Félicité est une femme forte. Elle gagne sa vie en chantant dans un bar de Kinshasa. Mais quand son fils est victime d’un grave accident de la route, elle doit trouver l’argent exigé pour l’opération qui le sauvera de l’amputation.
Félicité, c’est deux films en un.
C’est d’abord un Rosetta (1999) ou un Ma’Rosa (2016) congolais. Deux films, le premier belge, le second philippin, qui portaient le nom de leur héroïne, à l’instar de Félicité. Une héroïne, présente à chaque plan, qui devait se battre contre la terre entière, la première pour trouver un travail et le garder, la seconde pour réunir l’argent exigé par des policiers corrompus pour relâcher son mari. Comme Rosetta, comme Rosa, Félicité, filmée caméra à l’épaule par Alain Gomis, souvent de dos comme une héroïne dardenienne, déploie une mutique énergie à sauver son fils. Pour y parvenir, ses allers et retours dans Kinshasa sont l’occasion d’une visite kaléidoscopique de cette capitale chaotique.
Alain Gomis aurait pu se borner à tourner ce film-là. Mais l’auteur de L’Afrance et de Aujourd’hui a placé la barre plus haut. Ce premier film ne dure qu’une heure et cède la place à un second, plus poétique, moins linéaire. Ce n’est pas révéler l’issue du premier que d’évoquer la sortie de l’hôpital du fils de Simo et le soudain abattement dans lequel sombre Félicité. Comment en sortira-t-elle ? C’est l’enjeu de cette seconde moitié. Le récit est entrecoupé de longues plages musicales durant lesquelles l’orchestre symphonique kimbanguiste joue la merveilleuse musique d’Arvo Pärt – décidément très utilisé au cinéma sous toutes les latitudes (Knight of Cups, El Club, The Place Beyond the Pines, There Will Be Blood, Gerry…). Félicité, lentement, s’adoucit au contact de Tabu, un voisin dont la force physique n’a d’égale que la douceur de ses sentiments pour la belle chanteuse.
J’ai moins aimé cette seconde partie que la première. Je l’ai trouvé trop longue, moins rythmée, moins cohérente. Pour autant, cette légère déception n’a pas assombri le plaisir pris à ce film qui a largement mérité le Grand Prix du Jury au Festival de Berlin et l’Étalon d’Or au Fespaco de Ouagadougou.