L’Affaire Vinča Curie ★★☆☆

En 1958, quatre atomistes yougoslaves, gravement irradiés alors qu’ils travaillaient à l’institut Vinča de Belgrade à un projet secret d’arme nucléaire, sont soignés en France par le professeur Mathé (Alexis Manenti) qui les sauvera en pratiquant la première greffe humaine de moelle osseuse.

Ce film serbe est inspiré d’une page méconnue de la guerre froide, à l’époque où la Yougoslavie titiste, en froid avec l’URSS, avait essayé de renforcer son autonomie stratégique en tentant de se doter de l’arme atomique. L’épisode est l’occasion d’un thriller tourné quasiment en huis clos dans l’hôpital francilien où les quatre scientifiques yougoslaves sont soignés en secret.

Son sujet n’est pas tant la bombe atomique que la course contre la montre menée par les médecins français pour soigner les malades irradiés. Le professeur Mathé travaillait sur les leucémies, mais n’avait jamais osé tenter une greffe humaine de moelle osseuse. La réussite de son opération (pardon pour le spoiler) allait permettre à l’avenir de sauver des milliers de leucémiques.

L’Affaire Vinča Curie est un film volontiers austère, qui refuse ostensiblement de céder aux modes du temps. Sa mise en scène rappelle celles du siècle dernier, sans pour autant qu’il s’agisse d’une figure de style ou d’un projet revendiqué. L’Affaire Vinča Curie a ainsi un aspect démodé, has been. Loin de l’handicaper, ce défaut-là le rend d’autant plus attachant.

La bande-annonce

Rendez-vous avec Pol Pot ★★☆☆

Nous sommes en 1978 au Cambodge. Trois Français, Alain Cariou, un intellectuel (Grégoire Colin), Lise Delbo, une journaliste (Irène Jacob) et Paul Thomas, un photographe de guerre (Cyril Gueï), sont autorisés à visiter ce pays fermé au monde depuis que les Khmers rouges y ont pris le pouvoir. On leur a fait miroiter un rendez-vous avec Frère n° 1, le leader khmer, ancien compagnon d’études d’Alain.

Depuis qu’il a été prisonnier des Khmers, qu’il s’est réfugié en France, qu’il a étudié à l’Idhec, Rithy Panh, aujourd’hui âgé de soixante ans a tourné quelque vingt films, tous plus ou moins consacrés aux crimes de masse perpétrés par les Khmers rouges entre 1975 et 1979. Il a exploré toutes les formes que le cinéma lui permettait pour mener à bien ce travail de mémoire : le documentaire (S21, la machine de mort khmère rouge, Duch, le maître des forges de l’enfer), la fiction et même les figurines d’argile de L’Image manquante (2013).

Dans son dernier film, Rithy Panh convoque tous ces registres. Il s’est inspiré du livre d’une journaliste américaine du Washington Post, Elizabeth Becker, autorisée à visiter le Kampuchéa démocratique en compagnie de deux compatriotes. Leur voyage, unique en son genre, s’est dramatiquement achevé.

Sévèrement encadré par leur comité d’accueil qui n’entend que leur montrer ce qu’ils veulent et leur cacher la réalité sordide des camps de travail, les trois Occidentaux réagissent chacun à leur façon. L’intellectuel maoïste ne peut pas concevoir que la révolution ait trahi ses idéaux ; le photographe de guerre au contraire n’accepte pas d’être pris en otage d’une entreprise de désinformation ; la journaliste essaie, aussi lucidement que possible, de s’en tenir aux faits.

Rendez-vous avec Pol Pot souffre d’une mise en scène très guindée. Les acteurs, contraints d’incarner des caricatures, sont pris au piège de cette mise en scène hiératique. La musique sans âge renforce l’intemporalité d’un film qui aurait pu, à l’identique, être tourné quarante ans plus tôt.
Pour autant, malgré ses défauts, ce film fait oeuvre utile en dénonçant la « pureté dangereuse » au nom de laquelle le communisme a commis au vingtième siècle des crimes impardonnables.

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La Petite Vadrouille ★★☆☆

Un PDG (Daniel Auteuil) confie à Justine, sa directrice de la communication (Sandrine Kiberlain,) une coquette somme d’argent pour qu’elle lui organise un week-end original avec une femme qu’il souhaite conquérir. Albin (Denis Podalydès), le mari de Justine, y voit le moyen de se faire de l’argent facile en sollicitant sa bande d’amis, aussi endettés que lui, pour entraîner le riche homme d’affaires et sa conquête dans une croisière fluviale.

Regarder un film de Bruno Podalydès, c’est comme se glisser dans des charentaises. C’est douillet et réconfortant ; c’est l’assurance de passer un bon moment. D’ailleurs, les spectateurs largement quinquagénaires qui étaient venus en masse à l’avant-première, avaient l’âge de porter de telles pantoufles. De là à dire que je déconseillerais La Petite Vadrouille aux moins de cinquante ans, il y a un pas que, si je n’étais pas moi aussi en charentaises, je franchirais volontiers.

Bruno Podalydès a l’habitude de tourner des films avec sa bande de copains. Son frère au premier chef, qui est de tous ses films, mais aussi Jean-Noël Brouté, Isabelle Candelier, Florence Muller… Même Vimela Pons fait un caméo via son dernier livre. Sandrine Kiberlain, qui était déjà à l’affiche des 2 Alfred – que j’avais beaucoup aimé – et de Comme un avion – qui m’avait laissé sur ma faim et qui présente bien des points communs avec cette Petite Vadrouille – est de la partie. Nouveau venu, Daniel Auteuil semble prendre un plaisir régressif à rejoindre cette joyeuse équipe.

La Petite Vadrouille emprunte son titre au film ultra-célèbre de Gérard Oury. Est-ce un signe d’orgueil ? Au contraire. Il s’agit d’un « petit » film revendiqué. Peut-être même un peu trop revendiqué : à force de nous murmurer « vous allez passer un petit moment agréable avec nous, rien de plus », que finit-il par se passer ? on passe un petit moment agréable… rien de plus.

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