La petite ville de Centerville, au cœur de l’Amérique, coule des jours paisibles. Mais, le réchauffement climatique et la fonte des glaces modifient l’axe de rotation des pôles et conduisent à de biens étranges phénomènes. Le jour et la nuit se confondent ; les animaux s’affolent ; et les morts reviennent parmi les vivants. La petite brigade de police de Centerville et les trois agents qui la composent s’avèrent vite débordés.
Le treizième film de Jim Jarmusch a fait l’ouverture du film de Cannes mardi soir. Les concepteurs de son affiche ne s’y sont pas trompés qui font de son casting son principal atout. On y retrouve en effet la bande d’acteurs dont Jarmusch s’entoure depuis toujours. Tom Waits était déjà à l’affiche de Down by Law en 1986 et Steve Buscemi à celle de Mystery Train en 1989. Bill Murray, Tilda Swinton et Chloë Sevigny partageaient celle de Broken Flowers en 2005, à mon sens le meilleur film de Jarmusch – et celui qui de loin a rencontré en France le plus grand succès au box office. Et Adam Driver était le héro de Paterson, son dernier film en date sorti en 2016.
Cette pléiade de stars était la garantie d’une montée des marches haute en couleurs. Mais c’est bien là hélas le seul atout de ce film décevant. Et on s’inquiète, l’espace d’un instant, que la sélection cannoise puisse désormais s’opérer non pas sur la qualité intrinsèque des films, mais sur la réputation, plus ou moins frelatée de leurs réalisateurs et le glamour de leurs acteurs.
Comme l’affiche le montre sans détour ainsi que son titre apodictique, The Dead don’t Die est un film de zombies. Le genre oscille entre deux sous-genres. Le premier, lancé dès l’origine par La Nuit des morts-vivants de George Romero en 1968, est politique : les zombies sont autant de métaphores de corps étrangers qui sont exclus du corps social mais qui entendent y (re)trouver leur place. Le second est ironique. C’est une satire du genre qui en moque les recettes stéréotypées. La comédie britannique Shaun of the dead (2004) en constitue le modèle indépassable.
The Dead don’t Die ne se rattache à aucun des deux sous-genres. En dépit de son pitch, qui évoque le réchauffement climatique et, implicitement, le déni absurde dans laquelle l’administration Trump le tient, The Dead don’t Die n’a rien de politique. Pas plus ne verse-t-il dans la franche rigolade. Jarmusch invente un troisième sous-genre qui s’inscrit dans la filiation de ses films précédents, nonchalants et désabusés : le film de zombies cool. Mais la formule ne marche pas : la coolitude ne sied pas aux zombies.
Si Tilda Swinton est toujours impériale dans le rôle d’une thanatopractrice décalée qui se mue en ninja blanc façon Kill Bill, si un Iggy Pop caféinomane fait une apparition aux petits oignons, le reste du casting semble un peu perdu dans cette histoire . Le scénario – ou plutôt le fantôme de scénario – fait du surplace. En Cassandre omniscient, Adam Driver en annonce la conclusion dès le début du film. On se dirige vers elle benoîtement, sans surprise, ni frisson – on se demande d’ailleurs bien pourquoi le film est interdit aux moins de douze ans.