Paula a trente-et-un ans. Ou vingt-neuf. Ça dépend. Elle se retrouve à la rue après une rupture traumatisante avec pour seul bagage le chat de son ex-copain, une cicatrice au front et un manteau rouge volé à l’hôpital.
Caméra d’or au dernier Festival de Cannes, Jeune femme révèle une actrice hors pair. De tous les plans, la rousse Laetitia Dosch promène sa grande silhouette dégingandée dans un Paris pluvieux avec une grâce et une fragilité qui la rendent immédiatement attachante. Elle pleure, elle rit, elle crie, elle danse… Tour à tour forte et fragile, volcanique et éteinte, sophistiquée et naturelle, solaire et lunaire, elle démontre, d’un plan sur l’autre, une étonnante richesse de jeu.
Jeune femme croque une héroïne de notre temps. Comme Cléo de 5 à 7 en 1962, l’unité de temps en moins. Une femme en galère dans un Paris qui ne lui est pas spontanément accueillant – et qu’elle dit détester même si on l’imagine mal vivre ailleurs. Une femme en galère amoureuse mise à la porte par l’homme qu’elle a aimé pendant plus de dix ans et qui rencontre tour à tour une lesbienne qui aimerait la glisser sous sa couette (Léonie Simaga qui fut mon étudiante à Sciences Po avant d’entrer à la Comédie-française) et un vigile prêt à la prendre sous son aile protectrice. Une femme en galère professionnelle qui trouve non sans mal un CDI dans le « bar à culottes » (sic) d’un centre commercial anonyme (Italie 21 à 500m de chez moi) et un boulot de fille au pair chez une bourgeoise faussement sympathique (Erika Sainte remarquée dans Baron Noir).
Tant les critiques que les spectateurs réservent depuis dix jours un accueil enthousiaste à ce premier film. J’aurais aimé partager une telle euphorie. Hélas, j’ai quelques réserves. Sans rien trouver à redire au jeu (d)étonnant de Laetitia Dosch, il ne m’a pas fait vibrer ; il ne m’a pas touché. Le personnage de Paula m’a semblé trop hystérique, trop indécis, trop incohérent, trop tout. Suis-je déjà trop vieux pour comprendre les émois des jeunes femmes de notre temps ? Quant au scénario de Léonor Séraille, si j’ai aimé sa conclusion, ouverte, j’ai trouvé qu’il cédait à une certaine facilité, en accumulant les rencontres à la va-comme-je-te-pousse au risque de réduire les personnages secondaires à des silhouettes.