Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, Juliet Ashton, une jeune romancière londonienne à succès, reçoit de Guernesey une lettre d’un fermier qui lui raconte comment, pendant l’occupation allemande, il a participé à la création d’un groupe de lecture. Sa curiosité aiguillonnée, la romancière se rend sur l’île, y fait la connaissance des membres du Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates et pressent qu’on lui cache une partie de la vérité.
The Guernsey Literary and Potato Peel Pie Society, écrit par une auteure américaine décédée avant sa publication en 2008, fut un best-seller mondial. Sous la forme d’un roman épistolaire, il racontait l’histoire d’une romancière londonienne séduite par l’île de Guernesey et ses habitants.
Son succès avait plusieurs causes. Le premier était l’exotisme de l’île de Guernesey, petite île anglo-normande aux rivages escarpés. Sa proximité des côtes françaises lui valut d’être occupée de juin 1940 à mai 1945. Si l’Occupation fait partie de l’Histoire de France et y inspira bon nombre de livres et de films (La grande vadrouille, L’Armée des ombres, Le vieux fusil…), le Royaume-Uni ne s’est jamais pensé, et pour cause, comme un territoire occupé, ce qui rend originale la situation, largement méconnue, des Îles anglo-normandes.
Mais Le Cercle littéraire… ne vaut pas seulement par sa reconstitution historique de temps de guerre. Son sujet principal est la lecture, les plaisirs solitaires qu’on y trouve, les prétextes qu’elle offre de rencontrer d’autres lecteurs.
Le succès du livre fut tel qu’une adaptation à l’écran était prévisible. De nombreuses difficultés l’ont retardée. Kenneth Branagh avait été annoncé à la réalisation, avant d’être remplacé par Mike Newell, un septuagénaire dont le nom reste associé à Quatre mariages et un enterrement, Donnie Brasco et le plus mauvais des Harry Potter. Kate Winslet, Anne Hathaway ou Emily Blunt avaient été évoquées pour le rôle principal avant que Lilly James – ravissante dans un rôle secondaire de Downton Abbey – ne soit retenue. Le tournage qui aurait dû se dérouler à Guernesey dut être délocalisé sur la côte anglaise, faute pour la petite île de pouvoir accueillir la lourde logistique d’une superproduction hollywoodienne.
Le résultat est sans surprise. Le Cercle littéraire de Guernesey (le titre français a été raccourci alors que le titre anglais du film est le même que celui du livre) ressemble aux meilleures séries de la BBC. Il ne manque pas un bouton aux tenues impeccables de Lilly James, pas un brin d’herbe aux paysages vallonnés de Guernesey et pas un grain de poussière aux vieux volumes de Brontë et de Shakespeare déterrés du grenier pour nourrir les veillées littéraires à la chandelle.
De là à dire que le film croule sous son académisme, il n’y a qu’un pas que des critiques sans cœur n’ont pas hésité à franchir. Je ne saurais les blâmer. Pour autant, je dois confesser un penchant coupable pour ce genre de films. Même si j’adore Black Mirror ou The Leftovers, Downton Abbey reste, de loin, ma série préférée, celle que j’emmènerais sur une île déserte (avec un lecteur de DVD et un générateur) pour revoir le froncement de sourcil de Hugh Bonneville et le sourire pincé de Maggie Smith. Les émois amoureux de jeunes gens bien habillés dans la campagne anglaise me font immanquablement verser une larme. J’en ai versé plus d’une devant ce Cercle littéraire. Faute avouée…