Pascal et Pauline sont frère et sœur. Lui vit à Mexico, elle à New York, loin du domaine familial dans l’Orléanais. Ils y reviennent pour le vendre. Un couple d’amis, Emmanuel et Laure, d’origine plus modeste, est sur les rangs.
Pour le réconfort arrive sur nos écrans précédé d’une réputation flatteuse que la bande-annonce relaie et amplifie. « La naissance d’un cinéaste engagé » (L’Express). « Une bouffée d’air frais salutaire » (Vanity Fair). « La claque radicale de Cannes » (Paris Match). Cette réputation doit beaucoup à son réalisateur, Vincent Macaigne, qui faisait encore la couverture de Télérama il y a quelques semaines et qui incarne à lui seul la Nouvelle nouvelle vague du cinéma français.
S’inspirant très librement de La Cerisaie – dont on se souvient (ou pas) qu’elle voit s’affronter dans la Russie tsariste un propriétaire foncier désargenté contraint de céder sa cerisaie bien-aimée au fils d’un moujik qui a l’intention de la raser pour la lotir – Macaigne réalise un film sur la lutte des classes et l’héritage. D’un côté Pascal et Pauline incarnent la classe des possédants, celle des enfants nés avec un héritage, qui peuvent se permettre de courir le monde sans se soucier des fins de mois difficiles. Au contraire Emmanuel et Maure incarnent la France d’en bas, celle qui n’est forte d’aucun héritage et qui a dû bâtir son patrimoine par son seul travail.
Macaigne y insiste : il ne s’agit pas de désigner un gentil et un méchant, un vainqueur et un vaincu. Il aimerait nous montrer que la saine colère d’Emmanuel et Laure a parfois des relents populistes et que le mépris de classes affiché par Pascal et Pauline n’est pas uniment récusable.
Durant le débat qui s’est déroulé hier après-midi, à la fin du film, au MK2 Hautefeuille (oui ! je sais ! il ne porte plus ce nom ! mais il me faudra bien dix ans à m’habituer au nouveau), avec Vincent Macaigne – aussi incapable de se coiffer et de terminer ses phrases dans la vie réelle qu’à l’écran – un vieux monsieur de quatre-vingt deux ans s’est offusqué : « Je suis furieux d’avoir dépense dix euros pour ce film où les personnages passent leur temps à s’insulter en hurlant comme s’il leur était impossible de dialoguer calmement » plongeant, par son intervention, la salle dans un silence embarrassé. La vérité m’oblige à dire que je ne suis pas loin de partager l’opinion de ce vieux monsieur.
Je mesure parfaitement le potentiel cinématographique et sociologique d’une adaptation contemporaine de La Cerisaie (ou du Guépard qui, tout bien considéré, raconte la même histoire), qui mettrait face à face la France d’en haut et La France d’en bas. Mais je trouve inutilement hystérisant la façon dont Macaigne le met en scène.