Partout en France, des militantes féministes collent sur les murs à la nuit tombée des slogans chocs sur des feuilles A4 peintes en noir qui dénoncent les féminicides et le patriarcat : « Je te crois » « Mon corps, mes choix » « Pas un.e de plus » « Ras le viol » « Non c’est non » « Ta main sur mon cul, ma main sur ta gueule ».
Marie Perennès et Simon Depardon sont allés à la rencontre de ces colleuses, jeunes et militantes, dans une dizaine de villes de France : Lyon, Le Havre, Montpellier, Marseille, Montbrison, Brest, Compiègne, Amiens, Lille, Paris, Gignac….
Riposte féministe témoigne de leur engagement. Il aurait pu se focaliser sur un seul collectif, probablement parisien, car le plus nombreux et le plus riche. Il a préféré prendre le parti de ce lent Tour de France dont l’objectif est de témoigner de la diversité de ce militantisme et aussi de son universalité : ce n’est pas seulement un phénomène parisien mais bien un mouvement national. Le risque est de donner au documentaire un faux rythme : il aurait pu nous montrer cinq groupes de plus – ou de moins – sans y rien changer.
Les femmes interviewées se ressemblent. Elles sont jeunes, entre dix-huit et vingt-cinq ans. Elles sont militantes et politisées. Ce sont les mêmes concepts, le même vocabulaire stéréotypé qu’elles utilisent, mais avec une indéniable authenticité. Elles se réapproprient la rue et la nuit avec une témérité contagieuse : quand une élue à Compiègne propose de leur affecter un mur pour s’y exprimer, elles accueillent avec tiédeur cette offre qui gommerait la transgression de leur geste.
Les Colleuses sont non-mixtes. Ces collectifs rassemblent exclusivement des femmes et des « minorités de genre ». Cette non-mixité contredit l’idéal universaliste qui est au cœur de notre pacte républicain et qui postule une égalité fondamentale, au-delà des différences de genres, de classes et de religions. La misandrie n’est jamais loin et les Colleuses en ont une conscience lucide dans leur débat interne autour du slogan radical de Brigitte Fontaine : “Assez parlementé, vive la lutte armée, qu’on empale tous les mâles”. On peut désapprouver cette non-mixité, cette misandrie latente ; mais il n’en est pas moins indéniable que la complice sororité – un mot étrangement tu durant tout le documentaire – qui caractérise ces collectifs et que les réalisateurs ont parfaitement réussi à saisir en constitue une des dimensions les plus sympathiques.