Rahim est en prison pour dettes. Il veut profiter de la courte permission qui lui est octroyée pour obtenir le pardon de son créancier. Il espère rembourser une partie de sa dette avec l’argent qu’a trouvé par hasard Farkhondeh, sa fiancée. Mais il se ravise et décide de le restituer à son propriétaire en passant une annonce. Cette bonne action va avoir des conséquences inattendues.
Ashgar Farhadi est de retour en Iran après un passage peu convaincant par l’Espagne (Everybody Knows, 2018). Il retrouve, dans la ville de Shiraz, les personnages et les situations qui avaient fait le succès de Une séparation et, dans une moindre mesure Le Passé. habitué des festivals, Fahradi a frôlé la Palme d’Or en juillet dernier à Cannes et obtenu, en lot de consolation, le Grand Prix.
Le titre du film sonne comme un programme. Mais avec Ashgar Farhadi, il faut toujours rester sur ses gardes. Son héros est-il aussi héroïque que le titre du film l’annonce ? Que cache ce rideau qui occulte la moitié de son visage sur l’affiche, laissant suspecter une éventuelle zone d’ombre ? Que scrute ce regard perçant (persan ?) qu’on ne lui voit jamais dans ce film où il arbore perpétuellement un sourire désarmant et un « air de chien battu » – sur la foi duquel sa caution s’est lourdement engagée au risque d’être trahie ?
[Attention spoiler] Tout le long du film, sans doute trop habitué aux scénarios hollywoodiens et à ses twists redoutables, j’ai attendu une révélation qui n’est pas venue : celle d’une arnaque dont ce soi-disant « héros » se serait rendu coupable. J’ai imaginé toutes sortes de scénarios échevelés. J’ai par exemple pensé que Rahim et la femme venue chercher l’argent qu’elle avait perdu étaient en fait de mèche. Ou, plus simplement, j’ai pensé que Rahim avait restitué cet argent dans l’idée machiavélique d’en retirer un bénéfice moral.
La réalité est plus triviale. Je l’ai d’ailleurs trouvée assez peu crédible : pourquoi diable voit-on Rahim d’abord essayer de convertir les dix-sept pièces d’or contenues dans le sac trouvé par Farkhondeh puis soudainement changer d’avis ? La calculette du joaillier qui tombe en panne, son stylo qui ne marche pas sont-ils vraiment les seules causes de ce brutal revirement ?
La réalité, donc, se dévoile simplement ou, plutôt, ne se cachait nulle part. Ce repris de justice a fait une bonne action. Mais il a fait une bonne action qui se retourne contre lui à cause de quelques libertés qu’il prend avec la vérité : il affirme, sur les conseils de ses geôliers qui y voient le moyen de rehausser l’image de leur établissement, que c’est lui qui a trouvé ledit sac – alors que c’est sa fiancée qui a fait l’heureuse découverte quelques jours plus tôt. Et faute de remettre la main sur la mystérieuse propriétaire, qui disparaît une fois son sac retrouvé sans qu’on ne retrouve jamais sa trace, il ment sur son identité durant sa déposition.
Tout compte fait, et contrairement à ce que j’escomptais pendant tout le film, Un héros n’est pas un film à double fond sur la duplicité humaine et le faux héroïsme. C’est beaucoup plus simplement l’histoire d’un homme pris au piège de ses bonnes actions.
Ping Marché noir ★★★☆ | Un film, un jour