Guru a vingt-cinq ans. Tanguy malgré lui, il est coincé dans la maison familiale, entre son père, sa mère et sa tante – dont son père a fait sa seconde épouse au grand dam de la première. Il aimerait pouvoir gagner un peu d’indépendance en s’installant sur la terrasse ; mais une cousine l’a déjà préemptée qui souhaite en faire son cabinet dentaire. La seule solution pour Guru : se marier. Mais avec qui ?
Agra se déroule dans cette ville indienne surpeuplée située à deux heures de train de New Delhi, célèbre dans le monde entier pour le Taj Mahal. Hélas ou tant mieux, on n’en verra rien, dans ce film qui tourne le dos à la carte postale et qui reste tout entier concentré sur son sujet : la cohabitation forcée en Inde et les dégâts qu’elle cause.
Si le cinéma indien, loin des romances sucrées de Bollywood, est parfois zébré d’éclairs de violence, il reste toujours très chaste. Tel n’est pas le cas d’Agra qui n’a pas volé son interdiction aux moins de douze ans et l’avertissement qui l’accompagne. Les scènes de sexe, très crues, s’y succèdent, qui mettent en scène notre héros, érotomane pathologique, avec ses partenaires réelles ou fantasmées.
La maison où se pressent Guru et sa famille est une métaphore de l’Inde surpeuplée dont la cohabitation des habitants n’est pas toujours pacifique. Le jeune homme est représentatif des personnes de sa génération, tiraillées entre l’obéissance due aux aînés et le désir d’émancipation, le tout sur fond de frustration sexuelle qui s’épanche tant bien que mal grâce aux sites de rencontres et risquent parfois de dégénérer en violences sexuelles.
Le film est bizarrement construit, loin des standards auxquels le spectateur occidental est accoutumé. Il démarre très fort par une scène cauchemardesque qu’on n’est pas prêt d’oublier. Son scénario soulève des questions stimulantes : la maîtresse du père conspire-t-elle avec lui à l’éviction de la famille ? la femme que rencontre Guru accepte-t-elle uniquement de l’épouser par intérêt ? Et puis, bizarrement, il laisse ces questions en jachère, Agra se terminant en épingles à cheveux.
Agra vaut certes le détour par la vision originale qu’il donne de l’Inde, loin des images de carte postale ; mais son scénario est décevant qui nous plante au beau milieu sans répondre aux questions qu’il soulève.