Reine d’Écosse six jours après sa naissance à la mort de son père, Marie Stuart grandit en France où elle épouse à seize ans le futur roi François II. Veuve à dix-huit ans, elle rentre en Écosse en 1561 déterminée à revendiquer la couronne d’Angleterre. Elle conteste à Élisabeth Ière – fille d’Anne Boleyn et de Henri VIII après le divorce non reconnu par le pape du roi protestant – montée sur le trône quatre ans plus tôt, ses droits sur la Couronne.
Mais la rivalité entre les deux reines va tourner à l’avantage de la seconde.
Mal préparée aux intrigues de la Cour d’Écosse, Marie s’aliéna la faction protestante dirigée par son demi-frère James Stuart en épousant en 1865 lord Darnley, un catholique anglais. De cette union malheureuse naquit un fils unique Jacques en faveur duquel Marie est contrainte d’abdiquer en 1567. Défaite militairement, elle est emprisonnée pendant dix-huit ans en Angleterre et finalement condamnée à mort et décapitée en 1587.
Mary Stuart est sans doute la plus célèbre reine d’Écosse dont le destin tragique inspira écrivains et artistes. Donizetti lui consacra un opéra célèbre et Stefan Zweig une biographie. Le cinéma s’empara de cette figure héroïque. Un film Edison de 1894 reconstituant son exécution aurait donné lieu, dit-on, au tout premier effet spécial de l’histoire du cinéma. En 1936, John Ford confia à Katharine Hepburn le rôle de Marie. En 2007, dans le film de Shekhar Kapur, face à la majestueuse Kate Blanchett qui interprète Élisabeth, Marie est jouée par Samantha Morton.
Le film de Josie Rourke a un double mérite. Il ne renonce en rien à raconter dans toute leur complexité les six années passées par Marie en Écosse, marquées par une série de renversements d’alliance qui manquent égarer le spectateur. Il donne simultanément à cette histoire une dimension actuelle en dressant le portrait de deux femmes condamnées à régner sur un monde dominé par les hommes.
La principale qualité de Marie Stuart est de ne pas sombrer dans le manichéisme. L’affiche du film, sa bande-annonce laissent augurer un combat à mort entre les deux héroïnes : la « gentille » Marie et la « méchante » Élisabeth. Le film évite ce face-à-face simpliste. Si la sympathie du spectateur va naturellement vers Marie, à laquelle l’ardente Saoirse Ronan prête ses cheveux roux et ses yeux bleus, il comprend vite la succession d’erreurs qu’elle commet et qui précipite sa chute. Quant à Élisabeth, un rôle ingrat pour lequel Margot Robbie, peut-être l’une des plus belles actrices au monde, a accepté de s’enlaidir, si elle parvient à rester sur le trône pendant quarante-cinq ans, c’est en renonçant à se marier (un époux aurait probablement revendiqué le titre de roi) et donc à avoir une descendance.
Sans doute Marie Stuart ne révolutionne-t-il pas l’histoire du cinéma. Sans doute souffre-t-il de la comparaison avec La Favorite, sorti trois semaines plus tôt, autrement novateur. Pour autant, pour qui aime les films en costumes et les grandes figures dramatiques, il n’en reste pas moins une grande et belle fresque historique.