Julia (Julie Ledru) est une jeune femme sans toit ni loi, qui ne vit dans la banlieue bordelaise que pour sa seule passion : le cross-bitume. Sur une « ligne », après un accident dramatique qui emportera l’un de ses membres, elle réussit à s’incruster dans une bande de motards dirigée d’une main de fer depuis sa cellule de prison par Domino. Tandis que Julia se rapproche d’Ophélie, la compagne de Domino, elle tente non sans mal de se faire une place dans la bande, exclusivement masculine.
Rodéo arrive sur les écrans cette semaine, précédé de la réputation flatteuse qu’il a acquise lors de sa projection à Cannes – dans la section Un certain regard où il a été élu Coup de cœur du jury – et du parfum de scandale qu’a suscité une interview de sa réalisatrice. Après avoir affirmé que « Les accidents sont souvent causés par les flics qui prennent en chasse et qui poussent les riders vers la mort », Lola Quivoron a répliqué que ses propos avaient été sortis de leur contexte, que les bavures policières n’étaient pas le sujet de son film et que le cross-bitume qu’elle y montre ne saurait être assimilé aux rodéos urbains.
Loin de cette polémique, on peut critiquer Rodéo pour ce qu’il est. Force est de reconnaître la belle énergie qui le traverse et le talent brut de son héroïne dont c’est le premier rôle. Les critiques rapprochent Rodéo de Titane car les deux films évoquent une fusion du corps et qu’ils sont l’oeuvre de deux jeunes réalisatrices. Je ne suis pas sûr que la comparaison soit pertinente. Rodéo n’a pas les fulgurances science-fictionnelles de Titane – qui ont tant clivé ses spectateurs.
Il me semble plus opérant de rapprocher Rodéo d’autres films – d’ailleurs eux aussi tournés par des femmes – qui ont pour thème la douloureuse sortie de l’adolescence : Sans toit ni loi d’Agnès Varda (qui révéla Sandrine Bonnaire), Belle Epine de Rebecca Zlotowsky (qui révéla Léa Seydoux), Suzanne de Katell Quilleveré (où explose le talent de Sara Forestier)…
Rodéo prend pour toile de fond le cross-bitume. Mais le cross-bitume n’est pas le sujet de son film – pas plus que les courses de voitures ne sont celui de La Fureur de vivre. Il donne pourtant lieu à quelques scènes documentaires où on sent que la réalisatrice s’est laissée fasciner par les images spectaculaires qu’elle était en train de tourner au risque d’oublier en chemin le sujet de son film.
Le défaut de Rodéo est que, tout bien considéré, il se réduit à pas grand-chose. Rodéo est un film faussement punk qui nous raconte sagement une histoire banale : le coming-of-age d’une adolescente rebelle.