El (1953) ★★☆☆

Francesco Galvan est un richissime propriétaire terrien. Encore célibataire quoique dans la force de l’âge, il rencontre à l’office du Jeudi Saint la belle Gloria Milalta. Qu’elle soit déjà fiancée à un ami de longue date de Francesco, le jeune ingénieur Raul Conde, n’empêchera pas Francesco de faire la cour à Gloria et de lui demander sa main.
Quelques mois plus tard, Raul retrouve par hasard Gloria. Elle est dévastée. Elle raconte comment Francesco, dévoré par une jalousie maladive, a ruiné son mariage.

Luis Bunuel, on le sait, a vécu une quinzaine d’années en exil au Mexique. Il y réalisa quelques uns de ses chefs d’oeuvre : Los Olvidados, La Vie criminelle d’Archibald de la Cruz, NazarinEl – sorti en France à l’époque sous le titre Tourments – n’est pas le plus connu. Il vient de ressortir en salles dans une version restaurée.

C’est un film d’un grand classicisme qui n’a ni le génie ni les outrances du reste de la filmographie du surprenant réalisateur espagnol. Il ressemble aux films noirs qui se tournaient à la fin des années 40 à Hollywood. On y retrouve les mêmes personnages si élégants, les mêmes décors luxueux. On y retrouve aussi l’intérêt si vif de Hollywood pour la psychanalyse qui caractérise les films de Lang ou de Hitchcock. Adapté d’un court récit de Mercedes Pinto qui s’était fait expulser de l’Espagne phalangiste pour avoir revendiqué le droit au divorce pour les femmes victimes de maris violents, El constitue une analyse presque clinique d’un cas d’école de paranoïa. D’ailleurs Jacques Lacan l’évoquera dans son séminaire de Sainte-Anne.

On y voit la malheureuse Gloria devenir la victime des lubies de plus en plus délirantes de l’infernal Francesco. Tout nourrit sa paranoïa, du souvenir de Raul, l’ancien fiancé de Gloria, à la rencontre inopinée, durant leur voyage de noces, d’un ancien ami de Gloria. Pour la punir de fautes imaginaires, il menace de la jeter du haut du clocher d’une église (la scène annonce celle qui clôt Vertigo  sorti cinq ans plus tard), lui tire dessus avec des balles à blanc. S’imaginant la risée des croyants qui assistent à une messe, Francesco saute à la gorge de l’officiant et manque l’étrangler. Il sera finalement soigné et finira ses jours dans un couvent. Mais l’ultime scène, qui le voit serpenter dangereusement dans le jardin, comme il le faisait jadis en proie à une crise, laisse planer le doute : est-il ou non guéri de sa paranoïa ?

La bande-annonce

Un commentaire sur “El (1953) ★★☆☆

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