Mina perd son mari, condamné à la peine capitale pour homicide. Elle travaille à la chaîne en usine et doit élever seule un enfant sourd. Un an après la mort de son époux, la justice lui apprend que le réel assassin a fait des aveux circonstanciés et que son époux a été exécuté à tort. La nouvelle écrase la veuve éplorée qui réclame des indemnités et la mise en cause des juges qui ont prononcé la peine capitale.
C’est alors que Reza apparaît dans la vie de Mina. Il affirme avoir une dette à lui payer. Il l’aide à trouver un nouvel appartement. Quels sont les ressorts cachés de la générosité de cet inconnu ?
Avec un incontestable talent, Une séparation d’Ashgar Farhadi, Ours d’Or à Berlin, Oscar du meilleur film étranger, a créé un genre : le-drame-iranien-poignant-et-réaliste. Le genre a connu, depuis dix ans bien des déclinaisons : les films suivants d’Asghar Farhadi (dont on attend le prochain, Un héros, en décembre), La Permission de Soheil Beiraghi, Trois visages de Rafar Panahi, Un homme intègre de Mohammad Rasoulof ou, le dernier en date, La Loi de Téhéran l’été dernier. Un autre film iranien, Marché noir, repéré au festival Reims Polar 2021 devait sortir le 6 octobre ; mais sa sortie a été intelligemment déplacée au 5 janvier 2022 pour éviter de saturer le marché. Chacun a leur façon, ces films racontent une tragédie universelle en faisant, en arrière-plan, le procès du régime de Téhéran et de ses dérives liberticides.
On pourrait adresser le même éloge à ce Pardon ou lui en faire la même critique. Il est aussi efficace, voire plus, que les autres films iraniens qu’on a vus ces dernières années. Son défaut est d’arriver après eux et de ne plus provoquer la surprise qu’ils suscitaient. On touche ici du doigt un défaut structurel de la critique cinématographique et de celui qui l’écrit : il/elle a déjà vu beaucoup (trop ?) de films. Son regard est peut-être plus aiguisé et mieux renseigné ; mais il n’a plus la virginité des autres spectateurs moins blasés.
Qui n’a jamais vu de film iranien sera sans aucun doute frappé par la force de ce Pardon, par son montage et ses ellipses qui, sans jamais perdre le spectateur, donnent au récit un rythme étonnant, par ses longs plans fixes ou ses lents travellings qui contrastent avec la mode envahissante des caméras au poing elliptiques. Quid de ceux qui ont vu – et aimé – Une séparation, Un homme intègre, La Loi de Téhéran et qui, précisément, parce qu’ils ont vu et aimé ces films-là, parce qu’ils s’intéressent au cinéma iranien, parce qu’ils suivent avec intérêt l’évolution de ce pays-monde, seront venus voir ce film-ci ? Il est à craindre qu’ils aient un sentiment de déjà vu et qu’ils restent sur leur faim.
Ping Marché noir ★★★☆ | Un film, un jour