Laissez-moi ★★☆☆

Couturière à domicile, Claudine (Jeanne Balibar) élève seule, avec une dévotion admirable, son fils, lourdement handicapé et désormais adulte. Chaque mardi, elle le confie aux bons soins d’une voisine et s’offre une plage de liberté dans les bras d’un client, différent chaque semaine, d’un hôtel de haute montagne. Sa vie bien huilée se grippe le jour où un amant de passage s’attache à elle et demande à la revoir.

Ce premier film d’un réalisateur suisse venu de la mode détonne. Il détonne par son sujet original : le portrait d’une femme à la fois libre et prisonnière. Il détonne par ses décors : le Valais, le couloir rhodanien et les Alpes qui l’entourent. Il détonne par sa temporalité : on comprend que l’action se déroule au mois d’août 1997 mais elle aurait tout aussi bien pu se dérouler vingt ans plus tôt ou plus tard.

Laissez-moi est un film d’une infinie délicatesse porté par son héroïne. On connaît Jeanne Balibar depuis bientôt trente ans. Son élégance racée a fait d’elle une égérie du cinéma d’auteur français. Elle frise souvent la caricature, et parfois s’y égare. Sa consécration dans Barbara, qui lui a valu en 2018 le César de la meilleure actrice, a soulevé des réactions contrastées. L’honnêteté m’oblige à dire que je faisais partie de ceux que la sophistication de son jeu exaspérait.

Mais force m’est de reconnaître qu’elle est parfaite ici. Sans doute pourrait-on considérer que son élégance de grande bourgeoise, son tailleur blanc, ses bottines, son maquillage chargé sont pour le moins improbables, pour ne pas dire absolument pas crédibles, dans le petit village du Valais où l’action est censée se dérouler. Il faut passer par-dessus cette réserve que son apparition inspire, au faîte du barrage de la Grande-Dixence qu’elle traverse chaque mardi avant de rejoindre ses amants. Il faut se laisser envoûter par sa voix, reconnaissable entre mille.

Laissez-moi m’a fait penser à un conte de Maupassant. Il en a l’éclat, la brièveté, la cruauté aussi. Le film a la durée canonique de quatre-vingt-treize minutes. Il est un chouïa trop long. Un format plus réduit aurait peut-être mieux convenu à son sujet minimaliste.

La bande-annonce

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