Dans les rues de Kinshasa, la trépidante capitale de la république démocratique du Congo (RDC), quelques performeurs créent. Freddy Tsimba érige sur une place de Matonge une « maison de machettes » que la police a tôt fait de venir détruire. Le métis Béni Barras, qui désespère d’obtenir la nationalité belge, passe ses journées dans un squat à sculpter du plastique fondu. Géraldine Tobe peint des toiles cauchemardesques à la suie. Le performeur Majestikos traverse Kinshasa dans une baignoire remplie de sang. Les Kongo Astronauts déambulent dans des combinaisons spatiales fabriquées à partir de matériaux de récupération.
Il y a quelques années on voyait sur la chaîne Planète Afrik’art, une émission culturelle consacrée à la création contemporaine en Afrique. Perésentée par Elizabeth Tchoungi, ce magazine reposait sur un principe simple : nous présenter chaque mois les créations de cinq ou six artistes d’une ville d’Afrique différente.
Système K – K comme Kinshasa, on l’aura compris – repose sur le même principe. C’est ce qui en fait la principale limite. Il s’agit de découvrir une dizaine d’artistes congolais à Kinshasa et de les suivre dans leur processus créatif.
Ce qui frappe, ce n’est pas seulement la radicalité de ces jeunes artistes, c’est l’incroyable anarchie qui existe dans les rues défoncées et encombrées de la capitale congolaise. Renaud Barret y a posé sa caméra depuis près de vingt ans et y a réalisé plusieurs documentaires. En 2010, c’est le succès surprise de Benda Bilili !, un documentaire sur un orchestre de musiciens handicapés. Le photographe parisien a été happé par la formidable énergie de cette ville tentaculaire. « Chaos permanent », « anarchitecture », « désurbanisme », « darwinisme social absolu », Renaud Barret trouve les mots, ou les invente, pour décrire, dans les interviews qu’il a donnés à l’occasion de la sortie de Système K, cette ville électrique.