Suzanna Andler (Charlotte Gainsbourg), la quarantaine, est mariée et mère de famille. Son mari, Jean, la trompe éhontément. Suzanna a pris un amant, Michel (Niels Schneider). Venue sur la Côte d’Azur à la morte saison pour y louer une maison, elle s’interroge sur ses sentiments pour Jean et pour Michel.
Quelle mouche a piqué Benoît Jacquot, qu’on connaissait plus inspiré, ses acteurs et ses producteurs, pour aller ressusciter cette pièce démodée de la dramaturge la plus démodée des Trente Glorieuses ? Marguerite Duras était déjà exaspérante de son vivant. On la soupçonne d’ailleurs d’en avoir fait profession. Elle l’est encore plus vingt ans après sa mort. Son théâtre sans rythme, sans vie, qui s’étire en d’interminables face-à-face, qui triture le vide de nos existences avec un plaisir masochiste, était vain. Le temps qui passe ne lui a pas conféré la valeur qu’il n’a jamais eue.
J’avais eu la main lourde en mettant un zéro pointé à India Song – qui passe, aux yeux d’un grand nombre, pour un chef d’oeuvre. Benoît Jacquot y fut le premier assistant de l’auteure du Barrage contre le Pacifique et de Moderato Cantabile qui s’était piquée, alors qu’elle n’y entendait rien, de faire du cinéma ; et c’est sans doute à ce lointain héritage qu’on doit aujourd’hui de sa part ce retour au source. Ma main ne tremble guère au moment d’évaluer ce Suzanna Andler tant ce film m’a semblé dépourvu du moindre intérêt. Les spectateurs qui ont lentement déserté la salle pendant la séance, écrasés comme moi par un trop-plein de vacuité, me confortent dans ma sévérité.
Habillée par Yves Saint Laurent dans un improbable manteau ocellé, Charlotte Gainsbourg a l’air de s’y ennuyer autant que nous. Elle embrasse sans sensualité un Niels Schneider aussi mollasson qu’elle. Deux personnages secondaires viennent compléter le casting : un agent immobilier et une ancienne maîtresse de Jean. Tel est l’avantage de l’adaptation des pièces de théâtre : les acteurs ne sont guère nombreux et le budget n’est pas gaspillé dans la rémunération des figurants (Benoît Jacquot a fait une économie supplémentaire en jouant lui-même Jean qu’on ne voit pas à l’écran mais qui s’entretient longuement avec sa femme au téléphone)
Le film d’ailleurs, qui ne quitte guère les quatre murs d’une villa au charme vieillot (l’action est censée se dérouler dans les années soixante – comme elle aurait pu aussi bien se dérouler en 2090), surplombant la baie de Cassis (l’action est censée se dérouler à Saint-Tropez …. mais bon….), n’aura pas coûté grand-chose. Heureusement pour lui : sa billetterie rapportera encore moins !
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