Luna (Laëtitia Clément) n’a pas vingt ans – et ne laisserait personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. D’ailleurs elle n’a pas lu Nizan. L’école n’était pas vraiment son truc. Elle vient de décrocher son CAP d’horticulteur et travaille dans la petite entreprise de Fruits & Légumes de Sébastien (Frédéric Pierrot).
Luna est amoureuse de Ruben, le bellâtre qui dirige la petite bande dont sa copine Chloé et elle font partie. Ils ont même conçu un enfant ensemble dont Luna doit aller avorter dans quelques jours. Un soir de beuverie, la bande croise Alex, un graffeur solitaire. Le ton monte. La situation dérape.
Les mois passent. Luna se teint en rousse. Elle finit par quitter Ruben qui ne la méritait pas. Elle croise Alex, embauché pour l’été par Sébastien, qui ne la reconnaît pas. Entre les deux jeunes gens, l’attirance est réciproque. Mais Luna craint que le passé ne refasse surface.
Luna est un bijou. Un bijou d’autant plus admirable qu’il est l’œuvre de Elsa Diringer, une jeune réalisatrice venu du court métrage dont c’est le premier long. Elle s’est entourée des conseils d’un vieux limier, Claude Mouriéras, qui co-signe avec elle le scénario et les dialogues. Mais sa maîtrise dans la mise en scène, la photo nimbée des chaudes couleurs de l’été languedocien (il y manque quelques scènes de plage et des filles en bikini pour rappeler Mektoub de Kechiche) et surtout dans la direction d’acteurs.
Faire jouer une bande d’ados est un enfer pavé de bonnes intentions. Nombreux s’y sont cassé les dents telle Hélène Zimmer dans l’hyper-ratée À 14 ans. D’autres ont réalisé des chefs d’œuvre : L’Esquive, Chante ton bac d’abord, Bande de filles, Keeper, Divines… Les premières scènes de Luna n’augurent rien de bon, qui filment les jeunes en meute. Mais Elsa Diringer n’est jamais meilleure que quand elle resserre son objectif sur Luna. Laëtitia Clément, dont c’est le premier rôle, est une révélation. En brune ou en rousse, cette jeune blonde dont c’est le premier rôle illumine la pellicule avec ses faux airs d’Emmanuelle Béart ou d’Ariane Ascaride.
Son talent est mis au service d’une histoire qui a la simplicité des films des Dardenne. Un personnage est placé face à un dilemme. Ici c’est Luna qui retrouve par hasard Alex dont elle a été témoin voire acteur quelques semaines plus tôt de l’agression dont il a été la victime. L’attirance qu’elle ressent est freinée par la crainte d’être reconnue. L’impossible aveu de sa participation tient le film en suspens tout comme le retour de Ruben qui briserait immanquablement l’idylle entre les deux amoureux. L’intrigue se dénoue en deux temps. Ce passage obligé, trop longtemps attendu, trop longtemps différé n’est pas la meilleure partie du film. Mais ses imperfections ne suffisent pas à ternir le plaisir qu’on y aura pris.