Les forces du Mal commandées par l’infâme Snoke, secondé par Kylo Ren (Adam Driver), le propre fils de Han Solo, passé du côté obscur de la Force, sont sur le point d’anéantir l’armée de la Résistance de la princesse Leia (Carrie Fisher).
Pour la sauver du désastre, Rey (Daisy Ridley) est parti chercher Luke Skywalker (Mark Hamill), qui se cache sur une île sauvage battue par les vents et a renoncé à la Force après avoir échoué dans la formation de Kylo Ren.
Pendant ce temps Finn (John Boyega) se lance dans une course contre la montre pour aller dénicher sur la planète Canto Bight un craqueur de code capable de pénétrer les défenses ennemies.
Vous n’avez rien compris ? Pas grave ! Comme à chaque épisode de Star Wars, le générique iconique – lettres jaunes en plan oblique qui va se perdre dans l’infini de la galaxie sur la musique hymnique de John Williams – vous remettra dans le bain dès les premières secondes. Et si vous n’y comprenez toujours rien, ressortez le DVD de Star Wars V : l’histoire est la même.
Et c’est bien là que le bât blesse.
Plus de trente ans après L’Empire contre-attaque, quelques milliards d’effets spéciaux et de spectateurs plus tard, Walt Disney Inc., qui a pris les manettes de la franchise, s’est paresseusement installé dans une routine. Deux semaines avant les fêtes sortira chaque année un nouveau Star Wars – soit qu’il s’inscrive dans la lignée historique à l’instar de ce huitième opus, soit qu’il en soit dérivé comme Rogue One l’an dernier ou Solo l’an prochain.
Que peut-on reprocher à SW8 ? D’être la suite de SW7 et la (longue) bande-annonce de SW9. Comme un vulgaire épisode de Game of Thrones. Il s’agit de progresser lentement sur un fil narratif plus étendu. Ce fil est organisé autour des deux personnalités de Rey et de Kylo Ren, dont on escompte que, comme dans SW3 Anakin et Obi Wan ou dans Sw6 Luke et Dark Vador, ils s’affronteront à la fin de SW9 dans un combat épique. Comme leurs illustres prédécesseurs, nos deux héros incarnent deux aspects symétriques de la Force et cachent (on le sait déjà pour Kylo Ren, on l’ignore encore pour Daisy) le lourd secret d’une filiation prestigieuse.
Un mot en passant sur cette généalogie princière. Il est étonnant que les héros des temps contemporains soient aussi aristocratiques. De Game of Thrones à Star Wars, nul n’est héros s’il n’est bien né. Comme si la naissance demeurait, en notre ère pourtant profondément méritocratique et égalitaire, un facteur déterminant de distinction.
En attendant le combat qui conclura SW9, il faut donc passer le temps et dépenser les 200 millions de dollars du budget. L’armée de scénaristes ne s’est pas foulée et a repris les recettes qui font désormais le succès des meilleurs séries : prendre trois fils narratifs et les entrelacer. Avec une régularité métronomique, on passera donc de l’un à l’autre. On verra tour à tour Leia perdre ses vaisseaux, Luke former Rey et Finn faire du tourisme sur une planète casino.
Ne soyons pas bégueule et reconnaissons quelques jolis passages. Passages qui valent plus par leur esthétisme pourpre que par leur richesse narrative : la salle du trône de Snoke et les combats chorégraphiés qu’y livre Rey, le désert de sel rouge où se déroule l’assaut final.
Mais mis à part ces deux séquences, j’avoue le rouge (décidément) au front que je me suis pesamment ennuyé. J’ai eu l’ennui honteux. Car Star Wars 8 – qui fera un carton au box office – séduit les enfants. À chaque âge ses plaisirs…