Pinocchio ★★☆☆

Geppetto (Roberto Benigni) est un pauvre menuisier solitaire, sans femme ni enfant. Un beau jour, dans un morceau de bois aux propriétés extraordinaires, il sculpte un pantin qui prend vie. Il le coiffe d’un chapeau pointu, le vêt d’un costume rouge. La jeune marionnette, que Geppetto chérit d’un amour paternel, se révèle vite un bambin espiègle. Il quitte Geppetto pour suivre Mangefeu, le marionnettiste. Il croise le Chat et le Renard qui abusent de sa crédibilité, le détroussent et manquent de le pendre. Il est sauvé par la Fée bleue (Marina Vacth). Avec un autre orphelin, Lucignolo, il gagne le pays des jouets mais y est transformé en âne. Jeté à la mer, il est avalé par une baleine et retrouve Geppetto. Finalement, suivant les conseils de la fée bleue, il se met à étudier sérieusement et devient un beau jour un vrai petit garçon.

Après avoir fait exploser le box-office en Italie – et avant d’y récolter une brassée de Davids, l’équivalent de nos Césars – le Pinocchio de Matteo Garrone devait sortir en France le mercredi 18 mars 2020. Las ! La veille, le premier confinement débutait et repoussait sine die sa sortie. Pendant des semaines, des autobus quasiment vides passaient sous mes fenêtres avec sur leurs flancs les affiches désormais inutiles annonçant sa sortie. Finalement, Pinocchio ne devait jamais trouver le chemin des salles en France et serait diffusé sur Amazon prime dès le mois de mai 2020.

Il m’a fallu pourtant près d’un an pour le voir. Il faut dire que le sujet ne m’intéressait guère. Pour moi, Pinocchio était irrémédiablement un personnage de dessin animé réservé aux enfants. Je me trompais en partie. Sans qu’il soit besoin de convoquer Bruno Bettelheim, la marionnette inventée à la fin du dix-neuvième siècle par Carlo Collodi ne se réduit pas à un jouet pour gamins. Le filmer avec le nez qui s’allonge face à la ravissante fée bleue n’est pas aussi innocent que cela en a l’air et rappellera à tout spectateur normalement constitué quelques épisodes embarrassants de sa pré-adolescence.

Les aventures de Pinocchio sont terrifiantes. Je ne me souviens plus de celles qu’il traversait dans le dessin animé de Walt Disney, si ce n’est sa transformation, passablement traumatisante, en âne et son séjour, avec Geppetto, dans le ventre de la baleine (dont il s’échappait je crois en allumant un feu). Dans celles de Garrone, elles le sont assurément, l’angoisse étant accrue par des lumières ténébreuses et inquiétantes. Jiminy Cricket qui, chez Walt Disney, incarnait la bonne conscience pleine d’humour et de sagesse du petit garçon, est ici un ignoble gnome. Même la fée bleue ou le gentil escargot sont des personnages lugubres et inquiétants. On reconnaît la patte de Matteo Garrone dont les décors et les costumes rappellent ceux de Tale of Tales.

La bande-annonce

La Plateforme ★★☆☆

La prison dans laquelle Goreng (Ivan Massagué) a été incarcéré est composée de plusieurs centaines de cellules, accueillant chacune deux prisonniers, disposée verticalement, les unes sur les autres. Chacune est percée, au sol comme au plafond, d’un trou, « la fosse » (El Hoyo, le titre espagnol original) par lequel descend une plateforme chargée de victuailles. Les étages supérieurs se servent les premiers, ne laissant aux étages inférieurs que leurs restes.

Hasard des calendriers, la sortie sur Netflix de ce thriller claustrophobe a coïncidé avec le premier confinement en mars 2020. C’est ce qui explique son succès. C’est ce qui explique qu’un an plus tard, j’y sois allé jeter un œil pour rattraper mon retard.

La Plateforme nous vient d’Espagne. Son dispositif – un homme se réveille dans une prison de cauchemar dont il essaie de s’échapper – rappelle d’autres films similaires bien connus : Saw ou Cube. Mais son sous-texte politique rappelle surtout Snowpiercer et High-Rise : deux métaphores plus ou moins réussies de nos sociétés capitalistes et inégalitaires.

À première vue, la métaphore est simple sinon simpliste et sonne comme une critique dévastatrice de la théorie du ruissellement, l’idée selon laquelle les richesses créées par les plus nantis profiteraient aussi aux plus pauvres. « Détrompez-vous, pauvres gens, nous disent les prisonniers des étages supérieurs qui se baffrent au lieu de laisser leurs parts aux prisonniers des étages inférieurs ; il ne vous restera que des miettes ».

Mais La Plateforme est un peu plus subtil que cette dénonciation manichéenne. Film d’un pessimisme radical, il renvoie dos à dos l’égoïsme du capitalisme, la naïveté de l’humanisme (incarnée par le personnage de Imoguiri qui prône la solidarité par l’exemple) et même la brutalité du communisme. La seule philosophie qui vaille est celle du Don Quichotte, le livre avec lequel Goreng, dont la ressemblance avec le héros de Cervantes est frappante, migre de cellule en cellule : le monde est un théâtre peuplé d’hallucinations dans lequel chacun peut combattre l’injustice.

Sa fin est assez emberlificotée. On trouve sur Internet tout un tas d’interprétations possibles. La plus évidente n’est hélas pas la plus intelligente.

La bande-annonce

Woman ★☆☆☆

À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, France 5 a diffusé ce documentaire sorti l’année dernière en salles, quasiment jour pour jour, à l’occasion de … la Journée 2020 des droits des femmes.

Au cas où on ne l’ait pas encore compris, Woman parle donc des femmes en allant en interviewer quelques deux mille dans cinquante pays au monde. Ce tour du monde immobile produit un effet paradoxal et peut-être voulu à la fois très dépaysant et un peu répétitif. Toutes ces femmes aux parures bariolées, qui s’expriment dans des langues qu’on s’amuse sans succès à essayer de reconnaître, illustrent la diversité du monde ; mais, en même temps, la similitude de leurs destins, le courage dont elles doivent toutes faire preuve pour surmonter les obstacles que la vie place sur leur chemin tendent à accréditer la thèse d’une unité dont le titre au singulier, Woman, se veut sans doute l’indice.

Chacune est filmée face caméra sur un fond noir. La succession de leurs témoignages est interrompue, pour en briser la monotonie, par quelques séquences d’extérieur muettes habillées d’une musique élégiaque qui portent la marque écolo-new age qui a fait la gloire de Yann Arthus-Bertrand et de ses albums : une nageuse qui ondule aux côtés d’un orque, des ouvrières travaillant à la chaîne dans une immense usine de confection, une Bolivienne sur l’Altiplano, une Hollandaise à vélo, une Américaine chevauchant une Harley Davidson…

En 1h48 bien compactes, ces femmes évoquent, du berceau au tombeau, l’ensemble des défis de la condition féminine : l’excision, les premières règles, le premier orgasme, le mariage forcé, la maternité, l’amour inconditionnel qu’on nourrit pour son enfant, les violences conjugales, la maladie et le tribut qu’elle exige, le vieillissement…. Quelques témoignages sont poignants et feraient fondre même les cœurs de pierre : ces jeunes femmes capturées et violées par Daesh, cette Indienne défigurée à l’acide… Chacun.e y sera plus ou moins sensible en fonction de son histoire personnelle ; mais il y a fort à parier que certains vous touchent plus que d’autres. Pour moi, ce fut le témoignage de cette veuve française, la petite soixantaine, dont les larmes montent aux yeux quand elle confesse que le désir qu’elle suscitait n’existe plus depuis que l’homme qu’elle aimait est mort (1’19 »).

Mais Woman souffre d’une tare écrasante : sa bien-pensance. Tout y est terriblement politiquement correct. Tout y résonne comme un tract bien huilé de UN Women. Il est bien sûr difficile sinon impossible de ne pas sympathiser, surtout un 8 mars, avec l’image sulpicienne mais aussi résiliente de la femme, fragile et forte à la fois, que glorifie Woman. Mais on est en droit d’attendre d’une œuvre cinématographique autre chose qu’un plaidoyer politique, aussi nécessaire soit-il.

La bande-annonce

Femmes d’Argentine ★☆☆☆

L’Argentine n’a pas légalisé l’IVG. Une femme y meurt chaque semaine des suites d’un avortement clandestin.
Un projet de loi y a été adopté à la Chambre basse en 2018. Il doit encore recueillir l’aval du Sénat pour entrer en vigueur. Les groupes d’opinion s’affrontent : d’un côté les pro-life avec leurs bandanas bleus, de l’autre les pro-IVG, leurs bandanas verts et leur cri de ralliement : Que Sea Ley (« que ce soit une loi »)

Tendu par le suspense du vote imminent, le documentaire de Juan Solanas recueille le témoignage, souvent déchirant, des femmes obligées d’avorter dans des conditions sordides.

Ces histoires sont bouleversantes et choquantes. Celle de Ana Maria Acevedo, dix neuf ans à peine et déjà trois enfants, atteinte d’un cancer, laissée sans soin pour protéger son foetus lequel mourut le lendemain de sa naissance. Celle de cette prostituée, mise enceinte par un docteur marié et père de famille, qui fera ensuite jouer sa clause de conscience pour lui refuser l’avortement thérapeutique auquel la loi lui donne droit.

Il est des sujets dont le thème inspire un respect spontané. Femmes d’Argentine est de ceux-là. Pour autant, aussi noble soit la cause qu’il défend, Femmes d’Argentine ne brille guère par sa réalisation très plate qui ne justifiait pas sa sortie en salles.

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Kongo ★☆☆☆

Au Congo, les Ngunzas sont une confrérie de guérisseurs qui promettent à leurs fidèles, en échange d’une offrande plus ou moins généreuse, de recouvrer la santé ou de renouer avec la chance.
Hadrien La Vapeur et Corto Vaclav, sont allés filmer l’un d’eux, l’apôtre Médard, la quarantaine déjà bien entamée, qui officie dans la banlieue de Brazzaville. Ils le rencontrent à un carrefour de sa vie. Médard vient d’être mis en cause pour sorcellerie dans la mort accidentelle de deux de ses patients. Et les investisseurs chinois qui transforment les forêts congolaises en carrières poussiéreuses obligent les esprits avec lesquels Médard dialogue à déménager.

Kongo nous fait une belle promesse : nous emmener au Congo-Brazzaville, moins souvent filmé que son grand voisin de l’autre côté du fleuve. Il nous promet aussi de nous faire découvrir le monde invisible des guérisseurs.

Mais la promesse n’est qu’à moitié tenue. Sans doute la dernière demie heure qui montre – à l’instar de l’affiche – ce prêtre dans son déguisement solennel – errer l’âme en peine à la recherche de ses djinns au milieu d’une nature défigurée par des caterpillars chinois est-elle envoûtante. Mais je suis si indécrottablement rationaliste que je n’ai pu regarder l’heure précédente, qui suivait l’apôtre Médard dans ses rites exotiques, sans le soupçonner de charlatanisme.

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Haingosoa ★☆☆☆

Haingo est une jeune mère célibataire qui vit dans l’Androy, une région du sud de Madagascar. Sa passion pour la musique et la danse ne lui permet pas de subvenir aux besoins de sa fille sous le coup d’une expulsion imminente de l’école. Aussi décide-t-elle de partir à la capitale pour rejoindre la compagnie de danse où travaille une lointaine cousine.

Haingosoa a un mérite rare : nous faire découvrir Madagascar, une terra incognita du cinéma. J’ai dû plonger très loin pour retrouver le souvenir d’un précédent film malgache : Mahaleo, un documentaire sorti en 2005 sur un groupe musical.

Haingosoa débute dans l’extrême sud du pays, l’Androy, avant de gagner les hauts plateaux du centre et la capitale Antananarivo. Ce voyage dans l’espace est aussi un voyage entre les styles musicaux de la Grande Île.

Le problème de Haingosoa est qu’il n’a guère d’autre intérêt que cet exotisme documentaire. Son actrice principale, que la caméra suit dans son exode, n’a ni le charme ni le talent qui la rendrait attachante. Et le scénario, entrecoupé de nombreuses ellipses qui en compromettent parfois la compréhension, est trop insipide pour exciter l’intérêt.

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Yiddish ★☆☆☆

Née en 1945 en Palestine mandataire, Nurith Aviv a dirigé la photographie d’une centaine de fictions de documentaires avant de passer tardivement derrière la caméra. Elle a réalisé plusieurs documentaires exigeants et intelligents sur la langue et le langage que je vais voir à leur sortie dans une petite salle du Quartier latin, toujours la même, au milieu d’une audience fidèle et vieillissante : Traduire en janvier 2011, Signer en mars 2018.

Aussi n’ai je pas raté la sortie de Yiddish, la semaine dernière, à l’époque, qui nous semble aujourd’hui si lointaine, où les salles de cinéma étaient encore ouvertes et où on pouvait se déplacer sans autorisation (j’ai l’impression d’écrire comme un personnage de La Servante écarlate).

Il s’agit d’une enquête sur le yiddish, cette langue à l’histoire contrariée. Langue vernaculaire des Juifs ashkénazes d’Europe centrale, dérivée de l’allemand, mâtinée de slave et d’hébreu, elle a quasiment disparu avec la Shoah. Le jeune État d’Israël a ressuscité une langue oubliée, l’hébreu, au détriment du yiddish qui fut longtemps déconsidéré. Il est remis au goût du jour depuis quelques années, notamment dans la diaspora.

Nurith Aviv est allée interviewer sept jeunes yiddishophones, à Berlin, à Paris, à Tel Aviv, à Vilnius et à Varsovie qui évoquent leur histoire d’amour avec cette langue, qui faisait souvent partie de leur histoire familiale (même si certains témoins ne sont pas juifs) mais qu’ils ont découverte à l’occasion de leurs études.

Le procédé est très répétitif. Les interviews s’enchaînent, toutes identiques. Pour commencer, on voit l’interviewé.e, un peu guindé.e, marcher dans la rue, composer un code, rentrer à son domicile. Puis on l’écoute, le plus souvent en yiddish, mais aussi en français, en anglais ou en hébreu, parler avec chaleur de sa rencontre avec cette langue aux accents chantants. Et enfin, on l’entend déclamer quelques vers de son poète préféré : Moshe Leyb-Halpern, Anna Margolin, Celia Drobkin, Avrom Sutzkever…

Yiddish dure une heure à peine. C’est suffisant pour se bercer des sonorités de cette langue longtemps méprisée, mais pas assez pour en apprendre la riche histoire.

La bande-annonce

Trois étés ★☆☆☆

Mada est la gouvernante d’une somptueuse résidence, nichée dans une crique sauvage en bord de mer. À la tête d’une nombreuse domesticité, elle veille sur ses patrons, Edgar et Marta, sur leur fils qu’elle a vu naître et qui part étudier à l’étranger, et sur le grand-père, qui perd gentiment la tête. Chaque été y est donnée une fastueuse réception. Mais les étés passent et ne se ressemblent pas ; car les malversations dont Edgar s’est rendu coupable lui valent d’être emprisonné, laissant Mada et ses collègues sans salaire et sans instructions.

Au Brésil, Noël tombe au cœur de l’été. Du coup, les fêtes y ont une saveur particulièrement exotique pour nous autres, habitants de l’hémisphère Nord. La réalisatrice Sandra Kogut choisit cette saison pour filmer, en trois épisodes, la chute programmée d’une famille.

On retrouve dans le rôle principal Regina Casé, une star de la TV brésilienne aux faux airs de Noémie Lvovsky. On l’avait déjà vue en 2015 interpréter un rôle similaire dans Une seconde mère. Les relations de domesticité sont un thème cher au cinéma latino-américain : le chilien La Nana (2009), l’argentin La Fiancée du désert (2017), le brésilien Les Bonnes Manières (2018).

Du coup, Trois Étés n’innove guère qui scrute, comme souvent déjà, les travers de la classe dirigeante à travers le regard porté par ceux qui la servent.

Autre défaut plus grave encore : il le fait avec un scénario elliptique, parfois difficile à suivre, qui connaît de brusques accélérations incompréhensibles et des ralentissements languissants (ainsi de cette scène interminable où un spot publicitaire est tourné dans la maison). Aucun des personnages n’est attachant : ni le gras Edgar qu’on voit s’enfermer peu à peu dans la spirale qui le conduira en prison, ni Lira, ce grand-père hagard aux rares éclairs de lucidité, ni surtout Mada elle-même dont la bonne humeur immarcescible, le débit de mitraillette et le rire créent vite une impression de lassitude.

Ni vraiment drôle, ni vraiment grave, Trois Étés échoue au milieu du gué.

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Radioactive ★☆☆☆

Marie Curie compte parmi les scientifiques les plus renommés de son temps. Née Maria Skłodowska, elle perd sa mère à l’âge de dix ans et rejoint à Paris sa sœur pour y poursuivre ses études. Diplômé de la faculté des sciences, elle rencontre Pierre Curie, l’épouse et mène avec lui des travaux sur la radioactivité. En 1903, à trente-six ans à peine, le prix Nobel de physique lui est décerné conjointement avec son mari et avec Henri Becquerel. Huit ans plus tard, elle reçoit seule le prix Nobel de chimie pour sa découverte du polonium et du radium.

Le paragraphe qui précède semble tout droit sorti de Wikipedia ? C’est – quasiment – le cas. Le problème est que Radioactive a les mêmes caractéristiques : vouloir nous raconter la vie de la grande femme. Il le fait avec une application qui frise l’académisme. Et quelques maladresses. La première est de faire parler tous les personnages uniformément en anglais. La deuxième : reconstituer les rues de Paris à la Belle Époque dans une anonyme ville d’Europe centrale (Budapest ?) en carton-pâte. La troisième : faire la part belle à la vie privée de Marie  au détriment de la description, à peine esquissée de ses découvertes. La quatrième : avoir inséré quatre flashwordards, aussi coûteux qu’académiques, pour montrer les conséquences qu’ont eues au vingtième siècle les découvertes de Marie Curie (la bombe d’Hiroshima, la catastrophe de Chernobyl mais aussi la radiothérapie).

Il n’y a pas grand chose à sauver dans ce gloubi-boulga anonyme que signe Marjane Satrapi. Où sont passés la verve, l’humour, la touche de l’auteur-réalisateur de Persépolis (2008) et de Poulet aux prunes (2011) ?

La seule à tirer son épingle du jeu est Rosamund Pike dans le rôle de Marie Curie. Toujours impeccable, malgré les maquillages qui la défigurent, l’ancienne James Bond Girl évite l’écueil qui aurait consisté à faire de Marie Curie une sainte en insistant paradoxalement sur son principal défaut (ou, du moins, sur le défaut que le film lui prête) : un orgueil, un égoïsme, un féminisme avant l’heure qui la conduisirent, malgré elle, à blesser ceux qui l’aimaient, à commencer par son mari, son amant, Paul Langevin, et sa fille aînée, Irène.

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Vivarium ★★☆☆

Gemma (Imogen Poots) et Tom (Jesse Eisenberg) forment un jeune couple idéal. Elle enseigne dans une classe maternelle ; il travaille aux espaces verts. Ils cherchent, non sans mal, une maison pour s’y installer ensemble. Aussi, malgré leurs réserves sur son comportement bizarre, accompagnent-ils Martin, un agent immobilier, dans un lotissement de banlieue où ils visitent une petite maison sans charme. La visite tourne court avec la disparition de Martin qui laisse le jeune couple éperdu, incapable de trouver la sortie du lotissement.
Voilà Gemma et Tom pris au piège d’une maison qu’ils n’ont jamais voulu habiter et d’un colis qui, le lendemain matin, leur est livré, avec son déroutant contenu.

Vivarium est un film étonnant. À commencer par son titre dont le sens ne s’éclairera jamais vraiment, laissant le spectateur seul avec ses spéculations (ou moins seul si vous avez vu le film et acceptez de partager les vôtres avec moi en mp).
C’est un film hyperstylisé avec des décors incroyables. Un ciel à la Magritte avec ses petits nuages blancs floconneux. Une acoustique qui fait penser à un décor artificiel comme dans The Truman Show.
Et puis surtout Vivarium est un conte philosophique. Une métaphore cruelle de la vie. Une vie qui contraint un jeune couple à s’installer dans une habitation où il ne se plaît pas. À s’enfermer dans une routine aliénante. À s’épuiser dans l’éducation d’un enfant hystérique. Et on se taira ici, pour conserver le suspense, sur l’issue de cette vie absurde et aliénée.

Le sujet de Vivarium et son traitement rappellent un épisode de Black Mirror, l’anthologie britannique qui place ses personnages dans un futur dystopique souvent cauchemardesque.
Son pitch est séduisant en diable et sa bande-annonce met l’eau à la bouche. Mais, passé la première demi-heure et nos deux héros coincés dans leur « jour sans fin », Vivarium peine à relancer l’histoire. Le scénario, trop plat, n’y parvient pas. Du coup, ce qui aurait sans difficulté meublé quarante-cinq minutes d’un épisode de série ne tient pas la distance des quatre-vingt dix minutes d’un film.

La bande-annonce