Trois histoires dans l’Algérie contemporaine. En commun dénominateur : la lâcheté humaine. Un riche homme d’affaires assiste sans réagir au tabassage d’un inconnu. Une jeune femme retrouve un amour de jeunesse la veille de son mariage. Un neurologue est accusé d’avoir participé à un viol collectif durant les années de guerre civile.
Karim Moussaoui s’était fait connaître en 2015 par un moyen-métrage minimaliste Les Jours d’avant qui racontait l’amour impossible de deux jeunes gens dans l’Algérie des années 90. Il passe au long s’en changer sa façon de faire. Et c’est bien là le problème.
Certes, les trois (ou quatre) histoires que compte son premier long-métrage ont la même délicatesse que celle racontée dans Les Jours d’avant. Par petites touches, un portrait de l’Algérie contemporaine se dessine. Une Algérie filmée, à rebours de l’image de carte postale qu’on en a depuis Camus, sous un soleil froid, où les protagonistes grelottent dans des manteaux trop fins. Une Algérie prisonnière du passé. Du passé collectif de la guerre civile dont les blessures sont loin d’être refermées. Et du passé individuel lesté des petites lâchetés auxquelles oblige un système corrompu fondé sur le clientélisme, le respect hypocrite des traditions et le conformisme. Une Algérie irrespirable où l’on attend ces hirondelles qui annoncent l’arrivée du printemps (arabe).
Mais le sujet aurait mérité un traitement plus habile que celui de ces trois histoires maladroitement juxtaposées. Je ne goûte guère les films à sketches au cinéma ou les nouvelles en littérature. J’ai déjà eu l’occasion de le dire dans ma critique, mitigée, du film américain Certaines femmes sorti en début d’année et pourtant accueilli par une critique élogieuse. Raconter trois courtes histoires, c’est en reconnaître implicitement mais nécessairement la modestie, puisqu’on ne consacrera à chacune qu’une dizaine de minutes. C’est placer un chronomètre au cœur du film (« la première est finie ; plus que deux. La deuxième s’achève ; plus qu’une »). C’est surtout conduire à des palmarès inconscients : ici c’est la première qui pêche par son insignifiance et la troisième qui est de loin la plus émouvante.