, qui ne reflète pas son visage mais son dos – chaque identité se révèle le palimpseste d’une autre.
L’une des dernières scènes du film réunit l’avocat qui vient de clore son enquête et sa famille. Une harmonie sans nuage semble enfin rétablie quand une étonnante révélation laisse imaginer une faille qu’on ne soupçonnait pas.

[Pour la petite histoire, j’ai failli passer l’été 1990 en stage ouvrier dans une usine Oji Paper à Miyazaki, où se déroule le film, avant d’être finalement affecté dans une autre usine du groupe, à Yonago, près de Tottori, aux bords de la mer de Corée, mon ami Bertrand D. prenant le poste de Miyazaki]

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They Shot the Piano Player ★☆☆☆

Pianiste brésilien de bossa nova, Tenório Jr. joua dans les années 60 dans les clubs de Copacabana. Sa disparition mystérieuse à Buenos Aires en 1976 accrut son aura. Fernando Trueba a mené l’enquête à son sujet, interrogeant sa famille, ses proches, ses amis musiciens. Au lieu d’en faire un documentaire, il opta avec Javier Mariscal, avec lequel déjà il avait coréalisé sur le même modèle Chico & Rita en 2011, pour un film d’animation.

They Shot the Piano Player – un drôle de titre anglais pour une production franco-espagnole réalisée par deux Espagnols sur un pianiste brésilien mort en Argentine – a une immense qualité : il nous replonge dans le Brésil des années 60 où se crée une musique qui connut un succès mondial, la bossa nova, dont il nous fait entendre quelques-uns des titres les plus connus et rencontrer quelques-uns des musiciens vivants les plus célèbres: Gilberto Gil, Chico Buarque, Joao Donato, etc.

Mais, tout bien considéré, c’est sa seule qualité. Sa forme, une animation en 2D, qui utilise des bleus et des jaunes éclatants pour les années 2000 durant lesquelles un journaliste américain, à qui Jeff Goldblum prête sa voix, est censé rassembler la documentation pour un livre sur Tenório Jr., et des tonalités beaucoup plus sombres pour les flashbacks dans les années 70 de la dictature argentine, n’est guère originale. C’est la même qu’utilisaient Valse pour Bachir ou Josep. C’est surtout un pis-aller auquel les réalisateurs ont recours de plus en plus souvent faute de disposer du matériel pour tourner un documentaire en images réelles.

Quant à l’histoire proprement dite, elle est nimbée d’un voile de mystère bien vite dissipé. Comme des dizaines de milliers d’autres Argentins, Tenório Jr. a été raflé par la police militaire argentine, séquestré, torturé et éliminé parce que son apparence – il portait la barbe et les cheveux longs – et la carte du syndicat de musiciens qu’il avait dans la poche laissaient suspecter des sympathies communistes.

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L’Homme d’argile ★☆☆☆

Raphaël (Raphaël Thiéry) est le gardien d’un imposant manoir familial délaissé par ses propriétaires. Il habite avec sa vieille mère autoritaire un pavillon de chasse au fond du jardin et meuble ses journées d’une routine répétitive : la chasse aux taupes, la cornemuse qu’il pratique avec un groupe amateur et les escapades en Kangoo avec la postière saute-au-paf. Une nuit d’orage déboule Garance Chaptel (Emmanuelle Devos), la propriétaire du château. Plasticienne réputée, elle s’y claquemure et soigne son chagrin en s’abrutissant de travail. Elle a décidé de prendre Raphaël comme modèle et de sculpter son portrait.

L’Homme d’argile est un premier film dont l’économie repose largement sur un étrange atout : l’acteur Raphaël Thiéry, venu sur le tard au cinéma à cinquante ans passé, révélé en 2016 pour Rester vertical. Avant d’être acteur, Raphaël Thiéry était musicien. 1 mètre 78, 115 kilos, l’homme a une trogne incroyable, dont la monstruosité est accentuée par le bandeau qui cache son œil borgne. Le cyclope a des mains d’étrangleur. Il m’a rappelé Ron Perlman.

Comme dans le conte de Perrault, la Bête nourrit pour la Belle une passion dévorante. Passion d’autant plus déchirante que la Bête se sait laide et qu’elle présume que son amour ne sera jamais payé de retour. S’ajoute ici une différence de classe infranchissable entre l’homme à tout faire qui n’a jamais quitté sa province et la riche artiste cosmopolite, dont les oeuvres avant-gardistes s’arrachent dans les expositions.

Pourtant une relation se noue entre ces deux êtres si dissemblables. Est-elle amoureuse ? Elle est en tout cas artistique. Garance prend Raphaël pour modèle. Et – la figure prémonitoire du Golem praguois nous en avait averti dès la première séquence – elle va créer avec l’argile collectée par Raphaël une créature à part entière, mi-terre mi-chair.

L’Homme d’argile souffre d’un paradoxe. Il est dans sa forme très modeste, tourné à l’économie sur un lieu quasi-unique, alors que son propos, qui convoque des catégories aussi intimidantes que l’Art et l’Amour, est trop écrasant.

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Sous le vent des Marquises ★☆☆☆

Alain (François Damiens) est une star de cinéma qui a consacré sa vie à son métier. Dans son dernier film, il interprète le rôle de Jacque Brel au crépuscule de sa vie, lorsque le chanteur décide d’abandonner la scène pour faire le tour du monde en bateau. Alain apprend qu’il est, comme Jacques Brel, atteint d’un cancer et qu’il doit être opéré sans délai. Cette découverte le conduit à quitter rapidement le tournage. Alain part en France retrouver sa fille (Salomé Dewaels), qui vit avec sa mère sur une île du golfe du Morbihan, qu’il se reproche d’avoir délaissée pour son travail.

Sous le vent des Marquises nous trompe sur la marchandise. Son titre et son affiche nous laissent escompter un film qui nous ferait voyager à l’autre bout du monde. Hélas, en guise d’exotisme, il ne nous offre guère que le golfe du Morbihan. Son sujet faussement original n’utilise les dernières années de la vie de Brel que comme un point de départ. Beaucoup plus banalement, il s’agit de raconter une relation père-fille compliquée comme on en a déjà vu treize à la douzaine.

Le film a un atout, François Damiens. Cet acteur sait aussi bien faire rire – il a commencé dans la comédie – que pleurer. Mais le film a un handicap rédhibitoire, Salomé Dewaels, jeune espoir frelaté. L’équilibre du film reposait sur l’alchimie entre ses deux acteurs principaux – qui se partagent très démocratiquement l’affiche. Or, l’actrice belge, révélée par Illusions perdues n’arrive pas à la cheville de son père de cinéma. Et ce n’est pas qu’une question de centimètres. Tout sonne faux dans son rôle d’adolescente (de vingt-deux ans !) en mal de père.

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Le bonheur est pour demain ★★☆☆

Sophie (Laetitia Casta) est en couple avec José, un toxico. Elle a eu un enfant avec lui. Mais quand elle croise Claude (Damien Bonnard), c’est le coup de foudre. Claude est un malfrat qui tombe bientôt pour homicide, après un braquage qui a mal tourné. En prison il attend son jugement et redoute une lourde peine. Mais ces obstacles pourtant dissuasifs n’empêchent pas Sophie de tout abandonner pour Claude.

Brigitte Sy a eu une vie étonnante. Actrice d’abord avant de passer derrière la caméra, elle a animé des cours de théâtre en prison, y a rencontré un détenu, en est tombée amoureuse et l’a épousé. Le fils qu’elle avait eu d’un premier lit avec le réalisateur Philippe Garrel, Louis Garrel, s’est d’ailleurs inspiré de cette histoire pas ordinaire dans son dernier film, L’Innocent – où une Anouk Grinberg irrésistible jouait le rôle de sa mère.

L’empressement d’insérer la mention légale « toute ressemblance avec des personnages existants serait purement fortuite » dès le début du générique atteste a contrario que son film puise dans une matière bien réelle, l’expérience de Brigitte Sy dans le milieu carcéral, sinon sa vie elle-même.

Laetitia Casta y est éblouissante. Voilà vingt-cinq ans qu’elle tourne au cinéma. C’est l’exemple, plutôt rare, du top model qui aura réussi à la perfection sa reconversion. Elle parvient, ce qui n’est pas une tâche facile, à faire oublier la beauté de ses traits et de ses formes. Même en jogging noir et hauts talons rouges (sic), elle est majestueuse.

Le film était menacé par un écueil : tomber en panne sèche, après l’emprisonnement de Claude. Une dose de thriller y instille à mi-parcours un rebondissement bienvenu. Autre atout du film, qui n’était pas strictement nécessaire à son économie mais qui n’en reste pas moins bienvenu : le personnage de la mère de Claude, une toxico séropo, interprété par Béatrice Dalle qui décidément, avec sa gouaille et son diastème (le mot du jour !), aura elle aussi marqué le cinéma français.

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