Jusqu’au bout du monde ★★★☆

Dans les années 1860, dans l’Ouest américain, Vivienne le Coudy (Vicky Krieps), une jeune fleuriste élevée au Canada francophone, repousse les avances d’un jeune homme de bonne famille pour suivre au fin fond du Nevada Holger Olsen (Viggo Mortensen), un immigré danois taiseux. Le couple, malgré ses différences, est uni par un lien puissant que mettra à l’épreuve le départ d’Olsen pour la guerre.

J’ai bizarrement tardé à aller voir Jusqu’au bout du monde. C’était un film qui, chez moi, ne suscitait aucune envie, aucune curiosité. J’avais un peu raison… et largement tort. Jusqu’au bout du monde est en effet un film sans surprises ; mais c’est une oeuvre d’une si grande maîtrise qu’on ne peut que saluer ses qualités.

Sa bande annonce laisse augurer une histoire de vengeance dont je peux dévoiler un peu plus le contenu que je ne l’ai fait dans le bref résumé qui précède : pendant que Olsen est au front, Vivienne est agressée par Weston Jeffries, le fils psychopathe du propriétaire terrien le plus puissant de la région. Mais Jusqu’au bout du monde est plus subtil que ce résumé linéaire et que cette fin attendue. Le mérite en revient à un montage malin : le film commence par la mort de Vivienne, par sa mise en bière et par le départ de Olsen de la ferme où le couple a coulé des jours si heureux.

Le film est ainsi construit en flashbacks et flashforwards qui mêlent les temporalités. On y suit la chevauchée d’Olsen, accompagné de son gamin haut comme trois pommes, sur les traces de l’agresseur de sa défunte femme. Remontant dans le temps, on découvre l’enfance de Vivienne, au cœur de la forêt québécoise et la perte de son père. Surtout, on découvre les circonstances, ô combien romantiques, de la rencontre de Vivienne et d’Olsen à San Francisco, leur installation dans le Nevada et les autres membres de leur petite communauté.

Jusqu’au bout du monde est d’un classicisme revendiqué. Ses distributeurs français mentionnent sur l’affiche du film John Ford et Howard Hawks, ce qui est un chouïa prétentieux, mais pas totalement erroné. C’est surtout Clint Eastwood que ce western élégant évoque.

Un Clint Eastwood féministe qui a accepté de partager le haut de l’affiche avec sa partenaire, Vicky Krieps, qui insuffle à son personnage une modernité étonnante, au risque de l’anachronisme. Quand elles ne sont pas réduites à des silhouettes sans épaisseur, les femmes dans les westerns sont le plus souvent des hommes en jupe. Vivienne quant à elle n’est pas Calamity Jane : elle n’est pas un as de la gâchette ; elle aime les fleurs, brique son parquet et prépare des bons repas pour son mari. Mais, aussi aimante et douce soit-elle, Vivienne veut travailler hors du logis et assurer son indépendance. Quand Olsen part au front, elle ne flanche pas face à l’adversité.

Je n’ai pas eu de coup de cœur pour ce film peut-être un brin trop lisse et trop prévisible. Mais force m’est de reconnaître ses qualités et de le recommander sans hésitation.

La bande-annonce

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