Hatidze est une vieille paysanne macédonienne qui vit seule avec sa mère impotente. Les deux femmes habitent un hameau en ruines, vidé de ses habitants dans un coin reculé de la Macédoine du nord, sans eau ni électricité. Hatidze y cultive le miel en suivant les méthodes séculaires que ses ancêtres lui ont transmises et va en faire le commerce dans la capitale.
Mais ce bel équilibre est rompu par l’arrivée d’une famille turque et de son troupeau, qui se lance dans l’apiculture mais sans en respecter les règles.
Honeyland parvient sur nos écrans après avoir récolté une moisson de récompenses dans les festivals internationaux et deux nominations aux Oscars. Il peut à bon droit revendiquer un certain exotisme : la figure de l’apicultrice macédonienne est certes assez peu exploitée du cinéma contemporain. Il essaie aussi de se parer d’un sous-texte écologiste dont on sait qu’il a le vent en poupe aujourd’hui dans l’opinion publique et dans le documentaire.
Mais ce sont bien là ses seules qualités.
Car Honeyland n’a pas grand-chose à dire une fois qu’il a filmé, caméra à l’épaule ou avec un drone, la silhouette dégingandée de Hatidze sur les chemins de Macédoine, nimbée dans un contre-jour poétique, et ses gestes patients pour récolter le miel. Pour épicer un peu un scénario menacé d’immobilisme, les deux réalisateurs se sont focalisés sur une querelle de voisinage.
Cette histoire quasiment sans paroles a la simplicité d’une tragédie grecque – Grèce limitrophe dont on sait qu’elle a mené la vie dure aux autorités macédoniennes dans le choix du nom de leur pays. Entre la vertueuse Hatidze, gardienne des pratiques ancestrales d’apiculture, qui voit d’un mauvais œil l’arrivée de ces voisins nombreux et bruyants, mais leur réserve néanmoins bon accueil, et Hussein, sa femme, ses sept (!) enfants, son troupeau beuglant et son avidité au gain qui le pousse à surexploiter la flore mellifère, le conflit est inévitable.
On aurait aimé mieux connaître Hatidze et ce qui se cache derrière son sourire triste, les renoncements dont a été faite sa vie. Mais en voulant raconter une histoire, les réalisateurs renoncent à dresser le portrait de cette héroïne attachante.