Avec une caméra offerte en 1948 par Piaf dont il était le secrétaire, Charles Aznavour a filmé sa vie. Quelques années avant sa mort, il a ouvert à Marc di Domenico ses archives en lui confiant la mission d’en faire un film. Il est mort l’an dernier sans en voir l’achèvement.
Je connais mal Aznavour. Avec Brel, Brassens et Bécaud, il faisait partie des chanteurs préférés de la génération de mes parents. C’est la raison pour laquelle il me semblait si ringard et que je lui préférais, par esprit de contradiction, Jeanne Mas, Mylène Farmer et Gilbert Montagné. Preuve s’il en fallait du raffinement de mes goûts musicaux !
Pourtant, en allant voir ce documentaire, je réalise que ces chansons sont entrées dans notre vie : Les Comédiens, Hier encore, For me Formidable, La Bohême, Emmenez-moi… Impossible de lire cette énumération sans avoir dans la tête une mélodie et des paroles – qui, cher lecteur, vous accompagneront pour le restant de la journée.
« Un film de Charles Aznavour réalisé par Marc di Domenico ». Les mots qui barrent l’affiche posent question : de qui est ce film ? Il s’agit, nous dit-on, d’images tournées par Aznavour. Et pourtant, on le voit souvent à l’écran. Et c’est tant mieux. Les images qu’il ramène de ses tournées (aux États-Unis, au Japon, en Afrique, en Arménie) n’ont guère plus d’intérêt que les soirées diapo de Tonton Paul et de Tata Nénette [ma grand-tante s’appelait en effet Antoinette]. En revanche, on aime le voir, sec comme une trique, aussi maigre que minuscule (1m60 au garrot). Et surtout, on aime l’entendre…
On apprend quelques détails de sa vie privée, qui fut chaotique. Une première femme, Micheline, et la vie de Bohême dans une soupente de Montmartre. Une deuxième, Evelyn, « la renarde », avec laquelle il part (en paquebot !) à la conquête des États-Unis. Et une troisième, Ulla, qu’il épouse à Las Vegas en 1967 et qu’il ne quittera plus. Six enfants dont Patrick qui meurt à vingt-cinq ans d’une overdose et pour laquelle il composera L’Aiguille. Une vie…