Le documentariste suisse Gabriel Tejedor est allé planter sa caméra à Magnitogorsk, à la frontière de l’Europe et de l’Asie, dans cette immense cité sidérurgiste. Pendant plus d’une année, il a attaché ses pas à ceux de trois familles et en a filmé la vie quotidienne.
Après deux documentaires inédits en France, le premier en 2014 sur l’ancien bagne de la Kolyma, le deuxième en 2017 sur les élections présidentielles en Biélorussie, Gabriel Tejedor poursuit son exploration impressionniste des débris de l’ancien empire soviétique. Son documentaire ressemble beaucoup à celui sorti il y a trois ans de François-Xavier Destors dans la cité minière de Norilsk, au nord du cercle polaire arctique.
L’un et l’autre décrivent un environnement ingrat, une immense cité industrielle bâtie au milieu de nulle part, toute entière organisée autour d’une seule fonction : la production métallurgique. Le climat y est extrêmement ingrat – les minimas hivernaux à Magnitogorsk sont presqu’aussi rigoureux qu’à Norilsk – et la pollution y fait des ravages. Si les salaires confortables garantissent un revenu supérieur à celui que touchent les salariés dans le reste de la Russie, c’est bien là le seul avantage comparatif de la vie dans ces cités ouvrières sans charme.
Après le long plan séquence qui ouvre sur le film en circulant dans un paysage industriel steam punk encombré par un amas tentaculaire de tuyaux et de conduites, Kombinat s’éloigne de l’usine – où Gabriel Tejedor n’a peut-être pas eu toutes les autorisations de tournage – pour se focaliser sur la vie quotidienne de trois familles de Magnitogorsk. Lena, fille de métallurgistes, y dirige un cours de salsa avec son compagnon. Sasha est un de ses élèves les plus fidèles. C’est un métallurgiste pur et dur, marié, père d’une adolescente boudeuse, dont ces séances de danse semblent être le seul rayon de soleil dans une vie de dur labeur. Son frère Guenia est métallurgiste comme lui. La fille de Guenia semble souffrir d’un retard mental qui l’incite avec son épouse à organiser son départ de Magnitogorsk pour un environnement moins hostile.
Alors que la Russie est au centre de l’actualité, Kombinat nous donne l’occasion de plonger dans la vie quotidienne de Russes ordinaires. Leur vie banale ne donne guère l’occasion de longues discussions politiques. On ne saura guère ce qu’ils pensent de leurs dirigeants, non pas que la censure les fasse taire, mais simplement parce qu’ils ne s’en préoccupent pas. Tout au plus, voit-on dans leur quotidien (les émissions télévisées qu’ils regardent, les slogans volontaristes que diffuse MMK, la société propriétaire de l’usine, et les fêtes qu’elle organise) des signes de l’embrigadement dont ils sont l’objet. Comme au temps glorieux du communisme, les mêmes valeurs sont exaltées, recouvertes d’une large couche de chauvinisme patriotique.
Il y a en France une grande ignorance du monde ouvrier. Il faut savoir qu’une usine c’est une multitude de métiers différents plus ou moins qualifiés. Au final les personnages de kombinat on ne sait pas ce qu’ils font dans l’usine , quelles sont leurs conditions de travail ce qui ne semble pas être l’objet de ce documentaire .