Tout va de travers dans la vie de Jérémie (Nicolas Maury) : son père vient de se suicider, son couple bat de l’aile, sa carrière ne décolle pas. Pour panser/penser ses plaies, Jérémie prend le train pour retrouver sa mère.
Après Patrick Chéreau et son célèbre film chorale (Ceux qui m’aiment prendront le train), après Un village français, la série à succès de France 3, après Sébastien Lifshitz et ses deux Adolescentes, le Limousin a décidément la côte. C’est la France moyenne, de l’Occupation à nos jours, loin des centre villes trépidants et des banlieues en feu, la France de nos racines, celle de nos parents, ni pauvre, ni riche.
Cette semaine, amputée par le reconfinement, deux films tiennent – ou plutôt tenaient – le haut de l’affiche : ADN et Garçon Chiffon. On a beaucoup parlé du premier – sans doute en partie à cause des interviews sulfureuses de sa réalisatrice – en critiquant ou en excusant son nombrilisme. On aurait pu faire le même procès au second, passé hélas sous les radars.
Comme Maïwenn pour ADN, Nicolas Maury est le réalisateur, le co-scénariste et l’acteur principal de son film. C’est beaucoup. C’est sans doute trop.
Dans ADN, Maïwenn se filmait au milieu d’un groupe où elle réussissait, avec un talent rare, à faire naître des moments de pure émotion, rires ou larmes. Nicolas Maury n’a pas ce don. Il ne se filme pas au milieu des autres, mais dans des face-à-face successifs : avec un producteur qui refuse de l’engager (Jean-Marc Barr vieillissant), avec son agent qui essaie de le convaincre de son talent (Laurent Capelluto, l’acteur dans un second rôle dont on ne sait jamais le nom), avec une réalisatrice en pleine hystérie (Laure Calamy décidément excellente dans tous les registres), avec son amoureux (Arnaud Valois plus caliente que jamais). Et bien sûr avec sa maman : une Nathalie Baye parfaite dans le rôle de la mère inconditionnellement aimante qu’on a tous rêvé d’avoir ou qu’on a eu la chance d’avoir eue.
J’ai écrit hier que, selon qu’on trouvera Maïwenn bouleversante ou horripilante, on adorera ou on détestera ADN. Je pourrais écrire la même chose ce matin de Nicolas Maury et de son Garçon Chiffon. Avec sa voix haut perché, sa démarche hésitante, l’acteur révélé par son rôle d’assistant maladroit dans Dix pour cent assume sans rougir une homosexualité de grande folle que personne, Dieu merci, n’irait plus lui reprocher de nos jours. C’est moins cette outrance qui m’a gêné que la complaisance de Nicolas Maury à analyser ses tourments intérieurs dans un (trop) long ego-trip narcissique. Il m’a moins donné envie de le prendre dans mes bras pour le câliner que de lui filer deux baffes pour le secouer.