Qui a tué Lady Winsley ? ★★☆☆

L’inspecteur Fergan arrive d’Istanbul sur la petite île de Büyükada dans la mer de Marmara. Un crime vient d’y être commis sur la personne de Lady Winsley, une romancière américaine.
Une goutte de sang a été retrouvée dans l’œil de la victime. Quelques tests d’ADN devraient suffire pour retrouver le coupable. Mais, les méthodes de l’inspecteur Fergan suscitent l’hostilité de la population qui n’entend pas lever le voile sur ses secrets.

On connaît depuis une vingtaine d’années l’œuvre de Hiner Saleem, un réalisateur kurde installé en France, abonné aux grands festivals. Vodka Lemon avait été présenté à Venise en 2003, Kilomètre Zéro à Cannes en 2005, Après la chute à Locarno en 2009. Auréolé de la présence de la sublime Golshiftheh Farahani, My Sweet Pepper Land sorti en 2013, un curieux western kurde, est à ce jour son plus grand succès.

Qui a tué Lady Winsley ? s’inscrit volontiers dans les pas d’Agatha Christie. Il s’agit en quelque sorte d’un remake turc des pastiches qu’en ont tourné, avec le succès que l’on sait auprès du public français du troisième âge, André Dussollier et Catherine Frot.

Mais pour Hiner Saleem, l’intrigue policière est secondaire. Elle est le prétexte à une description satirique de la Turquie contemporaine – dont on peut s’étonner qu’elle ait reçu le feu vert des autorités d’Ankara. Comme Nuri Bilge Ceylan, mais avec autrement plus de légèreté, Saleem fait la caricature d’une société provinciale, endogamique sinon consanguine (toute la population de l’île est plus ou moins apparentée), phallocrate et surtout violemment anti-kurde.

Car Hiner Saleem ne dérive pas de ses obsessions. L’ensemble de son œuvre évoque la question kurde, l’aspiration à l’indépendance de cette nation sans État, l’exil de son peuple dans les pays voisins ou en Europe. On aurait pu croire que ce pastiche distrayant fasse l’impasse sur le sujet. Il n’en est rien. Au risque de plomber Qui a tué Lady Winsley ?, Hiner Saleem ajoute à ce film-millefeuille une couche politique supplémentaire.

La bande-annonce

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