À cause de la mort de sa mère dans un accident de moto et de l’aggravation inexorable de l’état de santé de son père (Benoît Poelvoorde), malade d’une sclérose en plaques, Lucie (Justine Lacroix), quinze ans, se voit privée de son adolescence. Son père n’en étant plus capable, elle doit gérer les tâches quotidiennes, la cuisine, le ménage, son pilulier, avant de courir au collège. D’autant qu’une menace plane sur elle : être placée par les services sociaux.
Normale fait partie de ces petits films français, comme il en sort treize à la douzaine : Quand tu seras grand, La Plus Belle pour aller danser, Sage-Homme, À la belle étoile, Les Petites Victoires, etc. Je ne serais pas allé le voir si une amie ne me l’avait pas chaudement conseillé. Je me demande d’ailleurs quelle est l’économie de ces films que je vois défiler sur les écrans et en disparaître deux semaines à peine après leur sortie. Eu égard au nombre de spectateurs en salles qu’ils attirent, sont-ils des désastres financiers ? Ou bien réussissent-ils à atteindre la rentabilité grâce aux rediffusions télévisées que leurs acteurs souvent encore bankables leur garantissent ? Ou bien encore le financement du cinéma français est-il si généreux que leur rentabilité est assurée quelle que soit leur audience ?
Toujours est-il que Normale a dénoncé mon pronostic et fait mentir mon cynisme. L’histoire de cette ado dévouée à son père malade, qui aurait pu verser dans le misérabilisme mais n’y tombe jamais, m’a ému. L’humour tendre de ce teen movie m’a fait sourire. Et même l’histoire d’amour un peu mièvre qui rapproche Lucie d’un camarade de classe est touchante.
Le mérite en revient à un scénario bien écrit et surtout à un duo d’acteurs impeccables. Benoît Poelvoorde, qui au physique sinon, espérons-le, au moral, est en train de se depardieuser à grande vitesse, se bonifie avec l’âge, comme les grands vins, dans le registre de la tragicomédie. Mais la révélation du film, c’est la jeune Justine Lacroix, qui n’a pas le charme et la fraîcheur qu’on escompte de cette catégorie d’actrices mais qui, contre toute attente, se coule à merveille dans le rôle pas si évident d’une ado obligée par la force des choses de monter en graine plus vite qu’elle ne le devrait.