Ivanovo, 250km au nord-est de Moscou, une ville demi-millionnaire plus connue pour son industrie textile que pour ses curiosités touristiques. Automne 1999 : la (seconde) guerre de Tchétchénie bat son plein, Eltsine va quitter le pouvoir et céder la place à un inconnu, Vladimir Poutine.
Andreï est mort en Tchétchénie. Denis, son frère cadet, épileptique, a été réformé. Il tente sans succès d’empêcher la mafia locale de faire main basse sur la moto d’Andreï. Anton, son frère aîné rentre ce jour-là du front. Sa fiancée Vika, qui rêve de s’expatrier en Allemagne contre l’avis de sa grand-mère, l’attend impatiemment ; mais Anton, tétanisé à l’idée d’affronter le chagrin de sa mère, la bat froid.
Vera, la mère de Vika, a rejoint les témoins de Jéhovah. Avec Alja, une coreligionnaire, elle fait du porte-à-porte sans guère de succès. Dans un hall d’immeuble, elle secourt un alcoolique et lui offre l’hospitalité pour la nuit.
Sortent coup sur coup deux films russes qui dressent de leur pays une image peu flatteuse. Factory sera sur les écrans demain et ma critique en ligne en même temps. Il a bénéficié de la chambre de résonnance du festival de Beaune et d’une bonne exposition grâce à Bac Films. Folle nuit russe, sorti mercredi dernier, n’a en revanche fait l’objet d’aucune publicité et d’une distribution confidentielle. Il mérite pourtant le détour.
On y croise quelques éléments représentatifs de la société russe eltsinienne, en manque de repères : un conscrit revenu du front avec la haine, une jeune femme délurée, une mère inconsolable de la mort de son fils, un alcoolique intarissable… Le scénario de ce film choral, rédigé par la réalisatrice dont c’est le long-métrage de fin d’études, n’est pas toujours très lisible. On peine à comprendre ce qui relie ces personnages et le film est si court (une heure et dix sept minutes seulement) qu’on n’a guère le temps d’assembler les pièces du puzzle.
Mais ce sont ces imperfections mêmes qui rendent Folle nuit russe attachant, mélange déséquilibré de tragédie et de comédie, peinture désespérée d’une société sans boussole.
Hélas, le film n’est pas aidé. J’ai déjà évoqué sa distribution ultra-réduite. J’aurais pu évoquer son affiche – une matriochka recouverte de sang – à l’esthétique de slasher et son titre ridicule, sans lien avec l’original, qui emprunte plus à la comédie pour ados qu’à la critique sociale