Charlie Kaufman is back! Il avait signé au tournant du siècle les scénarios les plus déjantés, les plus étonnants de Spike Jonze (Dans la peau de John Malkovich, Adaptation) et de Michel Gondry (Human Nature, Eternal Sunshine of the Spotless Mind) avant de sombrer dans l’oubli, englué dans une succession de travaux inaboutis.
Les miracles du crowdfunding et la rencontre de l’animateur Duke Johnson lui permettent de co-réaliser Anomalisa, un film d’animation en stop motion (image par image) aussi fascinant que décevant.
Fascinant, Anomalisa l’est assurément qui raconte la nuit que passe Michael Stone à l’hôtel Fregoli de Cincinnati à la veille de la conférence qu’il doit y donner. Rien de bien intrigant dans cette histoire sinon qu’elle est filmée dans un univers aseptisé où tous les personnages que croise le héros, depuis le chauffeur de taxi jusqu’à une ancienne maîtresse, ont le même visage androgyne et la même voix. Cette homogénéité angoissante ne connaît qu’une seule exception, qu’une seule anomalie : Lisa, une télévendeuse pas jolie ni même intelligente que Michael rencontre dans un couloir et dont il tombe amoureux.
Dans sa première moitié, Anomalisa fascine par son parti pris stylistique radicalement différent de tout ce qu’on a vu jusqu’à présent et par la description cynique et tellement réaliste de la vie si terne du col blanc occidental en mission (que celui qui ne s’est jamais ébouillanté en tentant de faire fonctionner les robinets de sa douche d’hôtel parle maintenant ou se taise à jamais).
Mais dans sa seconde moitié, Anomalisa déçoit de plus en plus. L’effet de surprise du stop motion cesse de faire effet. Les décors marronnasses, les démarches empesées des personnages, leurs masques artificiels lassent plus qu’ils ne fascinent. Plus grave encore, le scénario prend un tour banalement décevant. Michael réussit à convaincre Lisa de l’accompagner dans sa chambre. Je ne dirai rien de ce qu’il adviendra de ces amants d’un soir au petit matin si ce n’est que leur histoire est d’un glauque achevé.
Entre leur coucher et leur lever se déroule une scène de sexe décrite par la critique comme la plus réaliste et la plus romantique qui soit. Alors là je proteste et m’insurge ! J’ai rarement vu scène de sexe si plate, si dénuée d’intérêt ! L’avantage, c’est que l’opinion que je me faisais de mes performances sexuelles s’en trouve soudainement boostée ! Merci Charlie Kaufman !