Dans la danse classique, tout part des pieds. Loïe Fuller décida de danser avec ses bras et inventa la danse moderne en 1892. Tournoyant sur un piédestal dans des jeux de lumière, noyée dans des mètres de soie, cette Américaine connut la gloire à Paris avant d’être éclipsée par sa compatriote Isadora Duncan.
C’est cette histoire haute en couleurs que raconte Stéphanie Di Giusto dans un premier film audacieux. À cheval sur les deux rives de l’Atlantique, « La Danseuse » est une reconstitution soignée de la Belle époque, un splendide portrait de femme(s) et surtout un choc esthétique.
Du Far West à l’Opéra de Paris, pas un bouton de manchettes ne manque aux acteurs tous remarquables qu’on retrouve avec plaisir : Gaspard Ulliel en dandy proustien autrement plus convaincant que chez Dolan, Mélanie Thierry qui gagne en profondeur avec les années sans rien perdre de sa grâce, François Damiens et Louis-Do de Lencquesaing en directeurs de salle…
Deux femmes se distinguent que, hors l’amour fou de leur art, tout oppose. Deux danseuses qui se disputent, dans un combat perdu d’avance par Loïe Fuller, le rôle titre : Soko au visage dur, presque masculin, au corps athlétique et souffrant, à la détermination inébranlable et, dans le rôle de Isadora Duncan, Lily-Rose Depp, si frêle, si gracieuse, si enfantine, qu’on peine encore à regarder sans chercher en elle les traits de ses deux parents.
Les chorégraphies de Loïe Fuller, éclairées par Benoît Debie, sont envoûtantes. Elles sont d’une telle beauté qu’elles en éclipsent le reste du film. On aurait aimé que les scènes dialoguées soient plus courtes et les scènes dansées plus longues.