Here – Les plus belles années de notre vie ★★☆☆

Here relève un défi sacrément culotté : tourner tout un film sans jamais bouger la caméra. Un film qui ne raconterait pas une histoire censée se dérouler en deux heures, en une semaine, voire l’espace d’une vie, mais qui remonterait aux dinosaures, à leur extermination sous une pluie d’astéroïdes et à la naissance de l’humanité.

Robert Zemeckis est le petit frère de cinéma de Steven Spielberg. Son cadet de six ans, il a réalisé des films presque aussi populaires que lui : la trilogie Retour vers le futur, Qui veut la peau de Roger Rabbit, Forrest Gump, Seul au monde…. Comme James Cameron, il a toujours été fasciné par les effets visuels et les nouvelles technologies : les trucages, la performance capture, la 3D numérique, l’utilisation de l’IA….

L’idée de Here lui est venue du roman graphique de Richard McGuire qui raconte l’histoire du monde de 3 500 000 000 av. J.C. jusqu’à l’an 22 175 depuis un point de vue fixe : l’angle d’un salon de Perth Amboy dans le New Jersey où l’auteur a grandi. Sacrée gageure  technologique et scénaristique que Robert Zemeckis relève haut la main grâce à deux procédés. Des inserts dans l’image qui permettent de passer avec beaucoup de fluidité d’une époque à l’autre, sans jamais égarer le spectateur. Des flashbacks et des flash forward qui rompent avec la plate chronologie des histoires qui aurait été vite ennuyeuse.

Si on l’analyse, on distingue six histoires dans Here. La première se déroule au temps des Amérindiens ; la seconde à l’Indépendance avec Benjamin Franklin pour héros ; la troisième au début du vingtième siècle avec un pionnier de l’aviation et son épouse, terrifiée par les risques qu’il prend (on reconnaît Michelle Dockery, personnage récurrent de Downton Abbey) ; la quatrième juste avant la seconde guerre mondiale chez un inventeur hédoniste. La dernière, la sixième, se déroule de nos jours, met en scène une famille afro-américaine (témoignage de l’évolution sociologique de la population américaine) et est marquée par la crise du Covid.

Le cinquième épisode est le plus long. Il constitue le cœur du film. On pourrait même se demander si Here n’aurait pas dû se focaliser sur lui. Il s’agit de l’histoire de Richard (Tom Hanks) de sa naissance , au lendemain de la Seconde guerre mondiale, quasiment jusqu’à sa mort. Son père, ancien combattant qui peine à se réacclimater à la vie civile, et sa mère (la rousse Kelly Reilly qui enflammait L’Auberge espagnole il y a près d’un quart de siècle) s’installent dans cette maison de banlieue où Richard va naître et grandir. Faute de moyens, Richard y passera sa vie avec sa femme (Robin Wright) et sa fille sans pouvoir jamais concrétiser ses rêves d’autonomie. Richard aurait aimé être peintre ; mais il devra se résoudre à vendre des assurances pour faire vivre sa famille.

Here a reçu un accueil critique très tiède. Il est sorti en catimini en France où il n’a fait l’objet d’aucune projection de presse. Ces réactions se comprennent : on peut trouver le film un peu long, une fois dissipée la curiosité suscitée par son parti pris culotté. On peut lui reprocher sa multiplicité d’histoires inégalement développées, seule celle de Richard, de ses parents et de Margaret étant réellement creusée. On peut aussi éprouver un malaise face aux effets spéciaux utilisés pour rajeunir outrancièrement Tom Hanks et Robin Wright. Pour autant, j’avoue avoir pris beaucoup de plaisir à ce film dont le scénario sans temps mort m’a tenu en haleine de bout en bout. Et j’ai trouvé la toute dernière scène particulièrement émouvante.

La bande-annonce

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