De 2014 à 2017, l’État islamique installa sa capitale à Raqqa et y imposa la charia. Libérée par les forces démocratiques syriennes en octobre 2017, la ville fut ravagée par les bombardements aériens et les combats de rue. Sa nouvelle maire, Leila Mustapha, est une jeune Kurde, ingénieur civil, âgée de trente ans à peine.
Le documentariste Xavier de Lauzanne a mis ses pas dans ceux de la journaliste Marine de Tilly qui nourrissait le projet d’écrire un livre sur elle. Dans une ville en ruines, où le départ imminent des troupes américaines décrété par Donald Trump laisse planer la menace d’un retour de Daech, ils disposent de neuf jours à peine pour la rencontrer et l’interviewer.
La figure christique de Leila Mustapha ne peut susciter que l’admiration et l’empathie. Elle incarne à elle seule la résilience d’une population martyrisée par un pouvoir fanatique, par la chappe de plomb qu’il a fait tomber pendant de longues années sur une ville et sa région et par la guerre civile qui a réussi à l’en libérer. Femme, jeune, intelligente, belle, Leila Mustapha est un exemple pour tous les féministes en mal de modèle, une femme forte qui n’a rien renié de ses valeurs pour s’imposer dans un monde d’hommes, à l’instar, toutes choses égales par ailleurs, d’une Ruth Bader Ginsburg ou d’une Aung San Suu Ky.
La caméra de Xavier de Lauzanne a réussi à la filmer dans des conditions périlleuses. Le voyage jusqu’à Raqqa, via Istanbul, Erbil et une longue chevauchée automobile sous escorte, en augurent les difficultés. L’édile municipale n’a pas une minute à elle. Elle utilise toute son énergie à reconstruire sa ville en ruines, dans des conditions sécuritaires dégradées. La menace d’un attentat, d’un enlèvement plane. Ses traits tirés portent le témoignage de sa fatigue sinon de son épuisement. Mais sa détermination demeure indestructible.
Il n’y a pas grand’chose à reprocher à 9 jours à Raqqa. En particulier, il serait malhonnête de lui reprocher d’avoir héroïsé une figure indéniablement héroïque. Pour autant, à force de tresser des louanges à cette « maire-courage », à force de souligner ses muets sacrifices et l’ampleur des défis qu’elle doit relever, le documentaire de Xavier de Lauzanne verse dans l’hagiographie plus ou moins assumée. Faute de contrepoint, 9 jours à Raqqa se réduit à un long clip électoral.