Vice ★★★☆

Dick Cheney fut pendant huit ans le vice-président de George W. Bush. L’homme, secret et taciturne, est entouré d’un épais mystère. On lui prête la responsabilité de la « Guerre contre la terreur » après le 11-septembre : invasion de l’Afghanistan en 2001, de l’Irak en 2003. La fiction soigneusement documentée de Adam McKay lève le voile sur cet inconnu.

Vice est un régal, un vrai jeu de massacres qui dézingue l’un des hommes politiques américains les plus haïs des États-Unis, du moins dans le camp démocrate – dont on sait qu’il n’est pas nécessairement majoritaire outre-Atlantique. Comme cette sensibilité politique-là est largement représentée à Hollywood, il n’est pas étonnant que Vice y fasse sensation, engrangeant pas moins de huit nominations aux Oscars – et dont il serait injuste qu’il ne reparte pas au moins avec celui du meilleur acteur pour Christian Bale méconnaissable.

Adam McKay, le réalisateur, s’est fait un nom en signant dans les années 2000 plusieurs comédies déjantées avec Will Ferrell (Présentateur vedette, Ricky Bobby, Frangins malgré eux) avant de donner un tour plus sérieux à sa carrière. Nommé cinq fois aux Oscars 2016, The Big Short racontait la crise des subprime avec un mélange unique d’humour et de sérieux. C’est la même recette que Adam McKay utilise dans Vice où il retrouve Christian Bale (Dick Cheney) et Steve Carell (Donald Rumsfeld). Will Ferrell aurait fait un très bon George W. qu’il a imité plusieurs fois dans le Saturday Night Live ; mais le rôle est échu à Sam Rockwell qui en fait un idiot goguenard hanté par l’écrasante figure paternelle.

Vice est une vraie réussite cinématographique qui maintient le rythme de la narration durant plus de deux heures sans une seconde d’ennui, en multipliant les ruptures de ton. Il a le culot d’imaginer en son mitan une fin alternative (que se serait-il passé si Cheney avait abandonné la politique après l’élection de Clinton ?) ou un face-à-face shakespearien entre Dick et son épouse Lynne, véritable Lady Macbeth, au moment d’accepter le poste de vice-président, une charge purement symbolique qui n’a d’intérêt que si le président accepte de déléguer à son titulaire des pouvoirs.

Pour autant, Vice a deux défauts. Le premier est de faire la part trop belle aux événements qui précèdent le 11-septembre. Certes, on apprend comment Cheney a commencé sa carrière auprès de Rumsfeld, comment il est devenu Chef de cabinet de Gérald Ford, représentant du Wyoming et  ministre de la défense de George H. Bush. Mais, on passe trop vite sur la façon dont Cheney a réussi à transformer le 11-septembre en « opportunité » : opportunité de faire la guerre en Afghanistan d’abord, puis en Irak ensuite quand bien même la possession par le régime de Saddam d’armes de destruction massive et ses liens avec Al Qaeda relevaient plus du fantasme que de la réalité.

Le second est plus gênant. Il est annoncé dès le titre. On comprend qu’il y sera question de vice et de vice-président. Car le portrait de Cheney est à charge. À charge quasi-exclusivement – si ce n’est peut-être pour évoquer sa relation à sa fille lesbienne. Et c’est ce manque de nuance qui lèse le film. Manque de nuance dans la description d’un homme chargé de tous les maux de la terre : terne, ambitieux, calculateur, sans scrupule…. Manque de nuance dans la description d’une administration dont Cheney n’était pas le seul à tirer les ficelles. À force de décrire Cheney comme un « super-vilain », Vice le prive de crédibilité et d’humanité.

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La Dernière Folie de Claire Darling ★☆☆☆

La septantaine bien entamée, Claire Darling (Catherine Deneuve) habite une belle demeure dans un charmant village de l’Oise. Un beau matin, elle se réveille hantée par une prémonition : elle mourra le soir même. Du coup, dans un élan de folie, elle décide d’organiser un vide-grenier pour brader toutes ses possessions matérielles.
Une brocanteuse, amie de la famille (Laure Calamy) s’alarme et prévient Marie, la fille de Claire Darling (Chiara Mastroianni).

César du premier film en 2004 avec Depuis qu’Otar est parti, Julie Bertuccelli alterne documentaires engagés (La Cour de Babel) et fictions dramatiques (L’Arbre). La Dernière Folie de Claire Darling ressortit clairement de la seconde catégorie. Il s’agit de l’adaptation d’un court roman de Lynda Rutledge dont l’action se déroule le 31 décembre 1999 au Texas.

Julie Bertuccelli s’en est très librement inspirée. Le dernier vide-grenier de Faith Bass Darling racontait la vie de la riche veuve à partir des objets qu’elle mettait à l’encan : un revolver, une alliance, une pendule, une bible… Rien de tel dans La Dernière Folie… qui se construit plutôt autour de flash-back où l’on voit Alice Taglioni interpréter une Catherine Deneuve plus jeune et pas vraiment heureuse, entourée d’un mari qu’elle n’aime pas (Olivier Rabourdin), d’une fille en pleine révolte adolescente et d’un fils dont on apprendra bien vite le sort funeste. Elle trouve son seul réconfort dans la compagnie d’un prêtre. On dirait du Bernanos en moins austère, du Chabrol sans enquêteurs.

La Dernière Folie de Claire Darling est un film étonnant sinon bancal. Deux films s’y percutent. L’un est lumineux qui a pour héros Catherine Deneuve, Mamie Nova gentiment amnésique qui embrasse comme du bon pain tous ceux qu’elle croise à son vide-grenier. L’autre est plus amer qui montre une Alice Taglioni en grande bourgeoise superficielle et déprimée.

Qu’est-ce que la réalisatrice a voulu nous dire ? Que ces deux femmes n’en font qu’une ? Qu’une grande bourgeoise neurasthénique peut devenir une gentille patriarche ? Qu’il est toujours temps de se réconcilier avec la vie jusqu’au jour de sa mort ?

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Tout ce qu’il me reste de la révolution ★★☆☆

Angèle (Judith Davis) est une militante en colère. Tout l’afflige et lui nuit dans le monde d’aujourd’hui : la ville embouteillée, les distributeurs automatiques qui ont remplacé les bistros, les discours vides de sens.
Cette militante née est née dans une famille de militants. Mais après les déceptions du mitterrandisme et la chute du Mur, ses membres ont renoncé à l’engagement. Sa mère (Mireille Perrier) a disparu à la campagne. Sa sœur aînée (Mélanie Bestel) a épousé un jeune loup de la steppe managériale dont elle a eu tôt fait d’embrasser le mode de vie. Son père (Simon Bakhouche), chez qui Angèle se réinstalle après avoir perdu son travail, vit dans la nostalgie d’un temps perdu. Seule Angèle et sa fidèle amie Léonor (Claire Dumas) ont encore la foi du charbonnier.

La génération X, née après le baby boom, n’a pas eu de chance. Post soixante-huitarde, elle a connu le déclin des idéologies qui avaient bercé ses parents : communisme, maoïsme, tiers-mondisme, féminisme… Les luttes se sont diffractées, l’espoir d’un Grand Soir a régressé, l’engagement militant s’est fracassé sur le mur des égoïsmes et de l’ironie cynique. La génération X a hérité d’un second legs dont elle se serait bien passé : la crise du marché du travail, la montée du chômage, la difficulté à trouver sa place dans un monde qui ne l’a pas attendue.

Judith Davis porte à l’écran la pièce qu’elle avait montée avec le collectif L’Avantage du doute. Les mêmes acteurs l’entourent (notamment l’étonnante Claire Dumas à qui on aimerait promettre une belle carrière), auxquels se rajoutent des visages plus connus : Malik Zidi et Mireille Perrier. Tout le monde n’a pas eu la chance d’avoir des parents communistes évoquait déjà la trace laissée par l’engagement militant de ses parents : mais le film, sorti en 1993, racontait l’année 1958. Sorti l’an dernier, assassiné par la critique et boudé par les spectateurs, Les Affamés, mettait lui en scène des jeunes pleins d’imagination pour trouver coûte que coûte leur place dans la société.

Tout ce qu’il me reste… a sa façon bien à lui de traiter de sujets importants : le militantisme, la – saine – révolte face aux inégalités du monde, les difficultés de la mobilisation collective. Il le fait avec une ironie qui n’est pas sans rappeler Au nom des gens : Angèle (Judith Davis) est une cousine de Bahia (Sara Forestier) dont elle partage l’énergie et la capacité de mobilisation.

Le film semblait bien lancé dans sa première moitié. Il s’affadit dans sa seconde quand les questionnements politiques de l’héroïne se replient sur des névroses personnelles. On se serait bien passé du coup de foudre, aussi charmant soit-il, qu’elle vit avec un séduisant instituteur et de ses retrouvailles sans paroles avec sa mère. Un peu Rosa Luxembourg, un peu Bridget Jones, c’est dans le premier de ces deux rôles qu’on préfère Judith Davis.

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Arctic ★★★☆

Un homme (Mads Mikkelsen) tente de survivre seul dans la carlingue de l’avion qui s’est écrasé au nord du cercle arctique. Un hélicoptère venu le secourir connaît le même sort funeste. Son pilote perd la vie dans l’accident ; mais sa co-pilote, grièvement blessée, en réchappe. Pour la sauver d’une mort inéluctable, une seule option : gagner immédiatement une station saisonnière à plusieurs journées de marche au nord.

Arctic est un survival movie sans concession. Comme Robert Redford, qui luttait dans All is Lost (2013) sur un voilier menacé de naufrage, aucun flashback, aucun dialogue ne vient éclairer la psychologie du héros. Il est tout entier dans les gestes quotidiens qu’il répète : pêcher des ombles dans un trou d’eau, dessiner un SOS sur l’inlandsis dans l’espoir qu’un aéronef puisse le voir, émettre à intervalles réguliers sur le poste de radio… À la différence de Tom Hanks dans l’insupportable Seul au monde (Cast away), il n’y a pas d’avant, pas d’après.

Comme dans La Montagne entre nous (2017) avec Kate Winslet et Idris Elba, les survivants sont bientôt deux. Mais, ici, il n’est pas question d’histoire d’amour. La co-pilote thaïe qui tombe du ciel est inanimée, mourante. C’est un corps inerte qui pose au survivant un dilemme : la laisser mourir ou tenter de la sauver au péril de sa propre vie.

C’est bien sûr la seconde option qu’il choisit, entreprenant un périple épique à travers les montagnes qu’on imagine celles du nord du Groenland. Rien ne lui est épargné : les montagnes infranchissables, le froid polaire, les ours affamés… On ne dira rien de l’issue de sa longue marche qui, jusqu’au tout dernier plan, reste en suspens. Ce suspens est d’ailleurs assez efficace ; car les deux options (ils meurent / ils survivent) sont l’une comme l’autre concevables. Comme All is Lost, Arctic est un film suffisamment confidentiel pour se payer le luxe d’une fin malheureuse.

La peau tannée, les muscles secs, Mads Mikkelsen est de tous les plans. Du Danemark, son pays natal, à Hollywood, l’acteur tisse une carrière étonnante, alternant blockbusters (Casino royale, Rogue One, Hannibal) et les films d’auteur (Royal Affair, Le Guerrier silencieux, Michael Kohlhaas). Le film repose sur ses épaules. Ça tombe bien : elles sont sacrément robustes.

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Une intime conviction ★★☆☆

En 2000, Suzanne Viguier disparaît brutalement sans laisser de traces. Elle avait un amant (Philippe Urchan) et était sur le point de divorcer. Les soupçons se portent vite sur son mari (Laurent Lucas). Mais un premier procès devant la cour d’assises de Toulouse l’innocente. Fait rare : le ministère public fait appel. Un second procès va se tenir devant la cour d’assises d’Albi. Juré lors du premier procès, Nora (Marina Foïs) est persuadée de l’innocence de Viguier. Elle va convaincre le ténor du barreau, Me Dupond-Moretti (Olivier Gourmet) d’assurer sa défense.

Deux films en un. Une intime conviction est d’abord un film de procès comme le cinéma hollywoodien, depuis le film noir des années quarante, nous a habitués à en montrer. Il commence à l’ouverture du procès d’Albi et se conclut au prononcé de son verdict dont on ne dira rien – même si un clic sur Wikipédia vous permettra d’en connaître le sens. Pendant une heure cinquante, avec les juges et les jurés, les avocats de la défense et ceux des parties civiles, on cherche la vérité : qu’est-il arrivé à Suzanne Viguier le dimanche 27 février 2000 ? a-t-elle pris la poudre d’escampette pour fuir un quotidien étouffant ? s’est-elle disputée avec son mari qui refusait qu’elle le quitte ? a-t-elle été assassinée par son amant qu’elle ne voulait pas pour autant épouser ?

Mais Une intime conviction n’est pas que cela. En inventant de toutes pièces le personnage fictionnel de Nora, le réalisateur Antoine Raimbault a voulu l’entraîner dans une autre direction : c’est le film d’une obsession. Nora est obsédée par ce procès. Au point d’y abandonner son fils, qu’elle élève seule, son travail, dans un restaurant toulousain, son amant, qui pourtant déborde de tendresse pour elle. Sa vie se résume à ce seul objectif : faire innocenter Viguier que l’opinion publique, manipulée par les rumeurs distillées par Olivier Durandet, l’amant manipulateur, a dores et déjà condamné. Au risque parfois pour Nora d’utiliser les mêmes méthodes que celles de son ennemi.

Une intime conviction est servi par une interprétation impeccable. Olivier Gourmet est, comme d’habitude, magistral. Il réussit à incarner Dupond-Moretti, dont la silhouette et les mimiques sont désormais bien connues, sans le caricaturer. Après Le Grand Bain et Gaspard va au mariage, Marina Foïs, retrouve le haut de l’affiche qu’elle a déjà plusieurs fois occupé ces dernières années dans L’Atelier et Irréprochable. Un mot sur les seconds rôles : Laurent Lucas n’a pas la tâche facile pour donner de l’épaisseur, sans quasiment prononcer un mot, à un accusé qui peine à se rendre sympathique. Philippe Uchand a la beauferie rondouillarde du méchant de comédie. Et la jeune Armand Boulanger joue avec grâce la fille Viguier, écrasée depuis dix ans par un drame trop lourd pour elle.

Alors pourquoi deux étoiles seulement ? Parce que, malgré ses qualités, Une intime conviction ne parvient pas à se hisser au-dessus du lot, du tout venant (télé)visuel, par la faute de son scénario sans surprise, de sa mise en scène conventionnelle et de son dénouement attendu.

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La Favorite ★★★☆

Anne (Olivia Colman) est reine d’Angleterre dans les premières années du dix-huitième siècle. Malade de la goutte, cyclothymique, gloutonne, elle ne prête guère d’attention aux affaires du royaume, notamment à la guerre qui fait rage avec la France, et en a délégué la charge à sa favorite, Lady Sarah (Rachel Weisz).
Cousine de Lady Sarah, Abigail Hill (Emma Stone) a été réduite par les revers de fortune de son père à s’employer comme servante à la Cour. Mais grâce à une concoction d’herbes qu’elle prépare pour apaiser la goutte de la reine, la jeune femme entrevoit la possibilité de s’attirer ses grâces et de retrouver son rang.

La Favorite déboule sur nos écrans précédé d’une flatteuse réputation. La critique l’encense – à l’exception de Libération (« un barbouillis d’images qui s’affaissent sous leur propre poids ») et des Inrocks (« Prostré derrière sa malice dont il se gargarise grassement, [le cinéma de Lánthimos] semble condamné à rester éternellement englué dans l’admiration de son propre génie »), qui prennent méchamment le contrepied de leurs confrères . Le film a raflé une moisson de récompenses à la Mostra de Venise et aux Golden Globes en attendant sa probable consécration aux Oscars dans quinze jours.

Yórgos Lánthimos est un jeune réalisateur grec surdoué qui, à l’instar d’un Alfonso Cuarón, d’un Denis Villeneuve ou d’un Alejandro Iñárritu, après avoir fait ses premières armes dans son pays (Canine en 2009, Alps en 2011), a tapé dans l’œil des studios hollywoodiens (The Lobster en 2015, Mise à mort du cerf sacré en 2017). Dès les premières images, on reconnaît sa patte. L’image est particulièrement soignée, qui nous plonge dans le même état de confusion que la reine malade : longs travelings, très larges objectifs, effets « fish-eye » refus du champ-contrechamp rapetissent les personnages, les isolent dans des espaces immenses, tordent les lignes droites. La bande son est tout aussi intrigante, mélange de musique baroque et sérielle.

La Favorite est un titre singulier pour un film pluriel. Il met en scène trois femmes : une reine et deux favorites. Des trois actrices, il est difficile de distinguer la meilleur. Qu’Olivia Colman soit en lice pour l’oscar du meilleur rôle et les deux autres pour celui du meilleur second rôle n’a guère de sens. Bien entendu, c’est pour Emma Stone que j’ai les yeux de Chimène (la bisexualité des personnages m’autorisant cette audacieuse métaphore). Elle joue à merveilleuse la jeune ingénue, moins naïve qu’il n’y paraît. Mais force m’est de saluer aussi la maîtrise de Rachel Weisz, impériale de froideur, de beauté et de rage.

La Favorite a la cruauté sadique des Liaisons dangereuses, l’ironie flamboyante de Amadeus, la sophistication baroque de Meurtres dans un jardin anglais. Un chef d’œuvre.

La bande-annonce

My Beautiful Boy ★★☆☆

David Sheff (Steve Carell) travaille comme reporter free lance en Californie. Il a eu un fils, Nic (Timothée Chalamet), d’un premier mariage. Remarié à Karen (Maura Tierney), il a eu avec elle deux autres enfants qu’ils entourent de leur amour dans une maison cossue au nord de San Francisco.
Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes pour la famille Sheff si Nic ne sombrait dans la drogue, sans que l’amour de son père ne parvienne à l’en détourner.

Soirée Dossiers de l’écran. Sujet : « votre enfant se drogue ». Dans les années quatre vingts, la célèbre émission produite par Armand Jammot, présentée par Alain Jérôme et Joseph Pasteur, aurait sans doute montré Moi Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée, puis ouvert un débat rassemblant Christiane Felscherinow, la jeune toxicomane auteure du livre à succès, un responsable public, un père – ou une mère de famille – qui, après la mort de son enfant aurait fondé SOS Enfants drogués, etc.

Les Dossiers de l’écran n’existent plus. Mais les films à thème ont la vie dure. Ils l’ont si bien qu’ils vont par paires. À deux semaines d’intervalle, le sujet de l’addiction a été traitée par deux films similaires : après Ben is Back sorti le 16 janvier, qui évoquait le combat d’une mère (Julia Roberts) voici My Beautifu Boy qui raconte celui d’un père.

Steve Carell, qui s’est fait un nom dans le cinéma comique, assume son virage vers des rôles plus sérieux, un mois à peine la sortie de Bienvenue à Marwen – et de son cuisant échec au box office. Timothée Chalamet et ses boucles rebelles capitalisent sur le succès de Call me by your name (il semble de règle que les titres français des films de cet acteur franco-américain soient systématiquement en anglais). Rien à dire de l’interprétation impeccable et de l’un et de l’autre.

Rien à dire non plus de la précision documentaire avec laquelle la spirale de l’addiction, ses rémissions passagères, ses rechutes toujours plus ravageuses, ses dénis, ses cures plus ou moins respectées, sont décrites. De l’avis des addictologues les plus réputés, tout y est. Surtout peut-être ce sentiment d’impuissance, de fatalité, qu’incarne à merveille Steve Carell : malgré tout l’amour dont Nic a été entouré, malgré tous les atouts qu’il a en main au seuil d’une vie prometteuse, malgré le confort dans lequel il a grandi, sa chute semble inéluctable.

[Attention spoiler] C’est la fin du film qui m’a le moins convaincu. On escompte une mort tristement inéluctable. Tout l’annonce jusqu’à cette overdose, dans les toilettes sordides d’un bar de Haight-Ashbury, filmée sur les accents déchirants de la Symphonie n° 3 de Gorecki.
Mais, comme si cette fin était trop tragique, trop désespérante, Nic en réchappe. Quelques cartons lourdement démonstratifs nous annoncent qu’il vit depuis huit ans sans rechute. Cette conclusion sonne faux – quand bien même elle est basée sur l’histoire vraie de Nic et de son père qui l’ont tous deux racontée dans des livres à succès.

La bande-annonce