La justice restaurative, nous dit le site du ministère de la justice, associe, selon diverses modalités, des auteurs d’infraction pénale et des victimes « en vue d’envisager ensemble les conséquences de l’acte, et le cas échéant, de trouver des solutions pour le dépasser, dans un objectif de rétablissement de la paix sociale ». Prévue par une directive européenne, la justice restaurative a été inscrite dans la loi en 2014.
Jeanne Herry aurait pu lui consacrer un documentaire. Elle lui préfère la fiction en convoquant une belle brochette d’acteurs : sa mère Miou-Miou (excellente dans le rôle d’une septuagénaire qu’un vol à l’arraché a durablement traumatisée), Gilles Lellouche, Jean-Pierre Darroussin, Denis Podalydès, Leïla Bekhti, Fred Testot (méconnaissable) et Adèle Exarchopoulos sur laquelle, si j’ose dire, je reviendrai.
Le précédent film de Jeanne Herry, Pupille, m’avait ému aux larmes. Je lui avais mis quatre étoiles et l’avais rangé au sommet de mon Top 10 en 2018. Lui aussi, qui suivait le parcours de l’adoption d’un bébé né sous X, empruntait déjà à la même veine documentaire. Il convoquait d’ailleurs les mêmes acteurs : Miou-Miou, Podalydès, Bouchez, Lellouche….
La recette marche une fois encore avec quasiment la même efficacité. Hier, une amie me disait l’avoir détesté. Elle parlait de naïveté, d’indécence et de bien-pensance. Je comprends sa colère. Je verrai toujours vos visages est englué dans une bien-pensance mielleuse. Le film nous prend en otage et nous interdit par avance, tant son sujet est admirable, de le contredire. Ces deux reproches d’ailleurs pouvaient être adressés à Pupille contre lequel quelques rares voix dissidentes se sont élevées à rebours de l’avalanche de louanges qui l’avait accueilli.
Mais je trouve à ce film trois immenses qualités qui emportent ma conviction.
La première est son sujet, original et ardu. Imaginez la tête des producteurs quand Jeanne Herry est venue leur proposer un film sur « la justice restaurative » : « Euh, Jeanne… bien sûr… en effet… mais tu voudrais pas plutôt écrire un scénario sur un sujet plus bankable ? ». Courageusement, lucidement, Je verrai… saisit à bras-le-corps ce sujet austère et, avec un remarquable sens de la pédagogie, sans prendre le spectateur pour un imbécile, mais sans non plus lui prêter un savoir qu’il n’a pas, le lui expose : ce qu’est la justice restaurative, mais aussi ce qu’elle n’est pas, les objectifs qu’elle se fixe, tant du point de vue des victimes que des condamnés, les modalités de son fonctionnement.
La deuxième est l’admirable subtilité de son écriture.
Hier, dans une critique assassine, j’étrillais Sur les chemins noirs adapté du récit de Sylvain Tesson. Je persiste et signe dans mon opinion radicale. Qu’y avait-il dans ce film-là ? une seule idée : un homme se reconstruit après un terrible accident en traversant la France à pied. Quelle richesse au contraire, quelle subtilité dans ce film-ci où quasiment chaque scène suscite un flot de réflexions.
Il se focalise sur deux processus. Le premier confrontera trois condamnés pour violence à trois victimes : la première, on l’a dit, interprétée par Miou-Miou, a été victime d’un vol à l’arraché, la deuxième, (Leila Bekhti), est une employée d’une supérette braquée par des cambrioleurs, le troisième (Gilles Lellouche) un père de famille pris en otage avec sa fille à son domicile. Le deuxième processus se réduit à un duo : il s’agit d’une sœur, abusée dans son enfance par son frère qui vient de sortir de prison, de revenir dans sa ville et que sa sœur appréhende de revoir.
Ces face-à-face pourraient être manichéens. Ils ne le sont jamais. Chacun, victime ou coupable, a ses raisons, prend sur soi de les expliquer calmement et surtout, accepte d’écouter celles de l’autre. Quelle merveille, à l’heure où nous sommes souvent bien en peine de nous parler sans nous invectiver, de voir des gens de bonne volonté emprunter une autre voie et en sortir grandis !
La troisième est Adèle Exarchopoulos. J’ai déjà dit mon admiration pour cette actrice qui ne s’abîme pas dans la facilité, fait des choix exigeants et affirme de film en film son talent. Elle est ici impressionnante de maîtrise dans un rôle terrible, à fleur de peau. Qu’elle pleure ou qu’elle sourie cette actrice m’émeut au tréfonds.
Je n ai pas accroché. Certes le choix du sujet est courageux ( j en ignorais complètement l existence) , les acteurs sont tous impeccables mais comme a dit votre amie, à tous ces bons sentiments finals, très touchants, je n y ai pas cru et m ont laissé un goût d inachevé…..
Ce ne sont pa s des « bons sentiments « mais une réalité incompressible . La victime ne peut s’en sortir que si elle fait face à son bourreau … et le bourreau a toutes les chances de comprendre ce qu’il vit si il fait enfin face a des victimes.
C’est l’une des démarches que l’on tente de mettre en place sur le problème des violences conjugales, et qui semblerait ouvrir des portes jusque-là impossible à ouvrir
bizarre ce film, pourquoi prendre des acteurs connus pour le rôle des victimes ? moi j’ai entendu non pas des victimes s’exprimer mais des acteurs , seule la jeune femme brune ( dont je ne sais pas le nom ) est criante de vérité. Et puis d’autres situations fausses : les victimes ne sont pas en face de LEUR agresseur et puis ce semblant de sympathie qui s’installe au fil du temps entre DES agresseurs bousilleurs de vie et DES victimes , je n’y crois pas une seconde .
si vous voulez vous documenter sur la justice réparative, il y a d’autres moyens que de voir ce film où tout est faux
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J’ai vu ce film en présence d’une femme qui travaille dans l’association de justice réparatrice qui est au centre du film.
Dans un débat, à la fin, elle nous a expliqué combien la réalisatrice a travaillé son sujet en interrogeant des acteurs de cette justice.
Et elle nous a assuré que dans 99% des cas, ça se passe exactement comme dans le film.
Il serait profitables aux spectateurs d’avoir une personne du domaine qui participe aux projections puisque, avant que cette dame nous assure que le film était d’une grande juste, je le trouvais aussi plein de bons sentiments… qui s’avèrent véridiques !
J’ai beaucoup entendu à propos de ce film les expressions « dégoulinant de bons sentiments »ou « artificiel ».Oui il l’est, mais on ne peut pas le réduire à ce défaut. Il soulève de vraies questions,bouscule les idées reçues sur le Bien et le Mal, donne la parole à des gens que l’on préfère diaboliser par paresse intellectuelle ou soumission à la vox populi.
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