Quand les vagues se retirent ★☆☆☆

Le lieutenant Hermes Papauran est considéré comme l’un des plus fins limiers de la police philippine. Mais il est devenu au fil du temps le complice des pratiques arbitraires du gouvernement qui, dans le cadre de sa campagne anti-drogue, multiplie les arrestations et les exécutions arbitraires. Ne supportant plus cette schizophrénie, frappé par un psoriasis généralisé qui le défigure, il décide de quitter la police et de se retirer chez sa sœur au bord de la mer.
Le brigadier Primo Macabantay a jadis formé le jeune Hermes Papauran à l’académie de police. Il est tombé pour ses entorses à la loi et a été arrêté par son élève. Après dix ans de prison, il est relâché. Devenu à moitié fou, sujet à des visions mystiques qui le poussent au crime, il a décidé de retrouver Papauran et de se venger.

Lav Diaz passe, à bon droit, comme l’un des plus importants réalisateurs contemporains. Abonné aux plus grands festivals (Cannes, Venise, Locarno, Berlin), il a développé un style qui lui est propre, même s’il rappelle celui de Apichatpong Weerasethakul ou de Béla Tarr : lenteur revendiquée (on le rattache souvent à l’école du slow cinema), longs plans fixes filmés souvent à distance, usage quasi-systématique du noir et blanc, minimalisme….

Lav Diaz passe pour le réalisateur dont les films sont les plus longs : Death in the Land of Encantos (2007) qui est sorti en France en 2015 mais que je n’ai pas eu le courage d’aller voir dure neuf heures ; Evolution of a Filippino Family (2004) dépasse les dix heures ; From What is Before, Léopard d’or à Locarno en 2014, peut-être son film le plus connu, dure cinq heures et trente-huit minutes.

Avec ses trois heures sept, Quand les vagues se retirent ferait presque figure de court métrage. Au surplus, flirtant avec le polar, il repose sur une trame narrative aisément compréhensible. De là à dire que c’est un film grand public qui maintient tout du long l’audience en haleine, il y a un pas que je ne franchirai pas. Quand les vagues… reste un film incroyablement lent et long qui, comme les précédents films de Lav Diaz, joue sadiquement avec les limites de la résistance du spectateur.

Il constitue certes une critique courageuse de la politique démagogue du president Duterte (2016-2022) qui, au nom de la lutte contre la drogue, a délibérément bafoué tous les droits humains, menant une croisade qui fit dit-on plusieurs dizaines de milliers de morts. Mais cette dimension demeure en arrière-plan, le vrai sujet du film étant la trajectoire de ces deux héros, rongés, au propre comme au figuré, par leur passé. Le film est organisé autour de l’attente de leur rencontre qu’on sait inéluctable. Elle intervient – enfin – à la fin du film et le clôt dans une scène quasi-muette filmée dans un interminable plan fixe évidemment, sur un quai, au bord de la mer.

La bande-annonce

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