Marie Madeleine ★☆☆☆

Qui était Marie Madeleine ? Ceux qui répondront : le titre d’une chanson de Sandra sorti en 1985 – et dont le clip vaut son pesant de cacahouètes – sont priés de se taire.
Les autres n’ignorent pas qu’elle accompagna Jésus, assista à sa crucifixion et fut la première à constater sa résurrection d’entre les morts. Hippolyte de Rome la désigna comme « l’Apôtre des Apôtres ».
Mais Marie Madeleine vit son étoile vite pâlir. Le pape Grégoire le grand l’assimila à la pécheresse qui oint le Christ de parfum dans Luc 7, 36-50. Marie Madeleine devient pour la postérité une prostituée repentie. Autre réputation qui lui colla à la peau : celle d’avoir été la maîtresse, l’épouse, voire même la mère des enfants du Christ. C’est cette Marie Madeleine là que peint Nikos Katzantakis dans La dernière tentation du Christ dont l’adaptation à l’écran par Martin Scorsese en 1988 fit scandale (j’étais à l’Espace Saint Michel le soir de l’incendie).

C’en est une toute autre que présente Garth Davis, le réalisateur australien de Lion et de trois épisodes de Top of the lake. Exit la pécheresse. Marie Madeleine (Rooney Mara) est une apôtre comme une autre, qui rencontre Jésus (Joaquin Phenix) sur les bords du lac Tibériade et décide de le suivre pour fuir une vie étouffante et le mari que son père (Tcheky Karyo) et son frère (Denis Ménochet) ont décidé de la voir épouser. Aux côtés de Pierre (Chiwetel Ajiofor), de Judas (Tahar Rahim), elle tient sa place. C’est ce beau visage de femme libre et forte que Vatican II a réhabilité et que ce film honore. Il le fait notamment dans une splendide Cène où Marie Madeleine, à rebours d’une iconographie millénaire, prend place sans autre forme de procès à la droite du Christ.

Le problème est que cette noble cause est bien mal servie par un film d’un rare académisme. Comme les mauvaises piquettes issues de divers cépages de la CEE, Marie Madeleine rassemble des acteurs de toutes les origines – on sera surpris de constater parmi eux une majorité de Français – qui parlent tous un parfait anglais – Mel Gibson avait au moins eu le courage de tourner sa Passion du Christ en araméen – sur les rives de la Sicile – d’où on voudrait nous faire croire que le lac de Tibériade est aussi vaste que la Méditerranée.

Sa première partie est la plus stimulante, qui nous présente des épisodes de la vie de Marie de Magdala que nous ne connaissions pas. La seconde est catastrophique qui filme à toute berzingue les étapes obligées de la Passion – l’entrée à Jérusalem le dimanche des Rameaux, l’expulsion des marchands du Temple (que Jean 2,13 situe quelques années plus tôt), la Cène, la nuit aux Jardins des Oliviers, le chemin de croix, la crucifixion… comme si le budget avait manqué pour les filmer toutes et que le scénariste en avait ras-le-bol de cette histoire déjà trop longue.

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Le Lion est mort ce soir ☆☆☆☆

Jean, un vieil acteur, profite du répit que lui offre l’interruption du tournage du film dont il est la vedette pour retourner sur les traces de son passé. Il retrouve le château et la tombe de Juliette dont il fut amoureux jadis et qui, contre toute raison, lui réapparaît.
Cette vaste demeure inhabitée est le terrain de jeux d’une bande d’enfants qui y tournent un film. Ils ont tôt fait d’enrôler Jean.

Deux histoires, aussi peu crédibles l’une que l’autre, s’entremêlent dans le dernier film de Nobuhiro Suwa, un réalisateur japonais qui a curieusement, alors qu’il n’y a guère d’attaches, construit une large partie de son œuvre en France. Le premier est une réflexion sur la vieillesse, ces dix années entre soixante-dix et quatre-vingt ans où l’homme, nous dit J.-P. Léaud, se prépare à la mort. Le second est un portrait émerveillé de l’enfance, auprès de laquelle le vieillard se régénère, sa bruyante vitalité, sa poétique créativité.

Je n’ai rien aimé dans ce Lion. Ni le jeu outrancier de Jean-Pierre Léaud, que je trouvais déjà horriblement prétentieux dans les premiers Truffaut et qui ne s’est pas bonifié avec l’âge. Ni le piaillement horripilant de gamins bruyants dont les vaines tentatives de tourner en Super 8 des histoires de fantômes m’ont semblé violemment dépourvues de charme et d’intérêt. Ni l’apparition de Pauline Étienne – que j’adore pourtant depuis ses premiers pas fin 2009 dans Qu’un seul tienne et les autres suivront – censée incarner le fantôme de Juliette, la femme trop tôt disparue (suicidée ?) dont le souvenir continue de hanter Jean.

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Human Flow ★☆☆☆

Ai Weiwei, le célèbre plasticien chinois, aujourd’hui exilé en Allemagne, est allé filmer les réfugiés partout autour du monde. En Europe d’abord, mais aussi en Afrique, en Asie et en Amérique. À partir de mille heures de rush, il a tiré une œuvre fleuve de deux heures vingt.

Le sujet est poignant. Il est d’une brûlante actualité. Aujourd’hui le monde compte soixante-cinq millions de réfugiés. Chassés par la guerre, la répression politique, la misère, ils affluent aux frontières de l’Occident qui lui oppose souvent barbelés et xénophobie.

Les images glanées par Ai Weiwei et ses équipes sont impressionnantes. Il réussit tout à la fois à filmer le « macro » (les foules, filmées du ciel, qui se pressent aux frontières de la Grèce ou dans les camps de Jordanie) et le « micro » (un Africain transi de froid qui débarque en Italie, une jeune Kurde qui se morfond d’ennui dans un centre en Allemagne)

Hélas, la démarche de Ai Weiwei n’est pas exempte de défauts.
Le premier est son penchant un peu trop marqué à se mettre en scène  dont on comprend mal la valeur ajoutée.
Le deuxième est l’ambiguïté d’une démarche qui hésite entre le documentaire pédagogique – illustré de nombreux sous-titres informatifs – et l’œuvre d’art aux images trop calculées, trop léchées.
Le troisième est le plus grave. C’est le manque de subtilité d’un documentaire qui aurait pu s’en donner les moyens. La question des migrations est complexe. Elle se présente différemment d’une région à l’autre – là où les belles images d’Ai Weiwei montrent un « monde plat ». La situation des Érythréens qui arrivent en Italie n’est pas celle des Syriens qui affluent en Grèce ou des Rohingyas chassés de Thaïlande.

À trop vouloir esthétiser la détresse des réfugiés, Ai Weiwei échoue à la rendre humaine. À vouloir à tout prix parler à notre cœur, il oublie que le spectateur a un cerveau.

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L’Amour des hommes ★☆☆☆

Amel est photographe. Elle expose ses premières œuvres lorsque son mari décède brutalement laissant cette orpheline seule avec sa belle-famille, des riche patriciens de Tunis. Encouragée par son beau-père, Amel décide de continuer à photographier et entend donner à son art un tour de plus en plus provocateur, invitant des jeunes hommes à poser nu pour elle. Mais c’est sans compter sur les résistances que ses choix suscitent, chez sa belle-famille et dans son entourage.

L’Amour des hommes aurait pu être un film extraordinaire. Un film sur la photographie – comme Blow up d’Antonioni dont il revisite l’affiche. Un film sur la libération des femmes – car Amel entend photographier le corps des hommes avec la même gourmandise que les hommes ont coutume de photographier celui des femmes. Un film sur la Tunisie contemporaine – couturée de tabous mais vibrante de ses libertés refoulées.

Mais hélas L’Amour des hommes est un film raté. Un film qui ne marche pas. Il ne s’en faut de pas grand-chose. Et je confesse volontiers une part de subjectivité assumée dans ce jugement à l’emporte-pièce.

Prenez l’élégante musique de Karol Beffa dont les accents veloutés ne sont pas sans rappeler ceux de Georges Delerue : ils conviendraient mieux à un drame bourgeois tourné par Chabrol ou Ozon dans la froideur de l’hiver parisien des années Pompidou qu’à ce film tunisien sous un soleil brûlant.
Prenez Hafsia Herzi. La jeune actrice d’origine tunisienne était, sur le papier, l’actrice parfaite pour le rôle d’Amel : suffisamment étrangère pour oser ce que les Tunisiennes n’oseraient pas, suffisamment tunisienne pour ne pas faire figure de pièce rapportée. Mais malheureusement, malgré son charme et son talent, la greffe ne prend pas et son jeu sonne faux, dès la première scène du film qui la confronte à la mort de son mari.
Prenez la figure de son beau-père, un patriarche cultivé qui prend l’orpheline sous son aile protectrice mais qui hélas se révèle tristement animé par de bien vils motifs… jusqu’à une scène splendide qui l’exonère de ses pêchés.
Prenez l’ultime pirouette de L’Amour des hommes qui voudrait exalter l’irréductible liberté d’Amel. Elle manque de crédibilité et fait tourner court la seule histoire d’amour du film.

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Signer ★★☆☆

Le verbe signer est le plus souvent transitif : on signe un document, on y appose sa signature. Mais signer peut aussi être intransitif : parler en langue des signes. C’est dans cette seconde acception, plus rare chez les entendants, qu’il faut comprendre le titre du documentaire de Nurith Aviv.

J’avais déjà vu d’elle début 2011, aux Trois Luxembourg archi-comble, son documentaire Traduire consacré aux traductions de l’hébreu. Dans le même cinéma aux rangs cette fois ci nettement plus clairsemés, le seul qui à Paris le diffuse, j’ai vu Signer dont le thème n’est pas si éloigné que Traduire. Dans les deux cas, il s’agit de langage, de tradition, de transmission.

Signer m’a appris que la langue des signes n’était pas universelle ou, pour le dire autrement, qu’on ne signait pas de la même façon d’un pays à l’autre. Je l’ignorais. Pourtant, quand on y réfléchit un instant, l’évidence s’impose : la langue est le reflet d’une culture, d’un rapport aux mondes et les malentendants, comme les entendants, entretiennent un rapport au monde différent selon le pays où ils ont grandi. Il n’existe pas une langue des signes mais des langues des signes – réparties en grands groupes linguistiques aux frontières étonnantes (la langue des signes israélienne appartient au groupe allemand tandis que le groupe suédois rassemble bizarrement la langue des signes finlandais et… portugais).

Signer montre comment la langue des signes israélienne s’est construite au début du vingtième siècle, à partir d’apports allemands, marocains ou algériens. Il montre aussi comment, dans des communautés arabes, des langues des signes autonomes se sont développées. Chacune a son idiosyncrasie. Chacune a ses particularités, qui implique non seulement les mains mais le corps tout entier : le visage, le buste, etc.

Ce documentaire trop modeste dure une heure seulement. Il se limite à Israël. On aurait aimé qu’il ait plus d’ambition et qu’il s’ouvre à d’autres horizons. Le tour du monde des langues des signes reste à filmer.

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La Fille aux deux visages ☆☆☆☆

Clarisse suit Marc, un chirurgien, à son domicile pour une nuit d’amour. Mais Marc l’endort, la ligote et s’apprête à pratiquer sur elle une greffe de visage. On comprend que Marc entend donner à la blonde Clarisse les traits de sa femme défunte, la brune Hélène.

Tout est raté dans La Fille aux deux visages. Son noir et blanc esthétisant qui louche trop ostensiblement vers Les yeux sans visage, l’indépassable chef d’œuvre de Franju auquel le jeune Romain Serir a bien du culot de se frotter dans son premier film. Son scénario difficilement crédible. Sa durée bâtarde (soixante-quinze minutes) trop longue pour un court, trop courte pour un long. Son montage qu’une musique envahissante peine à cacher les maladresses. Son éclairage désastreux. Le jeu de ses acteurs affolant de nullité. Le dénouement inutilement compliqué.

On peine à comprendre qu’un tel film puisse se tourner – il est vrai avec un budget des plus modestes – et, pire, se diffuser – il est vrai dans une seule salle parisienne dont il y a fort à parier qu’il en quitte rapidement l’affiche.

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Red Sparrow ★★★☆

Dominika Egorova (Jennifer Lawrence plus séduisante que jamais), danseuse étoile au Bolchoï dont la carrière vient d’être brisée par une mauvaise fracture, est recrutée par son oncle (Matthias Schoenaerts plus méchant que jamais) dans les services secrets russes. Elle reçoit une formation de choc de la directrice de l’École d’État n° 4 (Charlotte Rampling plus sadique que jamais) aux techniques les plus manipulatrices du sexpionnage. Sa première cible est un espion de la CIA (Joel Edgerton plus américain que jamais) qui protège une « taupe » russe logée dans l’appareil de sécurité de l’État. 

Adapté d’un thriller à succès de Jason Matthews, Red Sparrow ajoute une corde à l’arc déjà richement rempli de Jennifer Lawrence. Dirigée par Frances Lawrence – qui avait déjà réalisé les trois derniers opus de la tétralogie Hunger Games – le geai moqueur devint moineau rouge. Elle paie de sa personne dans le rôle d’une jeune Russe contrainte de rejoindre les rangs des services secrets. Son personnage n’est pas sans rappeler celui de Nikita de Luc Besson ou celui de Charlize Theron dans Atomic Blonde (même perruque platine, même ambiance de guerre froide). Les féministes s’émouvront de l’image dégradante donnée des femmes, condamnées à user de leurs charmes pour réussir et à subir la violence et la domination masculines. Elle n’auront pas tort. On leur répondra que, comme dans les revenge movies, Jennifer Lawrence retourne contre ses bourreaux la violence qu’ils lui ont infligée.

On ressent un plaisir assez primaire à ce blockbuster bien ficelé, bien joué, une sorte de James Bond féminin, filmé entre Moscou et Budapest, Vienne et Heathrow. Sa conclusion est aussi complexe que jubilatoire. Si le succès public est au rendez-vous, une suite sera sans doute tournée. On ne s’en plaindra pas…

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Le Crime de Monsieur Lange ★★★☆

Amédée Lange et Valentine se réfugient dans un hôtel à la frontière belge. Monsieur Lange est recherché pour meurtre. Valentine se propose de raconter aux clients de l’hôtel son histoire pour les laisser apprécier sa culpabilité.

Le Crime de Monsieur Lange commence comme un film noir. Mais il continue bientôt sur le mode de la fable politique.

Comme King Vidor, Jean Renoir filme un microcosme. On n’est pas dans une ferme collective comme dans Notre pain quotidien, mais dans un immeuble parisien. Au rez-de-chaussée une blanchisserie dirigée d’une main ferme par Valentine (Odelle Florelle qui avait joué une émouvante Fantine dans Les Misérables de Raymond Bernard et qui mourut en 1974 dans la misère à La Roche-sur-Yon – je me demande ce qui est le pire : mourir dans la misère ou à la Roche-sur-Yon ?). À l’étage une salle de presse où sévit l’infâme Paul Batala (Jules Berry au sommet de son art) qui se joue de la crédulité de ses employés, hommes et femmes, pour les abuser. Batala met enceinte une des employées de Valentine. Il usurpe à Amédée Lange (René Lefevre, jeune premier prometteur… qui ne tint pas ses promesses) ses textes pour les publier. Pourchassé par ses créanciers, Batala déménage à la cloche de bois et disparaît dans un accident de chemin de fer.

Comme King Vidor, Jean Renoir filme, un an avant le Front populaire, une expérience collectiviste : les employés de Batala se constituent en coopérative et transforment, à force d’abnégation et de bonne humeur, une entreprise en redressement en florissant commerce. Mais hélas, comme on pouvait le craindre, Batala n’est pas mort et revient, le soir de Noël, déguisé en abbé, faire chanter Lange et Valentine.

Le Crime de Monsieur Lange réunit deux monstres sacrés du cinéma : Jean Renoir à la réalisation – qui va signer ses deux chefs d’œuvre La grande illusion et La Règle du jeu – et Jacques Prévert au scénario. Leur collaboration fait merveille. Les textes de Prévert sont aussi truculents que poétiques (on entend un « Embrassez moi » qui annonce Le Quai des brumes). La caméra de Renoir virevolte : on étudie dans toutes les écoles de cinéma le panoramique à 180° utilisé pour filmer la scène du crime. Mais c’est peut-être les scènes de groupe qui sont les plus réussies. Les comédiens étaient unis dans une complicité qui n’était pas que de façade. La plupart faisait partie du Groupe Octobre, une association agit-prop et libertaire proche du Parti communiste. Ensemble, ils ne tournaient pas seulement un film ; ils réalisaient un idéal.

Le Jour de mon retour ★★☆☆

Donald Crowhurst était un plaisancier du dimanche, un brin professeur Géo Trouvetou, qui se mit en tête de relever en 1968 le défi lancé par le Sunday Times : le tour du monde à la voile en solitaire sans escale. Il hypothèque sa maison pour construire à ses frais son bateau, un trimaran à une époque où les monocoques étaient de rigueur.
Mais les difficultés s’accumulent dès le départ de la course. Son bateau, mal préparé, prend l’eau de toute part. Donald Crowhurst hésite à renoncer. Mais, l’abandon serait la ruine pour lui et pour sa famille. Il décide alors de tromper son monde et de donner, par radio, de fausses indications sur ses positions. Tandis qu’il fait des ronds dans l’eau dans l’Atlantique sud et accoste en Argentine pour réparer une fuite d’eau dans son flotteur, les autres concurrents abandonnent les uns après les autres, privant Crowhurst de la discrétion qu’aurait garantie son arrivée bon dernier.

Je me souviens avoir vu gamin à la télévision une fiction consacrée à Donald Crowhurst. C’était une après-midi au début des années quatre vingts. Je pensais que c’était un téléfilm. Il semblerait que ce fut Les Quarantièmes rugissants, un film de 1982 de Christian de Chalonge avec Jacques Perrin et Julie Christie. J’en avais été durablement impressionné. Je me souviens surtout du dernier quart d’heure. C’était peut-être une de mes premières confrontations à la folie.

Le Jour de mon retour (horrible traduction de The Mercy) reprend cette histoire. On en connaît toutes les étapes : le défi lancé à la face du monde, la duperie comme seule alternative au renoncement, la folie qui s’installe et qui emporte tout. Ces trois temps sont filmés avec académisme par James Marsh – dont le succès de Une merveilleuse histoire du temps valait plus par l’interprétation habitée de Eddie Redmayne que par sa mise en scène besogneuse. Colin Firth joue avec application le rôle du gentil Donald. Quant à Rachel Weisz, elle a trop de talent pour perdre son temps dans celui de son aimante épouse.

La critique a démoli Le Jour de mon retour. Il a d’ailleurs quasiment disparu des écrans dès sa deuxième semaine d’exploitation. Pour autant, un jeune adolescent le verra peut-être à la télévision un dimanche pluvieux et en sera durablement impressionné. Ce ne sera déjà pas si mal…

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Avant que nous disparaissions ★★☆☆

Trois extra-terrestres débarquent sur notre planète et prennent possession de trois corps humains : un homme marié au bord du divorce, une lycéenne et un adolescent espiègle. Leur objectif est sans concession et rappelle les scénarios canoniques de la SF : envahir la planète et annihiler ses habitants. Mais les moyens pour y parvenir sont paradoxalement doux : pour préparer cette invasion, il leur faut apprendre à connaître les humains en leur volant leurs concepts d’une simple pression du doigt sur la temps. Ainsi du concept de « liberté », de « propriété », de « travail », de « subjectivité » et d' »amour ».

Le très prolifique Kiyoshi Kurosawa (Creepy, Vers l’autre rive, Yokuzai) nous livre un curieux film de science-fiction. Pas de petits bonhommes verts, ni de rayons lasers, mais, sur le mode dérangeant qui avait tant réussi à la série française Les Revenants, une anticipation « réaliste ».

La réussite de ce film étonnant vient de son parti-pris. Le postulat de base pourrait porter au rire, à l’incrédulité voire au doute : des humains au comportement bizarre se prétendent venir d’une autre planète. Sauf que le spectateur ne doute pas un seul instant. Il sait – parce qu’il a lu cette critique ou toutes celles qui entourent la sortie du film ou tout simplement parce qu’il a vu le titre et l’affiche du film avant d’entrer dans la salle – que ces trois extra-terrestres sont bien ce qu’ils sont et que leur projet est tout sauf aimable. Sauf que leur façon d’être n’a rien de menaçant ni d’inquiétant et que l’apocalypse qu’ils annoncent ne suscite pas l’anxiété.

Film d’extra-terrestre, Avant que nous disparaissions ne charrie pas la charge terrifiante du Village des damnés, de L’Invasion des profanateurs de sépultures, de X-Files ou des Envahisseurs.

C’est dans son dernier tiers que Avant que nous disparaissions révèle son propos. Les amateurs de pyrotechnies y trouveront leur compte, dans une scène époustouflante de combat entre un homme et un drone armé, qui mériterait d’être décryptée en école de cinéma. Mais les autres découvriront dans la scène finale, étonnante de douceur et d’amour, que loin de parler de petits hommes verts et de fin de l’humanité, Avant que nous disparaissions nous parle d’abord de nous.

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